D'une rencontre nocturne entre une jeune femme; Nastenka, et un homme naît une amitié puis un amour inattendu. L'univers angoissant de la nuit se vêt d'une aura de confidence épisodique dans laquelle se tissent avec véhémence des liens entre les deux personnages.

Le point fort de cette conversation romanesque est de pouvoir se glisser dans les pensées masculines et tâter ses sentiments tout en gardant une certaine distance avec la vie du personnage masculin. Ainsi Les Nuits blanches, dans une sorte de paradoxe, exposent la vie de la jeune fille à travers les confessions intimes qu'elle adresse à son interlocuteur; sans pour autant connaître ses pensées profondes. Les personnages sont tous deux partiellement voilés et peuvent allègrement se compléter: alors que Nastenka use du dialogue pour parler de son passé et de son histoire d'amour qui semble compromise, l'homme se dévoile et exprime ses sentiments de l'instant présent mais à travers le récit. Tout laisse penser et espérer que leur complémentarité puisse aussi se faire sur le plan sentimental, mais il n'en est rien: l'homme qui semble au départ si enclin à s'attacher amoureusement à la jeune femme, finit pourtant par succomber à son charme, laissant la demoiselle s’amouracher pour un homme imparfait.

Tout est question de fusion: à la fois entre les deux personnages principaux, sur le plan de leur conscience et de leur manière de s'exprimer, mais aussi sur leurs sentiments; mais aussi entre les deux personnages masculins qui constituent tour à tour pour la jeune femme des points d'ancrage et d'oscillation.

Les Nuits blanches dressent finalement le portrait allégorique d'une amitié qui commence bien rompue par une histoire d'amour qui finit mal, rappelant avec justesse l’ambiguïté qui rapproche et différencie ces deux états d'âme et sentiments d'affection différents.

De façon presque universelle et autobiographique, elles rappellent la complexité de ces sentiments antinomiques, la difficulté d’être accordés l’un sur l’autre, quand une personne nous est chère et que nous lui confions avec une profonde amitié et admiration certains pans de notre vie et personnalité, et que nous voulons tout sauf la perdre. En si peu de temps, contrairement à Nastenka, on se sent comme une harpie, de ne pas faire vibrer en son cœur – dont on semble parfois même être dépourvu – la même corde que l’autre.
Rosie
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le 25 mars 2014

Modifiée

le 29 mars 2014

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