Je sens que ce livre va être la perle de cette rentrée littéraire ! Côté français, il fait déjà partie de mes chouchous en tout cas. Si on ajoute les romans étrangers évidemment, il est hautement surpassé par Brutes de Breznican, mais ce dernier m'a tellement éblouie que c'en est indécent, donc bon.


Quand le diable sortit de la salle de bain, c'est d'abord l'histoire d'une femme, Sophie, qu'on pourrait croire étudiante, puisqu'elle vit dans un studio et galère niveau fric, pour faire ses courses, pour tout. Mais non, elle est "seulement" chômeuse. Et ça commence à faire un bout de temps. Elle est quasiment passée pro dans le domaine. Le sujet n'est pas super rigolo à première vue, mais il est d'actualité. Bon.
Et c'est là que ça commence à partir en délire complet. Parce que Sophie, pour survivre, est prête à faire un peu n'importe quoi, car la faim justifie les moyens. On est coincé avec elle dans ce studio étouffant où elle essaie de penser à autre chose qu'à son ventre qui gargouille - en vain évidemment. On la suit dans ses pérégrinations familiales, où elle va tenter de se faire plaindre par ses proches qui sont peu à peu devenus des étrangers, chacun coincé dans sa propre existence - en vain là aussi donc. On va aller avec elle quémander chez une petite vieille trop généreuse avec les plus démunis, et se battre contre un gosse infernal pour la dernière cuisse de poulet - avec succès cette fois. J'avoue, ça aurait pu être nul, mais c'est drôle. C'est bien écrit, et on se marre, c'est tout. On se dit que l'héroïne est un peu cinglée, mais diablement (c'est de circonstance) divertissante.
Et c'était sans compter sur ses deux plus fidèles acolytes : Hector, son meilleur ami lubrique (Cinquante nuances, à côté, c'est du pipi de chat) qui impose des passages orgiaques à la narratrice en échange d'un menu service, et Lorchus, le démon personnel de la jeune femme, fameux diable qui sort de la salle de bain, qui n'est pas en reste côté luxure, et qui a le verbe aussi haut que la température !


Mais si ce roman se détache de ses petits camarades en cette rentrée littéraire foisonnante, c'est surtout par sa forme. Il y a des passages entiers qui sont complètement absurdes, voire illisibles. Vous verrez courir sur plusieurs pages une accumulation de noms et d'adjectifs, des listes sans queue ni tête. Alors oui, c'est long et pénible, mais accrochez-vous rien que pour le bonheur suprême de dénicher, comme par surprise, des occurrences de la narratrice qui vous dit, en gros, non mais si t'en as marre tu peux sauter des lignes hein, ou bien, tiens t'es encore là ?!
Et il y a le dessin. Quand ma patronne m'a demandé si j'avais vu le dessin, je lui ai dit "quel dessin ?", et elle m'a répondu, "si tu l'avais vu, tu ne poserais pas la question". En fait, à ce moment là, j'étais seulement à quelques pages dudit dessin. Je ne vous spoile pas, mais quand vous le verrez, vous saurez vous aussi. Un dessin, une sorte de calligramme, qui ferait rougir même Apollinaire.
Pour ceux qui aiment rire de tout avec n'importe qui.

marquise
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le 20 août 2015

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marquise

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