Non, Jem, moi je pense qu'il y a qu'une sorte de gens, les gens.

Quel dommage..., je me suis dit en finissant ce livre plein de bonne volonté mais franchement bancal. Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur manque malheureusement le coche du bon roman humaniste à cause de tout un tas de petites choses.


J'y ai d'abord trouvé un énorme problème de rythme. Le livre est divisé en deux grandes parties, et il faut bien avouer que la deuxième constitue le cœur du livre, tandis que la première ne fait que vaguement donner du contexte et prendre contact avec les personnages. Et du coup, je me suis profondément ennuyé pendant les 200 premières pages, car "l'élément perturbateur" (le procès du jeune noir) n'arrive qu'à la moitié du bouquin ! J'ai l'impression de m'être fait avoir par la 4ème de couverture qui nous laisse entendre que la majorité de l'histoire tourne autour de ce procès alors qu'il ne dure finalement qu'une toute petite partie du roman dans sa deuxième moitié. Au lieu de ça, les 200 premières pages s'attardent donc sur les trois jeunes protagonistes qui s'amusent à tourmenter leur voisin par curiosité pour son enfermement inexplicable. Et du coup, j'ai été désagréablement surpris (attention spoiler) de voir ce fameux voisin arriver en sauveur providentiel à la fin du livre, me donnant la forte impression que l'auteur voulait boucler la boucle assez maladroitement, pour justifier sa première partie.


Je n'ai également pas vraiment cru au personnage de Scout. Pendant tout le livre, je me suis dit que cette gamine avait un vocabulaire beaucoup trop élaboré, et des réflexions beaucoup trop profondes pour son âge, jusqu'à ce que la postface du bouquin vienne me rappeler que c'était bien Scout plusieurs années après qui racontait l'histoire. Je crois pourtant que le bouquin fait de très légers rappels sur cette situation (quand elle parle de l'évolution de sa relation avec Jem plusieurs années après par exemple), mais je suis passé complètement à côté, gardant cette petite frustration tout au long du livre. Et quand on ne croit pas à un personnage, on ne s'y attache pas, et on ne ressent malheureusement rien pour lui.


J'ai également été très déçu que le roman s'attarde sur des personnages inintéressants et très "monolithiques". Je pense en premier lieu au "méchant" du roman, Bill Ewell, qui n'a absolument aucune nuance et qui n'est ni plus ni moins que le mal incarné. On a d'ailleurs un peu de mal à comprendre ses motivations à faire autant de mal, vu qu'il ne lui arrive absolument rien au procès finalement. Justifier le fait qu'il ai envie de tuer des gamins, juste parce que Atticus Finch le père, l'ai ridiculisé, me paraît un peu fort de café. On s'attarde également pas mal sur les voisins pas franchement intéressants (la commère, la vieille dame malade insultante...) sans vraiment trop les développer, et on passe même à côté de personnages qui avaient l'air bien plus passionnants (Calpurnia, la cuisinière noire de la maison en premier lieu), et qu'on aurait aimé franchement voir un peu approfondis.


Et c'est vraiment dommage car le roman réussit d'autres choses. Il réussit à être relativement fataliste et juste sur l'époque, en évitant certaines situations convenues : le fait que par exemple, le jeune accusé noir ne s'en sorte finalement pas aussi victime des préjugés que de la peur d'être noir dans un monde de blancs. Il arrive également à proposer quelques personnages tout de même réussis entre le père symbole de justice, la tante désagréable au bon fond pétrie de valeurs familiales, Jem qui quitte l'enfance pour l'adolescence... Le livre place également plutôt bien son histoire dans son époque, en faisant écho à la grande dépression, à la montée d'Hitler au pouvoir, sans jamais trop insister ou immiscer ces situations dans le récit.


Et finalement, par la voix de ses enfants héros et de leur père droit dans ses bottes, le livre constitue un véritable plaidoyer humaniste, bourré de défauts certes, mais ne cessant de rappeler l'absurdité du racisme et des préjugés en général, et pour ça je ne pourrai jamais le juger trop sévèrement.

Hunkydorus
5
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Chronologie de mes romans lus

Créée

le 20 nov. 2020

Critique lue 389 fois

1 j'aime

Hunkydorus

Écrit par

Critique lue 389 fois

1

D'autres avis sur Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur

Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur
Queenie
10

Critique de Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur par Queenie

Ce livre est vraiment magnifique, je l'ai dévoré. Tout est Parfait. Cette famille (père, deux enfants : un garçon et une fille) avec ce père génial, doux, compréhensif, seul, qui ressemble à un sage...

le 17 août 2011

44 j'aime

6

Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur
Gand-Alf
9

Cet instant fugace que l'on nomme l'enfance.

Se motiver enfin à lire un classique de la littérature américaine alors que l'on a déjà vu l'adaptation cinématographique il y a des années de cela, sans en garder le moindre souvenir. Se sentir...

le 17 juin 2016

39 j'aime

3

Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur
jaklin
8

La justesse de ton

Il y a des livres comme cela qui nous échappent. Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur en fait partie et ma fréquentation de Sens Critique m’a fait franchir le pas. Présenté comme un ovni (c’est le seul...

le 1 août 2018

27 j'aime

24

Du même critique

Grim Fandango Remastered
Hunkydorus
4

Crime Fandango et le clivage générationnel

Je n'ai pas aimé Grim Fandango. Et pourtant ça faisait des mois que la hype montait. Je n'avais jamais entendu parler de ce jeu avant il y a quelques mois, étant trop jeune à sa première sortie. En...

le 3 févr. 2015

16 j'aime

6

Le Monde de Charlie
Hunkydorus
7

Le Monde de "Insérez votre nom ici"

Difficile de faire un "teen movie" original aujourd'hui tellement le genre a été saigné par les High School Musical et autres American Pie dans les années 2000. Stephen Chbobsky, relève cependant le...

le 11 juin 2013

11 j'aime

The Legend of Zelda: Majora's Mask 3D
Hunkydorus
9

Voltaire Majora's Mask

Quelques jours avant la sortie de Majora sur 3ds, je discute au bar avec des amis. Avec mon pote Arnaud, on fait part aux autres de notre excitation et notre plan de faire le tour des magasins de JV...

le 25 févr. 2015

10 j'aime