Une aura de légende entoure l’œuvre de Thomas Mann qui vient de fêter son centenaire en 2024 ; sans doute le roman de langue allemande le plus influent du XXe siècle. Il aura laissé une empreinte indélébile dans la culture occidentale au point d’être cité dans de nombreuses œuvres de la culture populaire depuis sa publication en 1924. Il serait illusoire de dénier l’influence de ce roman sur son époque et jusqu’à aujourd’hui. De ce fait, mes attentes envers ce livre étaient immenses. Je m’imaginais moi-même que l’intrigue aurait une proximité avec le film A Cure for Wellness de Gore Verbinski, dont le contexte narratif est grandement inspiré. Cependant, l’expérience de lecture que m’a procuré La Montagne Magique a été décevante sur plusieurs aspects.
Le titre français, traduction littérale du titre allemand Die Zauberberg, laissait présager d’une histoire faisant la part belle aux descriptions des paysages de montagne et plus généralement du mode de vie qu'impose le climat rigoureux de la montagne. Mais sur l’ensemble du roman, seule une maigre partie est consacrée à décrire cette atmosphère si singulière et sur laquelle on pourrait digresser des centaines de pages. De ce point de vue, je suis clairement resté sur ma faim. Une seule scène demeure en mémoire sur l’ensemble du roman : la tempête de neige qui a lieu au milieu de second tome.
Une autre déconvenue vient du fait que la dimension médicale du sanatorium est très rapidement évacuée de l’intrigue. J’ai pu croire au début de l’histoire que Thomas Mann voudrait explorer et tourner en ridicule les grands médecins qui prétendaient guérir de certaines maladies en traitant leurs riches patients avec l’air frais de la montagne. Ce sujet est également rapidement éliminé de l'intrigue, comme s'il ne devait jamais revenir au cours de l'histoire
En effet, La Montagne Magique fait partie de ses romans qui n’ont pas vraiment d’intrigue ; le cadre du récit et les personnages servent essentiellement de véhicules à une exploration dialectique de certaines idéologies en vogue à l’époque. J’avoue qu’il m’est déjà arrivé de me sentir beaucoup plus investi dans ce genre de roman. Mais dans le cas précis de La Montagne Magique, je dois reconnaître avoir ressenti un ennui systématique durant les nombreuses discussions qui ponctuent les péripéties.
Et en ce qui concerne les péripéties justement, elles se succèdent sans lien logique et sans qu’une direction soit clairement impulsée au récit, ce qui m’a donné cette impression de flotter dans l’histoire. Les personnages ne m’ont pas donné l’impression de présenter de changement identifiable et permettant de s’y projeter.
Enfin, sur le plan purement formel, j’ai trouvé les interventions du narrateur assez grossière et peu pertinente dans le récit.
La Montagne Magique semble émerveiller les générations de lecteurs qui se sont succédées depuis sa parution. Pour ma part, je n’y ai rien trouvé de ce que j’attendais et je me suis sévèrement ennuyé au point d’avoir dû me forcer pour en terminer la lecture. Malgré cette déception, je tenterais probablement un jour de revisiter l'œuvre du prix Nobel allemand pour la Mort à Venise.