Lire un bouquin écrit par un ou une universitaire peut être parfois fastidieux, quand on n'est pas soi-même spécialiste de la chose : multiples références à des travaux et à des papiers complétement inconnus, jargon spécialisé. Quand de plus l'auteure libanaise (qui finit par l'avouer en fin de bouquin) ne maitrise pas parfaitement la langue française (quoiqu'elle ne s'en débrouille tout de même pas si mal, loin de là), l'ouvrage a forcément quelque chose d'un peu aride, au sens où le plaisir de tomber sur une belle phrase ou une punchline se fait rare pour ne pas dire inexistant. Tout ça pour dire que ce bouquin, ce n'est pas du Bégaudeau. Ça ressemblerait plutôt à un mémoire de thèse.
Pour autant, le propos est intéressant et le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il est étayé. Même si je n'ai pas le recul pour juger du bien fondé de la plupart des arguments scientifiques avancés, je les ai jugés crédibles. Bon, peut-être que j'en avais envie, tout bêtement parce que ça allait dans le sens de mes opinions, de ce que je ressens. Que voulez-vous, je ne sais pas résister à un démontage en bonne et due des mythes entretenus, avec un soin méticuleux par les faiseurs d'opinion, par et pour les sociétés capitalistes.
Ici, c'est du talent et aussi du mérite qu'il s'agit. Et si le bouquin est un peu austère, il a les qualités de ses défauts, à savoir qu'il est fort bien organisé, ce qui fait que même sans être spécialiste, on en retient sans mal les lignes directrices. Le talent viendrait des gênes ? Que dalle, c'est l'environnement (et les facilités d'apprentissage disponibles) dans lequel tu grandis qui en facilite ou en freine le développement. Et plus ça commence tôt, mieux ça vaut. Le talent viendrait en plus d'un travail assidu ? Pas du tout, rien ne sert de trimer comme un bourrin, c'est la qualité de l'exercice qui fait la différence. De là à conclure qu'on n'est pas tous socialement égaux pour devenir un virtuose ou un champion , il n'y a qu'un pas que Karaki franchit allègrement, pour conclure sur l'idée que c'est à travers nos interactions sociales que nous développons nos capacités dès la naissance. Mais encore faut-il être en mesure d'avoir les interactions sociales qui nous permettront de le faire.
Bref, une lecture certainement beaucoup plus salutaire que le nouveau roman pornographique du ministre de l'économie et des finances, à qui il aura peut-être manqué certaines interactions sociales.