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Pierre F.Souyri est un ancien professeur de l'Inalco (Institut National des Langues et Civilisations Orientales) et l'ancien directeur de la Maison franco-japonaise. C'est un historien, spécialiste du Japon ancien et contemporain. Il enseigne d'ailleurs aujourd'hui l'histoire du Japon à l'université de Genève. Il a donc écrit, en 1998, Le Monde à l'Envers, aux éditions Maisonneuve et Larose. Dans ce dernier, c'est toute l'époque médiévale du Japon qui est étudiée, c'est à dire du XIIe au XVIe siècle. Plus précisément, Pierre F.Souyri, dans son ouvrage, examine la dynamique opérée par une société très instable, où les conflits sociaux éclatent, où les diversités régionales s'accentuent et enfin, où des formes nouvelle d'expressions culturelles naissent (art du récit, poésie, théâtre, art des jardins, art du thé, art floral, peinture sur rouleaux, esthétique du dépouillement, style architecturaux)

En France, l'époque du Japon médiévale est assez méconnue, et la tendance à la rapprocher de la période féodale européenne est assez grande, du fait des similitudes, qui, il est vrai, sont nombreuses. Le terme de Moyen-Age apparaît d'ailleurs pour la première fois en 1906 par Hara Katsurô, professeur à l’Université impériale de Kyôto, qui a publié un livre sur l'histoire du Japon au Moyen-Age. De plus, aujourd'hui, nous avons une vision plutôt faussée du Moyen-Age, assez négative. Une vision d'un âge obscur, reculé où personne ne connaissait rien et où tout était confus. Les élites religieuses auraient les connaissances mais refuseraient de les partager. Cette période sera le produit d'une critique dès l'époque d'Edo, comme une sorte de rejet. En effet cette époque médiévale se situe au milieu de deux périodes de stabilité (l'époque ancienne dominée par une cour impériale installé à Héian, et l'époque moderne dominée par le shôgunat des Tokugawa à Edo). Pierre F.souyri a pour but, dans cet ouvrage, de montrer que cette époque est pourtant un tournant décisif qui a conditionné les développement ultérieurs. Cette époque médiévale est caractérisée par la prise d'importance de la classe guerrière, et pourtant, l'auteur veut démontrer que l'instabilité et la désobéissance sociale constituent un trait majeur de la société. Pour des historiens d'avant guerre, cette époque est un moment décisif dans l'histoire du Japon parce que c'est à ce moment que s'affirme l'identité nationale au Japon. Le titre du livre, Le Monde à l'Envers, est un terme utilisé par les historiens pour caractériser le phénomène d'inversion des hiérarchies sociales, crée par les révoltes incessantes des classes inférieurs, qui vont mettre à mal l'autorité des classes politiques et de l'Etat.

Afin de mieux comprendre cette époque médiévale, l'auteur à donc choisit de découper son ouvrage en 11 chapitres, et en revenant sur les événements de la fin de la période Héian, c'est à dire sur la lutte pour le pouvoir entre le clan Taira et le clan Minamoto, car elle fait naître le premier shogunat, le premier régime des guerriers, classe si importante pendant le Moyen-Age. Le dernier chapitre quant à lui se termine sur la période des provinces en guerre (Sengoku), qui débouchera sur la prise de pouvoir de Tokugawa Ieyasu, et sur le début de la période d'Edo.










Sources utilisées


A plusieurs reprises dans son ouvrage, Pierre F. souyri détaillera, plus ou moins, les sources qu'il a utilisées pour son oeuvre.

La grande majorité des sources utilisées par l'auteur sont des sources écrites, par exemple des archives, des ouvrages de compilation (Kojiki et Nihon Shoki ?), des chroniques, des notes personnelles, et bien d'autres. Certains documents sont officiels (édits, ordonnances, règlements divers...) établis par la cour, le shôgunat, les monastères, les sanctuaires. Mais il y a aussi des documents plus personnels, comme des journaux intimes, des notes, des chroniques, des commentaires. Les autres sources utilisées sont matérielles, comme des rouleaux peints, des statues, des sculptures, utiles dans la représentation de la société médiévale.

