Vous souvenez de ces paroles plus que censées prononcées par Ferb?

Un héros est un héros mais tout le monde aime les vrais méchants.

En effet, dans les oeuvres Disney, le public a toujours été plus fasciné par les méchants si fourbes qu'on adore détester que les héros, certes, attachants mais à la personnalité moins aboutie.

Cette popularité a d'ailleurs été exploitée dans de nombreux épisodes/films 'Spécial Halloween', playlists/covers de chansons de méchants iconiques, jeux de société, JDR et même des jeux-vidéos où les joueurs interprétaient les méchants devant vaincre les héros. L'exemple le plus connu de ceci est probablement la série JDR sur table appelée Disney Vilainous.

Mais l'une des premières vraies tentatives de mettre les méchants à l'honneur a été le CD-ROM Disney Interactive Le Retour Des Méchants. Dans ce jeu, suite à un accident, les histoires de Blanche-Neige et les Sept Nains, Peter Pan, Dumbo et Alice au Pays des Merveilles étaient corrompues par les méchants des récits changeant les fins à leurs avantages. Ainsi, les héros sont vaincus et nous voyons les méchants se réjouir de leurs victoires respectives.

Cependant, les méchants restaient à leur place d'antagonistes les véritables protagonistes de l'aventure étant le joueur et son guide, Jiminy Cricket, devant sauver les héros des griffes des méchants.

D'autres tentatives avaient réellement montré les points de vue des méchants mais à des fins comiques où les antagonistes étaient ridiculisés pour faire rire le public.

Ainsi, jusqu'ici, seules les fanfictions permettaient réellement de montrer les histoires célèbres du point de vue d'un méchant. De cette façon, il sortait de son statut habituel d'antagoniste pour devenir un anti-héros et réduisant le gentil protagoniste d'origine à personnage de second plan.

Jusqu'au jour où Serena Valentino, autrice connue, décida d'exploiter ce potentiel à son tour et réécrivant les histoires des méchants Disney en en faisant, également, des anti-héros; mais cette fois de façon sérieuse et, surtout, triste avec une saga de livres entièrement consacrée à nos méchants préférés.

Miroir, miroir est l'un des opus de cette saga fascinante. Si cette mésaventure est le septième tome paru durant l'écriture de la saga (toujours en cours), l'autrice le considère comme le VRAI premier opus de cette dernière.

Si vous avez vu le Grand Classique Blanche-Neige et les Sept Nains ou lu le conte éponyme, vous connaissez l'histoire. Mais Miroir, miroir la raconte d'une toute autre façon.

De quelle façon me demaderez-vous? Et bien voilà, ce n'est pas l'histoire de Blanche-Neige mais bel et bien l'histoire de la Méchante Reine comme nous l'appelons.

Sauf que, entre les mains de Serena Valentino, le manichéisme est aux abonnés absents. La Reine est présentée comme une femme au coeur tendre aimant sincèrement sa belle-fille l'appelant "maman" car la Princesse n'a pas connu sa mère biologique morte prématurément.

Nous voici face à une ironie dramatique cruelle car nous savons que la Reine va basculer du côté obscur à cause d'une suite de malheureux hasards alors qu'elle-même ne le sait pas.

Comme l'a dit l'autrice elle-même

On ne nait pas méchant. On le devient.

Mais la question primordiale est "Comment quelqu'un de gentil peut devenir méchant?". Et bien tout simplement parce que la malchance, la cruauté du monde entourant une personne ou encore une suite de malheurs peut pousser n'importe qui à commettre l'irréparable.

En effet, dans cette histoire, ce qui motive la Reine n'est pas "d'être la plus belle" par pure jalousie narcissique mais de l'être parce que c'est sa seule raison de vivre après avoir subi les pires horreurs durant son existence:

-un horrible traumatisme d'enfance ayant des conséquences dans sa vie adulte/un père abusif

-le fait de ne pas être la "vraie" mère de Blanche-Neige et ne jamais avoir eu d'enfant elle-même

-Perd son mari mort à la guerre même pas un an après son mariage.

Comme l'a si bien dit un célèbre réalisateur

J'aime bien l'idée que celui que vous croyiez être le méchant se révèle être la victime.

En effet, les premiers chapitres nous mettent tellement en empathie avec la Reine que nous oublions qu'elle va devenir la souveraine froide et imposante ainsi que la vieille sorcière terrifiante par son rire malaisant nous ayant tous traumatisés très jeunes

https://www.youtube.com/watch?v=WIwaZJtIclY

Mais au fil des pages, la Reine suit le chemin inévitable de la folie et de la cruauté jusqu'à être menée à son auto-destruction.

https://youtu.be/X63uJcs5DUA?t=79

En dehors de l'histoire tragique de la Méchante Reine, Miroir, miroir est inventif dans sa manière de raconter cette histoire connue d'une autre façon. Le récit nous présente des personnages originaux bien pensés comme le Roi tout d'abord gentil mais devenant aigri et pessimiste car allant sur le champ de bataille trop souvent, Verona, la dame de compagnie au grand coeur de la Reine et, surtout, les trois viles sorcières nommées Lucinda, Ruby et Martha tourmentant la Reine jusqu'à ce qu'elle commette l'irréparable. Personnages rappelant fortement le trio des sorcières de Macbeth incitant ceux qu'elles croisent à n'écouter que leurs démons

Ces trois méchantes devinrent tellement cultes qu'elles eurent droit à leur propre histoire dans la saga de nos méchants préférés.

