Ils sont beaucoup ceux qui affirment que le fils du commerçant de Stradford n’est pas l’auteur de l’oeuvre de William Shakespeare (j’en ai parlé ailleurs - la conscience d’appartenir – par la naissance ou par les gentillesses de la vie - à un certain milieu socio-culturel, donnant seul accès à une proximité avec un génie qui ne peut donc que sortir du même creuset...)
Tout bien réfléchi, je leur donne raison...
Mais uniquement en ce qui concerne deux, voire trois pièces.
Titus Andronicus en est une.
William avait trente ans lors des premières représentations connues de la pièce en Janvier 1594. Auparavant avaient été présentées Les deux gentilhommes de Vérone , les trois parties de Henry VI et The Taming of the Shrew.
On peut imaginer Mr Shakespeare, sachant qu’on lui attribue la paternité de cette pièce, disant:
“But must my name be slaughtred in the theaters?”
en reprenant les mots de Tamora (acte 1, scène 2)
“But must my Sonnes be slaughtred in the streetes?”
Pièce ridicule, dans laquelle, non content de voir vingt-et-un de ses fils mourir sur le champ de bataille, Titus en poignarde lui-même un vingt_deuxième en arrivant à Rome...
Et que je tue, et tue encore, et que je coupe des mains, et que je coupe des langues et que je viole, et que je trahisse, tout cela sans la moindre trame compréhensible, dans ce monde peuplé uniquement de sadiques crétins.
Tout cela finit en un festin Atride que Titus offre à Tamora
copie conforme de celui qu’Atrée offrit à Thyeste,
un ragoût de fils...
“And when that they are dead,
Let me go grind their bones to powder small,
And with this hateful liquor temper it,
And in that paste let their vile heads be baked.
Come, come, be everyone officious
To make this banquet, which I wish may prove
More stern and bloody than the Centaurs’ feast.
So. Now bring them in, for I’ll play the cook
And see them ready against their mother comes.“
Rien ne fonctionne,
cette pièce va sans cesse du grotesque au grandguignol dans l’absence de cette débauche de mots qui fait notre plaisir, notre stupéfaction et notre admiration chez Shakespeare.
Le titre de la pièce annonce ce qui attend le spectateur: The Most Lamentable Romaine Tragedy of Titus Andronicus.