J'ai lu Trop Semblable à l'éclair à travers la traduction de Michelle Charrier.


J'ai lu quelques critiques avant de rédiger la mienne et force est de constater que j'ai échappé à la médiatisation de cet ouvrage. Je me suis contenté de rentrer chez un libraire, demander un ouvrage de science fiction un peu politique et l'on me l'a mis entre les mains.


C'est donc avec esprit que je qualifierai de vierge que j'ai abordé cet ouvrage, et ce fut une excellente surprise.


Le scénario de l'ouvrage est double. Certes, il y a une histoire d'enquête autour d'un journal volé, mais il y a aussi un autre enjeu : ce fameux enfant aux pouvoirs surnaturels dont parle le synopsis. Ces deux branches scénaristique évoluent indépendamment l'une de l'autre avant de se rejoindre petit à petit, mais il faut admettre que cela progresse très lentement.
En soi je ne vois pas le problème, car tout se passe sur un laps de temps très court, et l'enquête n'est pas primordiale. Mais le défaut est qu'on perd facilement le fil de ces enjeux politiques, d'autant que le lecteur est plongé sans ressources dans un monde où il est absolument dépaysé. C'est le reproche que je ferai.
Reste à voir comment cela se poursuivra dans les autres tomes.


Les personnages quant à eux sont très intéressants, et j'ai grand hâte de voir se lever le voile masquant le passé de plusieurs d'entre eux. Au centre, Mycroft Canner, que l'on découvre petit à petit et qui sert de valet à toutes les puissances mondiales. Comment en est-il arrivé là, malgré l'horreur qu'il suscite ? L'auteur vous le fait découvrir petit à petit.
Les autres personnages sont très bien construits, vraiment riches et cohérents. L'analyse de la société, de l'univers établit, est en outre très intéressante, plus subtile même que celle que l'on retrouve dans Fondations d'Asimov, mais c'est un avis purement subjectif.


La langue enfin est excellente. Chapeau bas à l'auteur et au traducteur qui ont su donner à l’œuvre cette patine dix-huitièmiste, dans un univers futuriste.
Il faut un certaine culture de ce siècle pour apprécier pleinement l’œuvre. Si les références sont parfois explicites, celles littéraires ne le sont pas nécessairement, et il y a un réel plaisir intellectuel à trouver à quel auteur fait référence le style de ce passage. Je pense que ce plaisir est nécessaire pour apprécier pleinement l’œuvre, et s'il nous échappe, nous passons à côté de ce qui fait une grande partie de son originalité.
Je pondèrerai cependant mes propos d'un bémol, trouvant que certaines apostrophes au lecteur deviennent parfois surfaites, alourdissant un peu le style.


Mais ce qui fait, à mes yeux, l’originalité de cet ouvrage consiste dans sa remise en question sulfureuse de la société. Non pas la société d'avant mai 68, où l'on se gargarise d'être subversif en ayant caché un penis dans un dessin, en remettant en question une religion en laquelle plus guère de lecteurs ne croient, mais subversif contre notre société d'aujourd'hui.
Nous sommes dans un monde écologiquement stable, où le féminisme a gagné : la mode ne doit plus distinguer les hommes et les femmes, l'on use de pronom neutre pour désigner une personne, la famille est remplacée par le bash, les frontières sont inexistantes, l'athéisme règne en maître etc. Nous avons donc atteint l'utopie du monde post-modernes, et Ada Palmer nous en montre la face cachée, noire. Ce sont les armes du XVIIIe retournées contre l'utopie réalisée de notre temps.


Malgré tout le bien que je pense de cet ouvrage, je ne peux le conseiller qu'à des gens qui aiment les ouvrages contemplatifs, ou qui ont une certaine culture du XVIIIe.

BaronSamedi-SDCE
9

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le 13 juin 2020

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