Ravel
7.4
Ravel

livre de Jean Echenoz (2006)

On adore Jean Échenoz.
On a adoré les dernières “bios” d’Échenoz : la folle course de Zatopek et les aventures électriques de Tesla.
Mais là franchement, heu, Ravel, c’est quand même pas le cd qui trône en haut de la pile à côté de la chaîne hifi …
Oui d’accord c’est Échenoz, mais Ravel quand même, ben non …
Finalement, il aura fallu que le texte soit adapté au théâtre pour qu’on se dise, ah zut, si on avait su on l’aurait lu …
Alors finalement c’est parti.
Et bien sûr sans regrets : c’est du Échenoz et comme d’habitude, c’est magistral.
Derrière l’auteur du boléro dont on nous a si souvent rebattu les oreilles, on découvre un drôle de personnage, un dandy artiste, plein de mystères (pas d’amour connu, ni homme, ni femme !), à la santé fragile, au génie musical brillant, …

[…] La canne est à la main ce que le sourire est aux lèvres.

On assiste même (et oui faut bien) à la naissance du fameux boléro : mais tout en finesse et second degré, c’est savoureux et ça nous donnerait presque envie (j’ai dit presque) de ré-entendre cette œuvre que Ravel considérait comme mineure ! Si, si.

[…] Voilà au moins, dit-il, un morceau que les orchestres du dimanche n’auront pas le front d’inscrire à leur programme.

N’hésitez pas à prendre votre billet transatlantique avec Ravel (le bouquin commence avec une traversée sur Le France), l’humour savant d’Échenoz fera le reste.
Ravel est au sommet de sa gloire, Échenoz à celui de son art et on y croisera quelques figures du siècle comme celle de Conrad :

[...] Leur conversation s’était déroulée non sans aridité, malgré quelques oasis où l’un disait avec retenue son goût de la littérature de l’autre, l’autre essayant de masquer avec tact son ignorance de la musique de l’un.

Au fil de la lecture toujours aussi savante et savoureuse d’Échenoz, on finit par s’éprendre bizarrement de ce drôle de bonhomme et la triste fin qui fut la sienne en devient poignante (le génial musicien finira malade, le cerveau littéralement ramolli) : c’est finalement plein d’émotion que l’on referme ce petit bouquin, enchanté d’avoir fait la connaissance d’un artiste dandy, d’un génie du siècle, que l’on n’avait aucune chance de croiser ailleurs et certainement pas au rayon cd.
Nous aurions été bien sots de camper plus longtemps sur nos préjugés musicaux et de passer à côté de cet encore très subtil petit bouquin échenozien.
BMR
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 18 mars 2014

Critique lue 668 fois

5 j'aime

BMR

Écrit par

Critique lue 668 fois

5

D'autres avis sur Ravel

Ravel
BMR
9

La bio du boléro

On adore Jean Échenoz. On a adoré les dernières “bios” d’Échenoz : la folle course de Zatopek et les aventures électriques de Tesla. Mais là franchement, heu, Ravel, c’est quand même pas le cd qui...

Par

le 18 mars 2014

5 j'aime

Ravel
rhumbs
7

Critique de Ravel par rhumbs

Un portrait enlevé de Ravel. Le roman débute une dizaine d'année avant sa mort par la traversée de l'atlantique pendant laquelle Echenoz dessine la personnalité du compositeur, ses manies...

le 26 nov. 2011

3 j'aime

Ravel
AglMnt
6

Microcritique

Après le ballet, la pièce et le suite symphonique, ça confine à la "monot"manie.

le 29 oct. 2014

1 j'aime

Du même critique

A War
BMR
8

Quelque chose de pourri dans notre royaume du Danemark.

Encore un film de guerre en Afghanistan ? Bof ... Oui, mais c'est un film danois. Ah ? Oui, un film de Tobias Lindholm. Attends, ça me dit quelque chose ... Ah purée, c'est celui de Hijacking ...

Par

le 5 juin 2016

10 j'aime

2

The Two Faces of January
BMR
4

La femme ou la valise ?

Premier film de Hossein Amini, le scénariste de Drive, The two faces of January, est un polar un peu mollasson qui veut reproduire le charme, le ton, les ambiances, les couleurs, des films noirs...

Par

le 23 juin 2014

10 j'aime

Les bottes suédoises
BMR
6

[...] Je ne suis pas hypocondriaque, mais je préfère être tranquille.

C'est évidemment avec un petit pincement au cœur que l'on ouvre le paquet contenant Les bottes suédoises, dernier roman du regretté Henning Mankell disparu fin 2015. C'est par fidélité au suédois et...

Par

le 10 oct. 2016

9 j'aime

1