En revanche, la citation de sources est parfois assez confuse dans cet ouvrage. L'auteur a eu à de rares occasions tout de même, tendance à citer le nom d'un historien, mais sans citer directement la source primaire utilisée pour décrire un événement ou autre. Certes, souvent, Pierre F.Souyri cite directement la source primaire, par exemple pour analyser et décortiquer les points essentiels des capacités des guerriers japonais de la fin du XIIe siècle, le discours de Sanemori, rapporté dans le Heike Monogatari est cité. En utilisant cette source, et en insérant une part de ce discours dans l'ouvrage, on comprend de facto pourquoi l'auteur, par la suite, en conclue que les guerriers japonais étaient doués pour se battre avec un arc sur un cheval, et qu'il existait des guerriers puissants à la tête d'immenses lots fiscaux de terres cultivées. Tous les raisonnements suivants sur les Daimyô découlent de cette source directement expliquées. Il est très certainement compréhensible que certaines sources, trop complexes ou qui ne sont pas insérables dans l'ouvrage, ne peuvent pas être décortiquées précisément par l'auteur. C'est pourquoi sur certains passages, il a été décidé de juste citer la source en bas de page, sans plus de détails. Par exemple, au moment d'aborder le sujet sur le temps des bouleversements sociaux du XIVe siècle, l'auteur traite des guerres civiles, marquant une coupure profonde dans l'histoire du Moyen Age. Afin d'étudier les mentalités des Japonais à ce moment là, l'auteur cite comme source, en bas de page, un débat à propos de la signification historique des Cours du Sud et du Nord, qui s'étalerait sur une vingtaine de pages. Ne pouvant pas l'insérer, jugeant peut être qu'elle ne comporte qu'un intérêt moindre dans ce passage du livre (l'auteur ne détaillera pas beaucoup le phénomène d'unité psycho-culturelle unissant les années 1050-1280), il a décidé d'en faire une simple notes en bas de pages. En revanche, il arrive à de très rares moments, que l'auteur base son développement sur le travail d'historiens sans citer la source. Par exemple, il cite l'historien Amino Yoshihiko pour les recherches qu'il a faites sur l'agriculture, sur le travail des bûcherons, des pêcheurs, mais ne cite pas le ou les livres qu'il aurait publiés dessus. Il cite pourtant bien à plusieurs passages des oeuvres du même historien, par exemple sur les danseuses et prostituées au Moyen Age.

En ce qui concerne les sources matérielles, elles sont aussi présentes, plus rarement dans ce livre. En effet, afin de montrer que certaines îles à côté de Kyûshû commerçaient avec la Chine, l'auteur a expliqué qu'il y avait de la monnaie chinoise, ce qui expliquait qu'il y avait bien des relations commerciales entre les deux pays. Il était assez simple de commercer sur ces îles, très proches du bout de la péninsule coréenne. La présence moindre de ce type de source s'explique tout simplement parce que les sujets abordés par l'auteur sont plus aptes à être appuyés par des sources écrites. Par exemple, la place de la religion dans cet ouvrage est très mineur. Dans le cas contraire, on aurait pu s'attendre à une multitude de sources matérielles, comme des statues ou des objets religieux, et bien d'autres. L'ouvrage de Pierre F.souyri met surtout l'accent sur le changement des mentalités des classes inférieures pendant l'époque médiévales, et donc naturellement beaucoup de sources telles que des notes personnelles, des débats, donc plus amenées à être utilisées.





