Ce livre composé d'entretiens sur plus d'une année n'est pas une biographie à proprement parler. Même si JJ parle au début de son enfance et de son adolescence, c'est surtout l'histoire du groupe des Stranglers - de 1974 à nos jours - qui est racontée. Ce qui l'éloigne de la biographie classique, c'est aussi son chapitrage thématique et non chronologique. Au fil des entretiens, JJ raconte le punk, le rock, l'Angleterre des années 70-80, la drogue, les concerts, mais en même temps, il se raconte lui-même, ses origines françaises, sa culture franco-britannique (ou inversement), le racisme anti-français dont il a été victime enfant (qui explique en partie son tempérament hargneux), sa place au sein du groupe, la place du groupe sur la scène punk et rock, la spécificité des Stranglers (expérimentation et éclectisme permanents).
À 69 ans au moment des entretiens, JJ Burnel a évidemment beaucoup d'anecdotes à raconter. Celles qui concernent les débuts du groupe et la période punk sont particulièrement pittoresques. JJ Burnel est célèbre comme bassiste novateur (petites piques aux bassistes illustres - coucou Simon Gallup ! - qui n'ont pas reconnu son évidente influence), mais aussi comme Strangler intrépide et coriace qui n'hésitait pas à plonger dans le public pour se coltiner des malappris qui l'insultaient ou lui lançaient de la bière. L'humour et l'autodérision de Burnel font merveille.
Mais Jean-Jacques n'est pas qu'un bass hero sexy et charismatique portant un prénom pas très sexy pour un bass hero. En plus des chapitres obligatoires sur la musique et le milieu du rock, des chapitres entiers sont consacrés aux arts martiaux (JJ est un expert en karaté et l'enseigne), à la moto (l'autre grande passion de JJ) et aux M.I.B. (le groupe croit aux ovnis). Je pensais que ça allait me passionner moyen, mais à ma grande surprise, j'ai trouvé ça super intéressant. Je pense que la forme y est pour beaucoup. Les sujets sont abordés sous forme de questions-réponses, ce qui rend la lecture très agréable et vivante.
Seul rescapé du groupe original, il termine en évoquant avec tendresse (Dave Greenfield le claviériste décédé peu de temps avant les interviews et Jet Black le batteur à la retraite, mort depuis) ou acidité (Hugh Cornwell le chanteur initial parti en 1990) les trois autres membres historiques.
En résulte un livre passionnant, vivant, chaleureux, mordant, drôle et débordant de charme, à l'image de l'interviewé. Fans des Men In Black, de rock, de punk, je ne saurais trop vous conseiller cette rencontre rafraîchissante avec le plus grand bassiste du monde et un être humain attachant que vous aurez sûrement, comme moi, follement envie de rencontrer.