Ça commence bien...
J'ai d'abord été été charmé par la prémisse du roman. Les possibilités étaient multiples! D'ailleurs, après le premier chapitre, difficile de dire si le changement du personnage vers le végétarisme...
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le 9 août 2016
10 j'aime
C’est probablement le meilleur livre sur la dépression que j’ai lu.
Le récit est entièrement centré autour de Yonghye, une énigme que l’on déchiffrera très progressivement (surtout dans la dernière partie), sans que ce soit, symboliquement, jamais elle qui s’exprime.
Dans les deux premières parties, la narration s’effectue du point de vue de son mari, puis de son ex beau frère. Les deux hommes, de 2 manières différentes, ne cherchent jamais à comprendre le mal être profond de cette femme qui décide du jour au lendemain de devenir végétalienne (cela aurait dû être le titre du livre, mais le mot coréen n’existait pas encore en 2007). Ils l’objectifient complètement : le mari en ne supportant plus que celle-ci présente mal devant ses collègues de bureau, ou qu’elle ne veuille pas faire l’amour avec lui, le beau frère en en faisant un objet d’art, qui n’est autre que l’aboutissement de pulsions concupiscentes. Les deux la violent : le premier dans une forme « classique » de viol conjugal, le 2ème en profitant de ses troubles psy et de sa vulnérabilité. Les scènes sont crues (sans être pornographiques hein), difficiles à lire. Le propos est très clair : si le beau frère a l’air moins rustre, plus « esthète » que le mari un peu simplet, lui non plus ne s’intéresse pas une seconde au mal profond qui habite Yonghye. D’ailleurs, quand elle commence à lui raconter les rêves qui la torturent, il s’endort.
En fait, personne ne cherche à comprendre Yonghye. La scène du repas avec les parents, outre sa violence concrète, est incroyablement violente sur le plan symbolique : tout ce qui compte, c’est que leur fille sort de la norme, est devenue « bizarre », déshonorante. Les raisons n’intéressent aucun de ses proches. Et pourtant, il y a tant à comprendre.
La dernière partie, du point de vue de sa soeur, la seule femme « narratrice », va enfin nous ouvrir les portes de « la végétarienne ». Au milieu des souffrances terribles vécues dans l’hôpital psychiatrique où elle est internée, la lumière noire projetée par Yonghye va enfin rejaillir sur sa plus proche parente. Rejeter la viande, c’est symboliquement rejeter toutes les violences subies, celle infligée par leur père, par leurs maris respectifs, par des hommes donc. Le vernis de sa vie « parfaite », qui s’était déjà bien fissuré quand elle avait découvert les désirs sordides de son mari envers sa soeur, explose complètement quand elle finit par comprendre pourquoi l’image de Yonghye, immobile dans la forêt et essayant de devenir un arbre, l’obsède à ce point. Parce que sa soeur c’est elle aussi, ses abus sont les siens, et son arbre prend ses racines dans le même terreau.
La Végétarienne, c’est l’histoire d’une femme abusée, que personne n’écoute, ni ses proches, ni les institutions. Un récit d’une efficacité redoutable, notamment dans son style d’écriture qui allie sobriété et poésie, notamment dans les scènes de rêves de Yonghye et dans les visions de sa soeur. Un récit qui ne nous ménage pas, nous faisant éprouver la médiocrité des hommes en nous forçant à observer les femmes avec leurs yeux. Un récit d’une rare finesse.
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Créée
le 19 août 2025
Critique lue 6 fois
J'ai d'abord été été charmé par la prémisse du roman. Les possibilités étaient multiples! D'ailleurs, après le premier chapitre, difficile de dire si le changement du personnage vers le végétarisme...
Par
le 9 août 2016
10 j'aime
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