On observe aussi, au fil des chapitres, un changement assez important du type de sources. Plus l'auteur se dirige vers la fin du Moyen Age, et plus les sources utilisées tendent vers livres publiés par des occidentaux, écrits généralement vers la fin du XXe siècle. A l'inverse, les sources utilisées pour traiter de la première partie du Moyen Age proviennent soit de textes écris pendant l'époque médiévale ou de compilations historiques, soit par des japonais au début du XXe siècle. Ceci peut s'expliquer du fait que les occidentaux ont un retard assez conséquent en ce qui concerne l'histoire du Japon. D'ailleurs, très peu d'ouvrages datant d'avant les années 1970 sont cités par l'auteur, en ce qui concerne le travail des occidentaux. A l'inverse, le début du XXe siècle au Japon était une époque charnière dans le travail sur l'histoire du pays. De plus, comme le dit l'auteur dans son ouvrage, de nouvelles forment culturelles naissent pendant cette époque médiévale, et naturellement, on peut s'attendre, dans le chapitre consacré aux nouvelles formes artistiques, trouver des sources jusqu'à alors non présentées, comme des Renga, une forme poétique née à la fin de l'époque d'Héian, mais qui se répand seulement à partir du XIVe siècle.

Enfin, à presque tous les chapitres, aux moment où il a été jugé nécessaires de les apporter, des cartes ont été insérées dans le livre, avec à chaque fois une interprétation et une explication. Le but de ces cartes est de visualiser le Japon sous un angle de vue différent, car la tentation de visualiser le Japon d'aujourd'hui est forte. Par exemple, si aujourd'hui l'on considère Hokkaidô comme une île à part entière du Japon, elle ne l'était pas à l'époque de Héian ou Kamakura. L'Est de l'île Honshû était déjà bien moins peuplée, difficile à contrôler, et considérée comme la terre des barbares. On le voit très bien dans la carte qu'a utilisé l'auteur pour représenter le Japon à la fin du XIIé siècle. Elle permet en un instant de visualiser la situation du pays, et de mieux comprendre ce qui sera expliqué juste après. On voit ainsi, au premier coup d'oeil, que le Kinai est l'axe principal des mouvements au Japon, et que l'Est du Japon n'est presque pas concerné. A plus petite échelle, Pierre F.souyri a jugé important d'insérer une carte de Kyôto au début du XVIe siècle, pour mieux comprendre la situation de la ville après les guerre d'Onin. On comprend ainsi que la ville est découpée en deux axes, très proches l'un de l'autre, avec une ville haute, Kamigyô, où demeure la noblesse et quelques grands guerriers, et la ville basse Shimogyô, cité marchande. On observe sur cette carte l'apparition de fortifications autour des deux villes. En voyant cette carte, on comprend mieux les événements décrits précédemment sur la guerre d'Onin, durant laquelle un très grand climat d'insécurité régnait sur la ville. Les différentes cartes utilisées sont donc elles même de nature différentes. Certaines servent à tenir compte de la répartition des échanges et des axes importants sur le territoire, et d'autres servent soit à tenir compte d'un état dans une ville (carte de Kyôto), soit d'avoir une vision plus stratégique, plus précise d'un conflit (carte de l'époque Sengoku en 1560). Les informations sur les années où les rendements de l'agricultures ont été mauvais bons ou mauvais sont aussi utilisés pour développer des théories sur les agissements de certains clans pendant la lutte entre les Taira et les Minamoto.

Les sources utilisées par Pierre F.souyri sont donc diverses, et varient de manière cohérente selon l'époque ou le sujet qui est abordé. Sources textuelles, cartes, matériaux (monnaie) sont donc constamment cités par l'auteur, sauf quelques passages qui auraient peut être pu être plus précis. En grande majorité, elles permettent néanmoins efficacement (en particulier les cartes) de mieux visualiser la situation lors d'un évènement ou lors d'une période. En revanche, les sources matérielles concernant tout ce qui est en rapport avec la religion sont assez minces. La religion n'est de toute façon que très peu présente dans cet ouvrage, alors qu'elle a eu aussi un impact important sur la société (nouveau bouddhisme de Kamakura, shintô médiévale, apparition du christianisme). Il aurait été intéressant d'avoir plus d'informations à ces sujets, et de savoir de quelle manière ils ont pu influencer ou pas le déroulement de toute cette période médiévale.










Construction de l'oeuvre


Comme cité précédemment, le livre est construit en 11 chapitres, s'étalant de la fin de l'époque d'Héian, jusqu'à la fin de l'époque Sengoku.

