Incontournable Roman Juin 2025



Wilhelmina Picpus est la fille d'un couple de bourgeois très nantis, mais qui de façon surprenante, se plaisent à travailler. Disons que leur jeune fille, qui aime repousser les limites du possible à chaque journée, les a convaincus de la pertinence de placer leur seul enfant dans un pensionnat pour jeunes filles. À l'académie Wilford, la jeune rouquine partagera donc son quotidien avec d'autres filles de son âge, mais en un temps record, découvre qu'il y a eu une disparition d'élève à déplorer. Non sans tester un peu les limites du règlement, Wilhelmina se donne donc comme mission de découvrir ce qui est arrivé à cette élève.



Les enquêtes de cette rouquine envoyée en pensionnat est un roman policier qui s’inscrit dans le sous-genre "policier/mystère tranquille", qui sont assez populaires en littérature adulte ces derniers temps, notamment avec les séries "Agatha Raisin" ou encore "Rendez-vous avec le crime". Ces enquêtes sont généralement à saveur humoristique, dans un cadre bucolique comme la campagne, dans une atmosphère joviale et propose des énigmes relativement simples résolues par des personnages sympathiques, mais amateurs. Je dirais que le genre vient aussi souvent avec un côté rocambolesque qui frôle parfois le ridicule, dénotant un humour très typiquement britannique. Le sous-genre Policier tranquille ("cosy mystery" en anglais) est d'ailleurs originaire du Royaume-Uni. Par ailleurs, la couverture est vraiment dans le registre de cette variation du genre policier, avec des objets comme indices de ce qui va venir dans le récit, un papier peint pour donner le côté "salon de thé", des couleurs pimpantes et même la phrase d'accroche "Méfiez-vous des bonnes manières" qui sert de sous-sous-titre. On dirait vraiment une variation jeunesse d'Agatha Raisin ou "Les enquêtes d'Hannah Swensen".



Je partais avec quelques agacements dans cette lecture. Dans les premiers chapitres, rien ne semble particulièrement novateur. Une jeune fille encore une fois rousse ( allez savoir les personnage féminins espiègles sont presque toujours rousse!) qui défie les règles, envoyée dans un pensionnat stricte pour jeunes nanties, avec une directrice tout aussi austère et stricte, par des parents indolent, ça ne semblait augurer rien de rafraichissant. Puis, certains éléments se sont mit en place. Déjà, il y avait cette tablée au déjeuner bourrée de bonne nourriture, alors que d’ordinaire, quand il s'agit de pensionnats féminin, il y souvent cette idée de garder les filles minces, quitte à les sous-nourrir ou leur servir des plats peu savoureux. Ensuite, il y a Mélopée, la tarentule domestique, une rareté dans les compagnons de vie, qui n'est pas qu'un ajout mineur. Il y a ce couple dépareillé entre une cuisinière bâtie comme une bucheronne et son copain au visage de chérubin, qui vivent leur amour en secret. Et peu à peu, on découvre que chaque professeur où presque ne correspond pas tout-à-fait à son archétype. J'ai particulièrement aimé les profs justement, originaux, intéressants et pleins de bonnes idées pour leurs cours. Seule la prof de "bonnes manières" incarne la désuétude la plus absolue, autant dans sa façon d'enseigner, qui est soporifique et mécanique, que dans son sujet, destiné à former des midinettes dignes des attentes du patriarcat, c'est-à-dire, devenir de jolis bibelots. Le fait d'apprendre qu'elle et la directrice sévère, madame Anderson, sont membres d'une variation des AA, soit les "Détestateurs d'enfants anonymes, m'a arraché un sourire. Au moins, elles reconnaissent leur problème, contrairement à ces dizaines de directrices malcommodes et tyranniques que j'ai croisées dans les romans jeunesse.


Le cas de Sylvane était quand à lui écrit dans le ciel. Je veux dire, pour quelle autre raison une personne porterait une perruque par dessus ses cheveux? Quand à la réelle personne responsable des enlèvements, on est dans un cas de "les personnages les moins louches sont les vrais coupables", comme dans le film Zootopia. Par contre, je n'ai pas pu m'empêcher de trouver l'explication tirée par les cheveux: Utiliser les élèves pour extraire des pierres précieuses dans le sous-sol terrestre de l'Académie, sérieusement? Et une mine inscrite comme "gisement de pierres précieuses laissé à l'abandon" dans une pile de dossiers de l'Académie? Ben voyons donc, et personne le l'aurait exploitée depuis? Ce sont des pierres PRÉCIEUSES, personne n'aurait abandonné pareille mine. Et personne n'a réclamer d'enquête pour ces jeunes orphelines? Pas même leurs tuteurs légaux? J'ai du mal à l'imaginer, surtout que des orphelines, ça ne signifie pas qu'elles n'ont pas de famille élargies. C'est à ce genre d'élément que je pensais quand je disais que le sous-genre Policier Tranquille faisait dans le rocambolesque quasi-absurde. Ça et au fait que Wilhelmina n'a pas dormi durant quatre jours, mais qu'elle enquête sans le moindre symptôme de fatigue chronique. Ça fait beaucoup de dodos en retard, ça.



Wilhelmina se dit "imperméable aux règles", mais honnêtement, c'est un peu exagéré. Plus souvent qu'autrement, elle se pli aux consignes, soit parce qu'elle veut mener son enquête, soit parce qu'elle ne veut pas causer de torts à sa nouvelle amie. Elle se permet de fouiner et fureter durant la nuit, mais ça c'est un trait incontournables aux personnages détectives que celui d'être incurablement curieux. Donc, "héroïne rebelle", pas tant que ça. En revanche, elle a une façon sympathique de traiter son univers, avec de fréquents commentaires sur le fait que cette école lui sert bien des péripéties. Au fond, Wilhelmina est une enfant qui s'ennuie plus qu'une enfant qui aime s'opposer. Elle a cependant une narration très divertissante et son humour teinté de la suffisance des gens qui s'assume très bien lui sert comme personnage.


Quand à l'enquête, on est dans quelque chose de très basique. Nous avons une narratrice qui se contente de suivre ses différents suspects, un à la suite de l'autre. Il n'y a pas spécialement de méthode, d'analyse ou de chasse aux indices, mais pour avoir lu des policiers tranquilles adultes, ça va avec le genre. On est loin des vrais enquêtes et des plans élaborés. Et puis, en littérature jeunesse, les disparitions d'objets, d'animal ou d'enfant composent un très grand nombre des investigations des personnages enfants.



Généralement, les romans de ce style sont conçu pour la détente et à cet égard, le roman présent fait bien son travail. Il a le mérite de faire une personnage colorée et sympathique, qui a quelques lignes d'humour notables et qui, gros bonus, ne tombe amoureuse de personne ( comme un nombre astronomiquement élevé de personnage féminins, c'est très agaçant). Un roman à déguster comme un petit cupcake aux fraises, idéal pour les vacances.



Pour un lectorat intermédiaire à partir du 2e cycle primaire, 8-9 ans+

Shaynning

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