Pour ceux que cela intéresse, j’ai déjà rédigé un article à propos des données que Jean-Louis Brunaux apporte dans son livre (ici).


Il nous reste peu de choses des druides et de la culture celte, à l’écrit. Malheureusement, l’immense majorité du corpus que les archéologues et historiens exploitent a été écrit par les Grecs et les Romains. Et forcément, ceux-ci avaient une vision biaisée de ces "barbares".


Je dois avouer que j’ai été un peu inquiet au début du livre : l’auteur tient parfois des propos très critiques sur les Indo-Européens, notamment sur Dumézil, tout en parlant de psychanalyse comme d’une science sérieuse. J’ai failli m’arrêter là dans ma lecture, ne comprenant pas pourquoi il semblait s’en prendre aux études indo-européennes, tout en défendant une pseudo-science absurde. Ayant pris mon courage à deux mains, j’ai continué. Au final, l’apport principal de ce livre réside dans l’abondance de sources antiques qu’il nous fournit.


La méthodologie de l’auteur est très intéressante : partir des textes ou des fragments les plus anciens pour en arriver aux études sur les druides du XXe siècle. Il dénonce également la récupération du druidisme par les « pan-celtiques » et les nationalistes de tout bord, et présente les druides comme des membres celtes influencés par les Grecs, s’inscrivant ainsi dans un héritage bien plus large que celui des simples Indo-Européens, en évoquant même d’éventuelles influences sibériennes, notamment pour ce qui est de la puissance des bardes. Ce sont des hypothèses de travail et nous n’aurons jamais de réponse définitive.


Je ressors de ce livre avec de nombreux fragments à lire, ainsi que des noms d’auteurs et de personnages de cette époque — surtout du côté gaulois — que je ne connaissais pas. La Guerre des Gaules est un ouvrage que j’ai déjà lu, mais je ne me souvenais plus de ce Diviciacos, un Éduen qui a collaboré avec César lors de la conquête. Brunaux nous replace dans le contexte de la Guerre des Gaules, lors de laquelle le monde des druides, en déclin, allait bientôt se métamorphoser et donner naissance aux « Gallo-Romains ».


Il trace l’histoire des druides sur une période s’étalant du VIe/Ve siècle avant J.-C. jusqu’au début de notre ère. Brunaux ne considère pas l’île de Bretagne comme un centre important du druidisme et il exclut également les écrits irlandais de ce champ, arguant de la distance géographique — les Îles Britanniques ayant reçu moins d’influences des Grecs et des Romains — et temporelle, avec un écart d’environ 1 500 ans entre le druidisme gaulois et les récits irlandais.


Celtes lettrés, mais recourant presque exclusivement à l’oralité pour transmettre leur savoir, plus philosophes que prêtres, Brunaux propose une image du druide très éloignée de Panoramix et plus encore de Merlin. Il leur attribue même un esprit rationnel, quasi cartésien avant l’heure, animé d’une véritable démarche scientifique. J’ai apprécié ce livre, malgré une certaine longueur que je trouve un peu excessive au vu du peu de sources dont nous disposons.


Je le conseille à ceux qui n’ont pas peur de se confronter aux textes antiques et, surtout, à ceux que cela ne dérange pas de plonger dans des hypothèses. Rien n’est assuré quand on parle de connaissances immatérielles, fondées sur quelques rares restes écrits vieux de plus de 2 000 ans.


L’auteur me semble parfois injustement sévère avec les « pan-celtiques » ou ceux qui valorisent la culture celtique aujourd’hui. Bien entendu, le breton encore enseigné a connu des évolutions depuis le haut Moyen Âge et n’a sans doute plus grand-chose à voir avec la langue parlée par les Gaulois, tout comme le français contemporain est un lointain descendant du latin, après avoir intégré de multiples couches de substrats et de superstrats.


Son côté anti-nationaliste pourra en rebuter certains, d’autant qu’il ne cite pas directement les auteurs ou les courants qu’il critique. Mais cela reste son opinion, et, bien qu’il l’affiche, cela ne remet pas en cause, à mon avis, l’ensemble de son propos.


En résumé, les druides auraient été des Celtes pythagoriciens, à la fois philosophes, enseignants, présidant aux affaires de la justice, de la vie politique et de la religion. Participant d’une société complexe, épaulés par des bardes et des ovates exerçant également des fonctions religieuses, ils auraient été les précurseurs d’un peuple gaulois en voie de prendre conscience de son unité, notamment lors des assemblées (Carnutes) réunissant les nations de toute la Gaule.


PS : Après des recherches, je me suis rendu compte qu'il s'attaque aux historiens et spécialistes des Indo-Européens associés au GRECE et à la Nouvelle Droite.

Franc_cot
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le 14 juin 2025

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