Si l'on observe la place réservée à chaque période importante du Moyen Age, on se rend compte que près d'un tiers du livre est consacré à la chute de la cour impériale de Kyôto, qu'un tiers est consacré à l'époque de Kamakura, et que le dernier tiers traite des époques Muromachi et Sengoku. De cette construction, on voit que l'auteur estime que le Moyen Age n'est pas isolé et coupé de l'époque d'Héian, et que les événements qui se sont déroulés à cette période (privatisation des Shôen par exemple) ont constitués les développements suivants (instabilité sociale, développement de la classe guerrière). Dans cette première partie, l'auteur revient très longuement sur la crise de la fin du XIIe siècle, et surtout sur le conflit entre les Taira et les Minamoto, qui s'est conclu par la victoire de ces derniers. L'auteur insiste aussi sur la très grande importance, en particulier pour les guerriers, de la terre, tout simplement parce que cela aura un impact très important dans les siècles suivants. Pendant la période d'Héian, déjà, l'auteur montre que la fidélité même des japonais montre ses limites lorsque les conditions sont en leur défaveur, en particulier à cause des conditions climatiques, ce qui causera du tort à Yoritomo. Finalement, il gagnera quand même la guerre, et sera le premier shôgun du Japon.

La période de Kamakura est un élément essentiel dans le développement de ce livre, car il symbolise toute l'importance pour les guerriers d'avoir des terres et des récompenses. C'est d'ailleurs ce point principale, qui va, à terme, déboucher sur une période où les guerres ne cessent d'affluer. Pendant l'époque de Kamakura, c'est le clan Hôjô qui va profiter du pouvoir, car le fils de Minamoto no Yoritomo n'a pas pu reprendre le pouvoir à sa mort. Le clan Hôjô va commettre une erreur lors des invasions mongoles, qui va avoir une importance très importante. Tous les développements de l'auteur précédemment, sur l'importance des terres au Japon, ont été faits dans le but de mieux comprendre et d'expliquer en quoi l'incapacité du clan Hôjô à récompenser ses guerriers après la victoire contre les mongoles, à provoqué a terme la chute du régime Hôjô et l'apparition de la cour du Nord et de la cour du sud.C'est aussi à ce moment que le titre du livre, Le Monde à l'Envers, prend son intérêt. C'est à ce moment que l'auteur explique que les guerriers deviennent de plus en plus agressifs, toujours en proie à des récompenses et à des terres, et que les paysans s'émancipent de plus en plus des myôshu en accédant à la possession de parcelles. De l'autre côté, les nobles, et pouvoirs politiques perdent de plus en plus leur influence, et sont de plus en plus affaiblis économiquement. Les tensions ont été de plus en plus fortes, et vont découler sur la restauration de Kenmu en 1333 (qui n'a duré que 3 ans).

La période de Muromachi, dans le dernier tiers, est elle découpée en deux parties par l'auteur. La première partie traite de l'apogée des Ashikaga à l'époque Muromachi, dans lequel la région du Kinai est prospère, et où les échanges de développent de plus en plus. Cette période est caractérisée par une modification considérable des structures commerciales, portée de plus en plus vers l'international. C'est en s'appuyant sur les travaux de Tanaka Takeo et sur l'épave d'un ancien navire retrouvée en 1976, ainsi qu'une masse d'informations sur les échanges, que l'auteur en déduit que les Japonais allaient et venaient vers le continent, et entraient vraiment dans l'univers des Chinois et des Coréens. Ces informations sont importantes car elles permettent à l'auteur d'expliquer en quoi les forces politiques au Japon n'ont plus que très peu de pouvoir, et en quoi la société à évolué. Les revenus domaniaux des forces politiques sont en effet en chute libre, et se transforment en organisations financières pour survivre (contrôle de guildes et de péages).








