Bonjour.
l'Iliade ET l'Odyssée, on nous assène ce binôme antique dès le plus jeune âge de raison. Pour quoi faire ? Pour quelle présentation des dieux déchus et des anciens qu'il ne faudrait pas oublier ? Pour quel avertissement exemplaire de ce que c'est, en fait, que cette démocratie dont on a plein la bouche et la tête, quotidiennement au pays de Danton ?
Pour LA culture, dont personne n'est capable de donner une définition cohérente ?
C'est là qu'intervient Tesson, pourfendeur de la bienpensance un tantinet ramollie d'un certain classicisme bourgeois de gauche, d'où nous sont nés pas mal de bobos.
L'Odyssée en compagnie de Sylvain Tesson, c'est revenir au parcours solide et à la nature des hommes et des dieux, et de leurs rapports pas obscurs du tout. Nettement plus dynamique et rafraîchissant.
On ne va pas ici se mettre en abyme du héros antique d'Homère, à Tesson et jusqu'à soi-même, face au soi-disant destin des hommes et d'une supposée volonté divine, quelle qu'elle soit.
Juste une suggestion : au milieu d'un vaste océan naît un être, qu'on appelle humain, bien faible nourrisson face au grand vide de sa conscience de soi et du monde. Il nage tout de même un peu et patauge pas mal, effrayé à la fois de tant de conscience et de si peu de cohérence. Incohérence, donc ? L'absurde est sans doute le plus difficile à supporter pour un esprit qui se veut rationnel contre la terreur de se voir fou.
Alors, parmi les hommes, naissent dieux et déesses. À eux la tâche et la responsabilité, très bien partagée, d'endosser toute chose et plus particulièrement les évènements naturels et humains, et leurs rapports.
Les hommes étant des êtres d'amour et de guerre, alors, dans l'ennui de leur éternité, les dieux se joueraient des hommes comme les hommes jouent aux dés.
C'est la plus ancienne et la plus adroite façon que l'humanité ait inventée pour se désennuyer (les dés) et pour se dédouaner du "sort", de sa nature et de ses responsabilités : "Les dieux l'on voulu !", "Si Dieu le veut !"' "Amen", "Karma"... Vieux complexe du "c'est pas Moi c'est l'Autre".
Revenons au gamin né tout nu au milieu de l'abîme. Il n'y a là aucun dieu vers qui se tourner, que vers soi-même et, faisant usage de toute sa peur, nager comme un perdu vers l'horizon de son choix. Non, il n'a pas d'autre choix, mais c'est le choix universel. Le seul.
Simplifier à outrance permet de voir plus clair : le nouveau né, c'est chacun d'entre nous face à la diversité des points cardinaux de l'existence et donc, de nager de prérequis (forme humaine) en devenirs à choisir à travers le ciel étoilé d'autant de déterminismes à endosser...ou non.
Il ne peut dans un tel environnement exister plus de liberté ni de libre choix, ce qu'on appelle, je pense, le libre arbitre. Lequel s'arrête aux limites de nos horizons. C'est à lui, notre nouveau-né, de choisir derrière quel horizon chercher son aventure. Sans plus de data que ceux qu'il saura cumuler à chaque brassée d'eau et de vent cumulée par sa propre vie. C'est sans doute fait pour ça, la vie humaine, comme celles du petit et du gros poisson, quels qu'ils soient. Pas de mode d'emploi, ni Guide Michelin ni de chemin de Compostelle ou du Baroudeur, que soi-même, sans cartes ni "alertes orange ou rouge" comme autant de carcans et de fers aux pieds de sa servitude, si elle est, comme si souvent, communément consentie.
Servitude rejetée par un Tesson qui tranche pour nous entre le conte historique et l'histoire philosophique des Hommes et de leur nature.
C'est pourquoi il peut être intéressant de lire cet été avec Homère...et Tesson en garde page, comme en garde-fou et guide de hauts "chemins noirs".
Un bel été à tous.