Si ce premier volume de la saga de la Passe-Miroir n'est pas le chef-d’œuvre vanté ici et là, il faut tout de même lui reconnaître quelques mérites qui justifient cette note. D'abord, il s'agit d'un premier roman et Christelle Dabos convoque ici une puissante imagerie visuelle pour nous dépayser et nous entraîner dans son univers. Je ne suis pas du genre "cocorico", mais ça fait du bien de lire de la littérature jeunesse rafraîchissante en français, par une auteure française. A cela s'ajoute une intrigue où le personnage n'est jamais dans une situation "confortable". Je m'explique, si l'on prend les sagas de Fantasy jeunesse (Pullman ou Rowling pour citer les plus connues), le personnage principal, s'il vit de "désastreuses aventures", a néanmoins l'avantage de connaître un refuge mental ou réel qui lui permet de surmonter cette épreuve. Ici, dès l'arrivée d'Ophélie au Pôle, elle est dans le flou et l'inconnu, marchand sur des œufs à la moindre ligne de dialogue, et cela rend l'ensemble assez étrange et agréable. Par ailleurs, la galerie de personnages secondaires est assez attachante, avec un mention honorable pour Renard ou encore Gaëlle, que l'on espère revoir à l'avenir.
Alors qu'est-ce qui pêche dans cet ensemble qui, dit comme ça, a l'air d'avoir les meilleurs atouts du monde ? L'ensemble de l'univers a l'air d'avoir sa propre cohérence, mais je ne semble pas la saisir. Et si l'on est assez loin (je trouve) de Harry Potter et d'A la Croisée des Mondes (l'héroïne va dans le Nord et elle porte des lunettes... à mes yeux le comparatif s'arrête là), en revanche, l'influence de Hayao Miyazaki est indéniable. On est quelque part entre Laputa et Le Château Ambulant, et ça se sent clairement. Alors ce n'est pas forcément un mal (Miyazaki est un de mes cinéastes favoris et le Château Ambulant fait partie de mes films préférés), mais du moment où je me suis fait cette remarque, toute ma vision de l’œuvre a pris ces atours, la rendant peut-être moins personnelle.
Et pour terminer cette brève critique, un des principaux défauts du roman, est qu'il s'agit d'un tome 1 dans le sens le plus littéral du terme : l'action qui s'arrête à la fin du tome reprend dans le suivant exactement au même endroit. Il est donc bien difficile de pouvoir juger l'intrigue dans son entier, mais le roman perd de ce fait, une unité, une ligne directrice qui lui permettrait d'exister pour lui-même sous le thème de son titre. Au lieu de quoi, il semble que Christelle Dabos ait privilégié une mise en place de 500 pages plutôt contemplative (l'héroïne et son fiancé sont particulièrement passifs), ce qui donne parfois la sensation de longueurs. D'autant que certaines complications que connaît Ophélie semblent se résoudre d'elles-mêmes sans qu'elle ait besoin d'intervenir.
A voir donc, avec la suite, pour ce premier roman, en espérant que ça décolle un peu sur le tome suivant et que les intrigues passent la secondes, maintenant que l'univers nous est clairement dépeint.

CrysTurncloak
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le 2 nov. 2017

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