De cet aspect, l'auteur enchaîne directement sur la deuxième partie de l'époque de Muromachi, pour mettre en confrontation cet essor de classes nouvelles avec l'effritement du système. En effet, l'essor de ces marchands, qui jouent sur les prix, créent des tensions économiques, et menacent les paysans, qui avaient entamé leur émancipation, et qui se voient appauvris par ce système. C'est ce qui va, en partie, amener le Japon dans une nouvelle période de guerre. Les paysans, mécontents, se révoltent, des conflits éclatent un peu partout au Japon au XVe siècle (Kyûshû en 1431, Nara en 1432...) et une guerre se produit à Kyôto en 1467 après quelques années de famine : c'est le début de l'ère Onin. Encore une fois, on peut voir que le titre du livre correspond à tout moment avec les propos racontés par Pierre F.Souyri, qui a d'ailleurs à plusieurs moments essayé de justifier cette notion de monde à l'envers.

Cette période de guerre, de 1467 à 1477, va se conclure par l'entrée dans l'époque Sengoku, dite l'époque des provinces en guerre. Cette période est symbolisée par la volonté d'acquérir le pouvoir des seigneurs de la guerre (Hôjô, ou Imagawa par exemple), provoquant des conflits dans tout le Japon, jusqu'à la pacification du pays amorcée par Oda Nobunaga, puis par Toyotomi Hideyoshi et enfin Tokugawa Ieyasu. Ce passage du l'époque Sengoku n'est traité qu'en une cinquantaine de pages, et donc assez mineur dans cet ouvrage. C'est tout simplement parce que l'époque Sengoku est le résultat de siècles d'évolution des classes paysannes et guerrières, et de remises en question constantes de la société. En d'autres termes, c'est la fin de l'inversement de la hiérarchie, et donc la fin du développement de l'auteur.

Outre l'aspect historique des événements, cités ci-dessus, Pierre F.Souyri a placé dans chacun des chapitres, des sous parties plus précises, sur l'évolution des mentalités, sur l'importance de l'agriculture (époque de Kamakura), et sur une société qui s'interroge (nouveaux bouddhistes). Ces passages, ont pour but deux choses. Le premier, c'est de faire comprendre les conditions qui ont provoqué les développements ultérieurs. Par exemple, le développement de l'agriculture intensive, apparue au milieu du XIIIe siècle grâce à la possibilité de faire une double récolte annuelle, au savoir faire des paysans en ce qui concerne la riziculture inondée et les cultures céréalières, permettent d'expliquer en partie comment les paysans ont pu payer des guerriers pour protéger leurs terres, aidant cette classe à monter en puissance, et permet d'expliquer l'évolution économique constatée de la société, qui s'est enrichie. Le deuxième, c'est de corriger, à l'instar des cartes, des idées erronées que le lecteur pourrait avoir. Par exemple, la notion de village est détaillée ici, et l'auteur explique qu'un village au XIIIe siècle n'est pas une petite agglomération groupée, comme on pourrait le penser. Pendant la période de Muromachi, c'est tout l'aspect artistique, avec l'apparition de nouvelles formes d'expression, ou de nouvelles sociabilités, qui est abordé. Il a pour but pour l'auteur, de prouver qu'à cette époque même du Moyen Age, vu comme de manière négative, les Japonais eux avaient conscience d'être à une époque charnière Le bouleversement des hiérarchies tient en partie de cette nouvelle sociabilité, puisqu'à Kyôto par exemple, les différentes classes (supérieures et inférieures) assistaient ensemble à un même spectacle, écoutaient des poèmes, mangeaient et discutaient ensembles. Bien que ce phénomène ait favorisé les liens de sociabilités, il a aussi permis d'engendrer des révoltes.

Le Monde à l'Envers est donc construit en deux axes. D'un côté, les moments historiques importants sont présentés en tête de chapitre (11 en tout), permettant de retracer l'histoire selon un fil chronologique classique. Et d'un autre côté, des sous chapitres sur des phénomènes plus précis (culture, société, agricultures, organisation du territoire) sont implantés dans le but de mieux comprendre les motivations des guerriers et des paysans lors des révoltes, et de mieux se situer dans l'histoire du Japon.






