Ouvrage aussi court que passionnant.
La thèse est radicale : les manifestations de la folie ont une histoire, car elles dépendent des dispositifs idéologiques et matériels dans lesquels les époques ont placé le "fou". Dit autrement et un peu simplement : le folie répond à son environnement.
C'est la raison pour laquelle, par exemple, on n'assiste plus aujourd'hui aux crises hystériques décrites par la psychologie de la fin du XIXè siècle : ces crises étaient une réponse à l'environnement oppressif et culpabilisant de la culture médico-asilaire de l'époque. La disparition de l'environnement a fait disparaître le symptôme.
Si la "maladie mentale" se manifeste par une régression à un stade infantile, ce n'est pas parce qu'il existerait une "maladie", identifiable et toujours identique, comme il en existe pour le corps : l'analogie faite par la psychologie du XIXème, entre maladie du corps et maladie de l'esprit, séparant du même coup les deux dimensions, est assurément boiteuse. S'il y a régression à l'enfance, c'est parce que l'Occident sépare radicalement l'enfance de l'âge adulte, causant par là un conflit psychique.
Il en est de même pour le délire religieux : il est fonction de la laïcisation de la société, qui n'intègre pas les croyances religieuses à l'expérience quotidienne.
Et de même, on dira que la société capitaliste crée les conditions objectives pour la constitution d'une structure schizophrène.
Dès lors, la "psychologie" ne pourra jamais comprendre la "maladie mentale", parce que cette dernière est sa création, qui joue avec elle, qui lui répond - son double obscur, pour elle insaisissable.