Rien n'est sans raison

Nihil est sine ratione

Qu'elle est lancinante cette ritournelle qu'utilise Heidegger pour exploiter le principe de raison suffisante de Leibniz dans ce livre Le principe de raison, texte important par son aspect didactique qui fait ressortir la puissance philosophique de son auteur.

Tournant autour du principe de raison, sondant cet objet si particulier à travers des conférences rassemblés, Heidegger finit par le rapprocher rapidement de sa propre marotte, l'être.

Nihil est sine ratione

Rien n'est sans raison. Dans cette sentence encore et encore martelée au fil de l'ouvrage, la raison finit par trouver une harmonie dans l'être. En effet, tous les étants disposent d'une raison (car rien n'est sans raison), et le chemin qu'emprunte l'élève de Husserl mène à l'être desdits étants.

Le dévoilement de l'être par le biais de l'usage de la ratio (qui s'entrelace autour du Grund allemand, comme raison, comme fond et comme sol) prend magiquement son sens poétique, mystique, au fil des pages de l'ouvrage.

Nihil est sine ratione

Heidegger touche déjà du doigt la puissance unificatrice de la raison, sa manière qu'elle a de réduire toutes les subjectivités à une quantité calculable par le principium reddendae rationis (cet appel à la réduction de la totalité selon les codes de la raison). On saisit pourquoi la pensée de Martin Heidegger est un matériau fondamental pour un penseur comme Jean Vioulac, critique féroce d'un capitalisme dévastateur et dépendant d'une technique qui utilise, pour ses rouages, la raison comme huile-moteur par trop efficiente.

Nihil est sine ratione

Mais contre cette pensée purement calculatrice, Heidegger conclut en adressant ce subtil espoir qu'une pensée méditative, éclairante, puisse finalement servir l'essentiel : le dévoilement de l'être.