Oubliez donc encore une fois la fantasy épique. Pas de bataille rangées, de duels épiques, d'armure rutilantes ou de sauveur du monde. Justine Niogret nous convie une nouvelle fois dans un récit moyenâgeux dur, âpre et violent, dans lequel l'aspect « fantasy » est très mince.

Chien du Heaume, à la suite des évènements du la fin du premier tome, est prise dans une spirale dépressive. Elle se sent inutile. Elle est devenue incapable, suite à la perte de plusieurs doigts, de faire ce qu'elle faisait de mieux : se battre. Regehyr va donc lui forger une griffe à la place du pouce, et Bréhyr l'emmener avec elle dans une quête de vengeance, pour lui redonner une raison de vivre.

Commence alors une quête initiatique. Elle cherche toujours son nom, et les réponses qu'elle trouvera en chemin seront bien loin de lui offrir la paix intérieure et l'apaisement qu'elle demandait. Le voyage des deux guerrières les amènera à faire la rencontre de deux êtres eux aussi en pleine quête spirituelle. On l'aura compris, à l'instar de son premier roman, Justine Niogret a écrit un roman dans lequel les personnages prennent le pas sur l'intrigue.

Questionnements sur la foi, l'identité, la vengeance, le roman ne manque pas de thèmes de réflexion. On est même dans une très forte introspection, tandis que les personnages attendent leur destinée, ensemble dans le Tor, sort de mini Castel de Broe. L'ambiance est somptueuse, nimbée de mystère, sans doute aidée par le fait qu'il n'y a dans le roman aucun ancrage géographique ou chronologique (hormis la mention d'une Croisade). Le final est absolument superbe, tragique, et illuminé d'une symbolique très forte. Sans doute le meilleur passage du roman.

Donc voilà, que cela soit dit, Justine Niogret fait plus que confirmer les grands espoirs placés en elle avec son premier roman. Elle s'affirme tout simplement comme l'une des plus belles plumes francophones, capable de ciseler des ambiances remarquables, sans oublier de soigner la psychologie de ses personnages de manière très approfondie. Quand on est capable de faire cela tout en faisant passer le « scénario » au second plan, et au final réussir un excellent roman, c'est qu'indéniablement elle fait partie des grands.

Jean Philippe Jaworski ne s'y est pas trompé en faisant des pieds et des mains auprès de l'éditeur pour signer la postface (qui amène un éclairage très intéressant sur le roman). Un gage de grande qualité.
Lorhkan
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 10 sept. 2011

Critique lue 213 fois

1 j'aime

Lorhkan

Écrit par

Critique lue 213 fois

1

D'autres avis sur Mordre le bouclier

Mordre le bouclier
Naimou
4

Un beau gâchis

J'ai adoré "Chien du heaume", que j'avais presque lu d'une traite. Celui ci j'ai mis des semaines à le lire, impossible de rentrer dedans. Oui, Justine Niogret écrit bien, c'est très agréable à lire...

le 1 mai 2013

4 j'aime

1

Mordre le bouclier
Lorhkan
8

L'aventure intérieure

Oubliez donc encore une fois la fantasy épique. Pas de bataille rangées, de duels épiques, d'armure rutilantes ou de sauveur du monde. Justine Niogret nous convie une nouvelle fois dans un récit...

le 10 sept. 2011

1 j'aime

Mordre le bouclier
Elerinna
6

Critique de Mordre le bouclier par Elerinna

J'avais adorée Chien du Heaume, alors dès que j'ai pu je me suis lancé sur Mordre le bouclier. Et ce tome, eh bien, ça a été une déception, mais légère. Encore une fois on a un univers réaliste,...

le 28 janv. 2016

Du même critique

Le Maître du haut château
Lorhkan
5

Critique de Le Maître du haut château par Lorhkan

Ce roman est mon premier de Philipp K. Dick. Et oui, il n'est jamais trop tard. Par contre, d'après ce que j'ai pu lire à droite à gauche, ce n'est pas franchement le plus simple à appréhender quand...

le 28 déc. 2010

44 j'aime

10

Le Déchronologue
Lorhkan
9

Coup de coeur (de pirate, hum...) !

Oui, bon ok, passons sur le jeu de mot foireux du titre de cette critique pour se pencher un peu sur l'œuvre en elle même. "Le Déchronologue" est un livre de SF, mais l'aspect science-fiction ne...

le 25 mars 2011

31 j'aime

Janua Vera
Lorhkan
9

De la bonne fantasy française !

Je suis conquis par ce recueil de nouvelles ! J'ai été subjugué par "Mauvaise Donne" (j'ai hâte de retrouver Benvenuto dans "Gagner la Guerre", il me rappelle un peu bien sûr Locke Lamora, avec moins...

le 14 nov. 2010

23 j'aime

8