Premier faux pas dans la décalogie du Livre des Martyrs, ce 4ème tome débute pourtant bien. Grande première dans le cycle, une bonne portion du roman (250 pages) ne s'intéresse qu'à un unique personnage, Karsa Orlong, sorte de halte dans la narration à plusieurs voix d'Erikson. Cette introduction évoque sans peine Conan et l'imagerie du barbare, musclé, violent, sans pitié. L'histoire de Karsa est simple tout en regorgeant de finesses, et son épopée est l'occasion pour le lecteur d'assister à des chapitres particulièrement marquants, les péripéties s'enchaînant sans jamais vouloir ralentir, mêlant l'action et l'aventure à un degré épique que seul Steven Erikson semble oser. Seulement une fois cette introduction terminée, 700 autres pages nous attendent et le meilleur (et de loin) est passé.


Le "vrai" roman commence donc ensuite, suite quasi directe du tome 2 (en dehors de quelques références au tome 3). Erikson retrouve son habituelle narration chorale, multipliant les points de vues, mais cette fois c'est trop. Trop de personnages, pour pas grand chose ! Nous suivons donc Karsa, Crokus/Couteaux et Apsalar, Tavore, Gamet, Lostara Yil et Perle, Archet/Violain, Kalam, Sha'ik, L'oric, Héboric, Onrack et Trull Sengar,... et d'autres encore, sans oublier les dizaines de personnages annexes (parfois secondaires, parfois extrêmement importants) qui orbitent autour des protagonistes. La liste des personnages nommés, en fin de tome, en compte plus de 130. S'il n'est jamais difficile de savoir qui est qui (malgré leur nombre et les nombreuses sous-intrigues), et si c'est habituel dans cette décalogie, j'ai cette fois trouvé qu'une bonne partie d'entre eux n'apportait pas grand chose au récit. De plus, pour la première fois certains hasards et coïncidences, voyant le chemin des personnages se recouper, sont tirés par les cheveux, et la faiblesse d'écriture (nouvelle, elle aussi) lors de quelques dialogues n'a pas aidé à faire passer la pilule.


Ces multitudes d'intrigues avancent dans ce tome à une vitesse d'escargot, tournant en rond, se répétant (beaucoup), sans que l'on ne comprenne bien pour certaines vers quoi elles nous mènent. Retrouvant un personnage, il est parfois difficile de se souvenir où son récit s'est achevé précédemment tant depuis nous avons suivi d'autres intrigues. Ce défaut est absent des premiers tomes grâce à une maîtrise du rythme ici gravement malmené. Autrement dit ce roman m'a par moments ennuyé. Pour parachever le tout la fin du roman m'a laissé froid, l'explosion d'action et de retournement de situations habituelle, où tout s'assemble à la façon d'un bon Hercule Poirot, est courte et peu spectaculaire. Steven Erikson devait être fatigué. S'il n'écrivait pas que des pavés, aussi...


Reste une vraie affection pour certains personnages (en particulier les Malazéens et leur gouaille de baroudeurs) et des passages réussis malgré tout. L'échec n'est pas suffisamment grand pour me couper l'envie de continuer cette série, mais la déception est là. Ça commençait pourtant si bien !

Pirlouit
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le 28 avr. 2022

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