Après le feu de la Révélation christique, Paul doit entretenir l'orthodoxie avec patience, voire routine, dans les cercles chrétiens toujours menacés de déviation par l'introduction de problématiques philosophiques. Paul en est réduit à répéter des listes de prescriptions morales et comportementales.
Psychologiquement, le rappel de la conversion de Paul lui-même a certes valeur pédagogique sur les disciples, mais, en retour, la conversion des disciples a tendance à confirmer et à valoriser la conversion de Paul.
Le recours fréquent à la prière est rappelé, et, est-il précisé ici, elle se pratique « en levant les mains ». Cela n'a pas manqué d'apporter un certain trouble au XXe siècle lorsque, après des siècles de prières les mains jointes (ou les bras croisés), l'Eglise catholique, sentant le besoin de se réformer, est revenue à cette prescription. La théâtralité de ce geste (ouverture du corps, élargissement de l'espace corporel en lieu et place de la modestie du repli sur soi qu'impliquait la prière mains jointes).n'a pas été aisément acceptée par certains fidèles.
Les femmes sont indiscutablement mises en position subordonnée : non seulement les parures leur sont déconseillées, mais elles doivent garder le silence. A ce train-là, bien sûr, le Paradis ne doit pas contenir une seule femme à l'heure actuelle... C'est de leur faute, d'ailleurs, enfin, c'est la faute d'Eve, qui n'avait pas à se laisser séduire par Satan, et dont le péché retombe sur toutes les femmes qui ont suivi.
Sur ce chapitre, le côté primitif de l'injonction est éclatant : la survalorisation du lien par la filiation (toutes les femmes sont filles d'Eve) est caractéristique d'un vécu tribal et clanique, et évidemment absurde, hérité de l'Ancien Testament. Ce qui n'empêche pas les sectes chrétiennes actuelles de persister à dévaloriser la femme, ni l'Islam (héritier de l'Ancien Testament) de nous balancer au visage ses histoires de mère par laquelle on jure de manière ... injurieuse assez souvent. D'autre part, cette position est difficile à concilier avec la pureté de cœur que Paul ne cesse de prêcher : que doit-on faire d'une femme « pure de cœur », à la conduite irréprochable ? Porte-t-elle toujours le péché d'Eve, ou bien en est-elle lavée ? Cette curieuse soupe qui mélange responsabilité individuelle et péché originel métaphysique n'est pas commode à débrouiller.
La monogamie est conseillée, ainsi que le mariage, aux responsables des églises locales. Plus question ici des réticences au mariage fondées sur le souci de ne se consacrer qu'à Dieu. Détail intéressant : si les « surveillants » (évêques) sont incités à la monogamie (III, 2), cela veut dire au minimum qu'ils peuvent se marier. Alors, pourquoi pas les prêtres ? Paul n'est pas très cohérent. Mais cette incohérence a conduit à des siècles d'abus sexuels et de cochonneries pédophiliques.
Paul met à nouveau en garde contre les prophètes de la fin des temps qui dénoncent le mariage, et qui édictent des normes diététiques arbitraires. Encore une fois, la Loi traditionnelle est repoussée.
Enfin, le leitmotiv de la pauvreté et de la charité est redit : la convoitise est la mère de tous les maux. Ce n'est pas notre époque qui le démentira. Mais ce principe a nourri la morale des siècles qui ont suivi, pour culminer au Moyen Âge Occidental.