Critique


Lorsque Pierre F.Souyri a écrit Le Monde à l'Envers, sont but n'était pas juste de retracer l'histoire du Japon médiévale. Clairement, il avait pour but de montrer que cette époque médiévale n'est pas juste une période un peu anarchique dominée par les guerriers, mais que c'était une période où les Japonais étaient conscients qu'ils vivaient un moment important dans l'histoire du pays, et que les classes inférieures comme les paysans avaient aussi eu un impact très fort sur la société. Il a de plus voulu montrer que cette société médiévale était très dynamique, avec des classes qui évoluent, des individualités qui se posent des questions et qui se cherchent, avec l'essor de nouveaux courants artistiques qui auront une influence conséquente sur les époques suivantes. En revanche, parfois, l'auteur a tendance (de manière justifiée) à revenir en arrière dans la chronologie du Japon, lorsqu'il passe d'un chapitre général sur l'histoire à quelques chose de plus précis. Le soucis étant qu'à certains moments, le rappel sur la chronologie s'effectue tardivement, et rend parfois confus le lecteur. Par exemple, l'auteur, à un moment, traite de la révolte à Kyôto en 1467, pour ensuite revenir un peu plus loin sur les révoltes antérieures à Nara ou à Kyûshû. La volonté de l'auteur de mettre en exergue la révolte de Kyôto comme étant la plus importante est compréhensible, mais pose problème au moment d'aborder les événements antérieurs, car l'auteur ne comprend pas forcément que le passage sur la révolte de Kyôto était l'introduction de début de chapitre (certains chapitres n'ont pas d'introduction).

Afin d'appuyer ses arguments, il a donc sélectionné une grande quantité de sources en tout genre. Les sources sont en général très utiles Mais si les cartes nous permettent en effet de comprendre la situation en un seul coup d'oeil, ou bien si les monologues de certains personnages historiques ont été rapportés, permettant de mieux comprendre les mentalités de l'époque, certaines sources, comme la simple citation en bas de page d'un livre, n'ont pas beaucoup d'utilité pour un non historien. Ils permettent en revanche, si la curiosité le permet, d'aller se document par soi même un peu plus, lorsque les articles ou livres cités sont disponibles.

Les faits historiques et les sous chapitres sont expliqués dans un langage assez simple (contrairement à certains ouvrages de Francine Hérail qui sont compliqués à lire par exemple). Cela s'explique aussi parce que l'auteur ne s'attarde pas sur un descriptif du régime des codes de l'époque Héian par exemple, qui est extrêmement difficile à comprendre, jugé peut être non pertinent par rapport à la thématique et à l'objectif du livre. Les arbres généalogiques ne sont pas non plus détaillés, contrairement à d'autres ouvrages, alors qu'ils sont souvent complexe. De manière générale, les termes difficiles sont expliqués, et le livre se lit sans poser de soucis de vocabulaire. Pierre F.Souyri reste à tout instant, collé à son sujet, et n'en sort que très rarement. Chaque sous chapitre est un élément important de son argumentation, et très peu de passages auraient pu être coupés. Seul le dernier passage du livre sur la période Sengoku sort un peu de son sujet, étant le résultat et non le développement de l'inversion des hiérarchies sociales, mais il était important de l'insérer puisque le livre traite de toute la période médiévales, et le retirer rendrait l'oeuvre incomplète. On sent en revanche que ce passage à été tronqué, ou tout du moins qu'il a moins pesé dans le livre, étant l'époque qui recouvre le moins de pages.

Pour conclure, ce livre s'adresse à deux types de public. Ceux qui veulent connaître l'histoire du Japon médiévale dans ses grandes lignes, car la chronologie est complète et les événements restent assez détaillés, et à ceux qui veulent avoir une vision plus précise de cette époque, de ce qu'elle a apporté et des conséquences qu'elle a eu sur les périodes ultérieures. En revanche, ce livre n'est pas réellement destiné à ceux qui veulent une histoire complète du Japon médiéval, car il comporte quelques ellipses, et certains passages étant moins complets que d'autres.
Tarask_Coral
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le 10 mai 2014

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