La principale qualité de Frédéric Lenoir, c'est sa capacité à vulgariser. Alors, cela peut irriter les puristes, qui considèrent alors que Lenoir n'a rien d'un grand, qu'il manque de précision et donc de résultat. Mais cela a l'avantage évident de rendre accessible des domaines ou des thèses qui passent d'ordinaire au-dessus des non initiés.

Notons également que le principal défaut de Frédéric Lenoir, c'est sa capacité à vulgariser. Elle est dramatiquement irrégulière. Lenoir est en effet capable de produire l'infâme âme du monde, une sorte de bouillie pseudo-philosophique, bourrée de bons sentiments et complètement exempte de justesse et de précision, à mi-chemin entre le délire new-age et le roman initiatique pour ado ; Le Miracle Spinoza, dans lequel Lenoir confond ce qu'écrit Spinoza et ce qu'il croit en avoir compris en terminant son exposé sur des considérations mystico-bouddhistes complètement étrangères au philosophe du XVIIe siècle ; et Les Métamorphoses de Dieu, un ouvrage convaincant, à la portée de tous, mais tout de même sérieux.

Alors certes, l'auteur repart sur des considérations mystico-bouddhistes new-age - à croire que c'est de cela et surtout de cela qu'il veut parler et étudier dans sa carrière : mais alors fais-toi plaisir mon loulou, fonce ! Juste, ne mêle pas Spinoza à tout ça - mais ici le sujet est propice. Ce que veut en effet montrer l'auteur ici, c'est qu'avec le recul des grandes religions, notamment dans les pays européens, on aurait pu s'attendre à une montée de l'athéisme, ou à un renforcement de la confiance en la science. Or, Lenoir note que c'est autre chose qu'on observe. En réalité, ce n'est pas à un recul de la croyance qu'on assiste : c'est à une modification de l'objet de la croyance. Certes, la foi cadrée, régulée, administrée en Dieu recule, mais des croyances plus informelles, moins assumées, plus ancestrales ressurgissent. Pensons au regain d'intérêt pour la sorcellerie, aux explosions des théories et des tendances new-age auxquelles on assiste partout (Lenoir peut, ici, enfin se lâcher), ou même au nombre impressionnant de gens qui affirment être "croyant mais pas pratiquant".

En ce sens, la thèse de Lenoir, c'est d'abord que l'humain est une espèce qui a besoin de croire en quelque chose, au même titre qu'elle a besoin de dormir. L'être humain est un animal qui a besoin d'enchantement, qui a besoin de considérer que le réel est plus que ce qu'il voit, touche ou en comprend. On peut ainsi dire que l'homme a besoin non pas de Dieu, mais de croire en lui, peu importe la forme qu'il prend - d'où le titre de l'ouvrage.

C'est, à mon sens, une thèse intéressante, ici appuyée par nombre d'études et d'exemples et qui rejoint certaines thèses de Mircea Eliade lorsqu'il évoque son "homo religiosus". C'est pourquoi le livre me paraît très honnête, à la portée de tous et donc réussi.

Steino
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le 14 sept. 2025

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