Pour dépasser les clichés.

Le Moyen-Âge est une période sur laquelle les idées reçues voire clichés pullulent, véhiculés par la littérature, la BD, le cinéma…Aujourd’hui encore, on en trouve à la pelle : elle n’est souvent vue que comme une période de « guerres, d’épidémies et de famines », une période de sauvagerie et de barbarie où régnerait uniquement « la loi de plus fort ». Cet ouvrage permet de battre largement en brèche cette vision bien trop simpliste et réductrice en apportant des nuances essentielles donnant une vision plus précise et plus juste. Il est signé par Jean Verdon, grand médiéviste, enseignant à l’université de Limoges pendant plusieurs décennies. En dix siècles, du Ve au XVe siècle, loin d’un monde figé et « arriéré », l’auteur insiste sur les progrès qui ont été réalisés que ce soit dans les techniques (l’irrigation par exemple ou les outils agricoles) ou dans les sciences (mathématiques, cartographie…). Le monde médiéval était bien dur mais la violence n’était jamais permanente dans le temps comme dans l’espace ; on avait plutôt affaire à des flambées brutales de violence le plus souvent localisées.

Et si ce monde était bien dominé par les hommes, les femmes y avaient leur place, même si les plus connues restent des cas exceptionnels ; il suffit de penser à Christine de Pisan, philosophe et poétesse (1364-1431) ou Hildegarde de Bingen (1098-1179), compositrice mais aussi médecin. Sa thèse de doctorat portait d’ailleurs en 1974 sur le thème de « la femme en France aux Xe et XIe siècles ». À l’opposé d’un monde anarchique, il existait des lois parfois non respectées mais qui ne protégeaient pas que les puissants. Bien entendu ces mille ans ont été marqués par des guerres, des épidémies et des famines mais il est impossible de généraliser. Jean Verdon nous rappelle bien aussi que «(…) la période médiévale peut atteindre des sommets de beauté et de spiritualité » visibles par exemple dans les constructions majestueuses de cathédrales aux XII-XIIIe siècles, dans l’extrême finesse des vitraux de la cathédrale de Strasbourg ou le tympan de l’église de Conques. Le spectateur/spectatrice n’est plus là seulement face à des réalisations d’artisans brillants mais d’artistes exceptionnels, le plus souvent anonymes, dont les œuvres ont traversé le temps pour arriver jusqu’à nous. Une période bien plus complexe et riche que le grand public le pense habituellement. Cet ouvrage clair et accessible est un bon moyen de lutter contre « (…) les clichés sur les famines qui n’excluent pas les banquets dans les grandes occasions, sur l’intolérance dont on a exagéré les manifestations, sur la misogynie qui n’empêche pas les femmes de jouer un rôle important notamment dans le cadre familial ». A recommander, une bonne synthèse pour tous les curieux et curieuses de cette période fascinante.