Bouillon de culture, bouillon d'idées...

Bien content d'avoir enfin lu ce bouquin dont je savais bien qu'il manquait à ma petite liste, car Stephen Jay Gould est un écrivain prolifique sur la science en général. "Le Pouce du panda" "est une intéressante série d’articles sur le sujet de l'évolution. Partant de cette étonnante adaptation du "pouce" du panda, Gould aborde toutes sortes de problématiques liées à la théorie de Darwin, mais aussi à la méthodologie et la culture des savants qui la défendent. Ca part un peu dans tous les sens, cet ouvrage, et vous apprenez autant que vous vous distrayez.


J'ai beaucoup apprécié de lire le regard de Gould sur la dispute entre Wallace et Darwin, les premiers partisans de l'Evolution, le premier n'osant pas faire le pas de la sélection naturelle, et s'en remettant à un " designer" et l'autre allant courageusement de l'avant dans sa "révolution".
On appréciera aussi le respect et l’intérêt que montre Gould pour des idées fausses mais compréhensibles dans le contexte de l'époque, comme le concept d'hérédité des caractères acquis chez Lamarck, ou le gradualisme des biologistes pendant un siècle. Il y a dans le livre plusieurs articles sur des gens qui se sont trompés: Kirkpatrick et sa bizarre Nummulosphère, Huxley et son animal le bathybias, Lamarck, etc... On sent que Gould veut exploser le mythe de la science qui avance prudemment, d'assertions vérifiées en expériences concluantes, pour afficher au contraire les préjugés, les idéologies, les mythes mêmes dont sont victimes les hommes de science. Des idées loufoques naissent parfois des concept vrais, nous dit-il.


Le livre est plaisant à lire car il touche à tout. Ecrit en 1980, il commence à évoquer les théories des dinosaures à plumes et à sang chaud, qu'on retrouvera dans "Jurassic Park" quinze ans plus tard. Il propose une étude sur Mickey Mouse . Il évoque ce pauvre acarien qui meurt avant de naitre, et il s'attaque en plusieurs endroits au détournement de la science par le racisme ambiant du XIX° siècle (crane de Cuvier, échelle des cranes par Broca, infériorité des femmes, et même le terrible abus du terme "mongolien" par le Dr Down,...).
La fin de l’ouvrage est plus technique sur la phylogénie et les embranchements de la taxonomie, mais ça se laisse lire sans problème. Le dernier chapitre est très sympa avec ce clin d’œil du paléontologue Gould vers ses collègues et néanmoins amis physiciens, car c'est en étudiant les fossiles de coquillages que l'on a remarqué et prouvé que la rotation de la Terre décélérait !


Seul bémol pour moi, la pique vers Richard Dawkins, dont Gould ne supporte guère la théorie du "gène égoïste". Si pour Dawkins l’unité de l'évolution est le gène, Gould considère en naturaliste que l'individu est le seul objet et "cible" de la sélection naturelle. Un point de vue qui se défend, mais que la prégnance de la génétique aujourd'hui rend peut-être moins pertinent (mais je ne suis pas spécialiste...).


Très chouette lecture d'un des nombreux ouvrages d'un scientifique que je compte découvrir plus avant. Recommandé, les enfants !

nostromo
8
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le 14 déc. 2015

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nostromo

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