De plus, à l'exception du Prince qui, malheureusement, reste un love-interest sans intérêt pour l'héroïne originale, les personnages existants dans le film d'animation voient leurs personnalités être approfondies.

Le miroir n'est plus une simple entité mais a un background...

...,Blanche-Neige est montrée durant son enfance jusqu'à son adolescence partageant des moments avec sa belle-mère...

...et, si le Chasseur reste un personnage secondaire, on mentionne qu'il a une famille. Sans compter le fait qu'il meurt tragiquement pour ne pas avoir tué Blanche-Neige.

Par contre, ce n'est pas du tout des Sept Nains. En effet, l'histoire étant racontée du point de vue de la Méchante Reine croisant très brièvement les petits hommes, Prof, Timide, Dormeur, Atchoum, Joyeux, Simplet et Grincheux ne font qu'une brève apparition.

Et ça n'est pas tout. Alors que dans le film original, le Royaume se limitait à des espaces clos et une immense forêt, Miroir, miroir apparaît comme un véritable pays avec des habitants, des célébrations de fêtes ainsi que des foules dans une ville. Ce qui donne à l'univers de Blanche-Neige et les Sept Nains plus d'authenticité que dans le film original.

En dehors de tout ceci, l'histoire est écrite, non pas à la manière d'un classique Disney revisitant les contes en les adoucissant pour ne pas choquer les plus jeunes mais bel et bien à la manière d'un véritable conte du passé avec de la violence morbide, des passages terrifiants et du sadisme malaisant; mais sans pour autant aller dans la violence gratuite vu que l'autrice s'en sert pour mettre en scène en avant la psychologie de la Reine devenant de plus en plus folle au fil de l'histoire.

Mais Miroir, miroir est-il parfait? Malheureusement non.

Bien que l'histoire soit très intéressante et, surtout, divertissante, l'écriture n'est pas toujours à la hauteur du récit.

En effet, il semblerait que la traductrice de la saga, Alice Gallori, ait manqué de temps pour pouvoir finaliser le passage de l'anglais au français puisque le récit contient quelques fautes de français dont il est difficile de faire abstraction. Fautes n'ayant jamais été corrigées par la suite.

Exemple

...sous d'autres ciels.

De plus, bien qu'il y en ait très peu, le récit contient quelques incohérences par rapport au film original.

Et n'oublions pas le fait que les derniers chapitres sont écrits à vitesse grand V laissant une sensation d'inachevé au récit pourtant très agréable à lire. Sans compter un épilogue niais au possible se déroulant après la mort de la Méchante Reine en étant raconté du point de vue de Blanche-Neige. Il existe deux potentielles raisons à ceci: soit Serena Valentino s'est sentie obligée d'inclure un peu d'optimisme dans l'ouvrage celui-ci étant dérivé d'un film familial, soit cet épilogue a été imposé par Disney, connu pour être un monde de rêves enchanteurs et optimistes, ne voulant pas que des oeuvres en rapport avec leurs créations s'achèvent par des fins amères et tragiques.

Néanmoins, ces défauts sont minimes et Miroir, miroir se lit avec beaucoup de plaisir.

Par contre, petit avertissement, bien qu'il soit basé sur un Disney tout public, le livre a été déconseillé aux moins de dix ans à sa sortie (comme les autres livres de la saga des Disney Villains). Pas seulement parce que l'histoire est racontée du point de vue du méchant du récit mais parce que certains passages peuvent effrayer les plus jeunes. De plus, contrairement à nos films Disney préférés, pas d'humour, ni de passages rassurants. Seulement de la tristesse et de la peur au point que la Reine n'est plus une méchante détestable mais un personnage si tragique au point que sa mort rends bien plus que triste.

Au final, nous ne pouvons que nous poser la question suivante: les héros ont-ils raison de juger les méchants et les condamner directement ou indirectement à des sorts funestes sans se demander s'ils le méritent vraiment ou pas?

Expliquer n'est pas excuser car l'ouvrage, bien qu'expliquant que la méchanceté de l'anti-héroïne n'est pas la conséquence d'une pure jalousie narcissique, montre que les actes de la Reine sont inexcusables à travers les personnages victimes de sa folie et sa rage.

Cependant, Miroir, miroir nous prouve que ce qui est terrifiant au sujet des monstres, c'est que ce sont aussi des humains.

BlackBoomerang
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le 2 juin 2023

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