Le deuxième roman de Anuk Arudpragasam n'est pas écrit à la première personne mais en porte toutes les caractéristiques, en un monologue ininterrompu et méditatif. Un passage vers le Nord n'est manifestement pas un livre pour ceux qui aiment le suspense, l'action et l'enchaînement des situations. Constitué de longues phrases, dans un style très travaillé (félicitations à la traductrice, Dominique Vitalyos), le livre explore les pensées et les sensations de son héros, Krishan, alors que la guerre civile au Sri Lanka s'est achevée depuis peu de temps, en laissant des séquelles irréparables au sein de la communauté tamoule "perdante" et décimée, à laquelle appartient Krishan, bien qu'il n'ait pas participé directement au conflit. C'est néanmoins un jeune homme hanté par les horreurs de la guerre que décrit l'auteur, et dont il ne pourra que difficilement se libérer. Comme l'étreinte d'un boa constrictor, la prose d'Arudpragasam ne donne que peu de place pour respirer, fourmillant de détails psychologiques, dans une contemplation active, si l'on ose dire, cherchant sans arrêt à approfondir la réflexion de son personnage principal, y compris dans l'évocation d'une histoire sentimentale de son proche passé et surtout de la mort accidentelle (ou non) d'une femme traumatisée par la perte de ses deux fils et qui s'est occupée de sa grand-mère. Un décès qui l'amène de nouveau à voyager vers le nord du pays, pour des funérailles aux allures de cérémonie de deuil d'une population entière. On ne peut nier la qualité du texte et les informations précieuses qu'il apporte sur cette guerre atroce mais c'est un roman exigeant par son côté obsessionnel, qui ne s'autorise aucune once de légèreté.

Cinephile-doux
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Mes livres de 2023

Créée

le 7 févr. 2023

Critique lue 30 fois

Cinéphile doux

Écrit par

Critique lue 30 fois

D'autres avis sur Un passage vers le Nord

Un passage vers le Nord
Cinephile-doux
6

Guerre et séquelles

Le deuxième roman de Anuk Arudpragasam n'est pas écrit à la première personne mais en porte toutes les caractéristiques, en un monologue ininterrompu et méditatif. Un passage vers le Nord n'est...

le 7 févr. 2023

Du même critique

As Bestas
Cinephile-doux
9

La Galice jusqu'à l'hallali

Et sinon, il en pense quoi, l'office de tourisme galicien de As Bestas, dont l'action se déroule dans un petit village dépeuplé où ont choisi de s'installer un couple de Français qui se sont...

le 27 mai 2022

75 j'aime

4

France
Cinephile-doux
8

Triste et célèbre

Il est quand même drôle qu'un grand nombre des spectateurs de France ne retient du film que sa satire au vitriol (hum) des journalistes télé élevés au rang de stars et des errements des chaînes...

le 25 août 2021

73 j'aime

5

The Power of the Dog
Cinephile-doux
8

Du genre masculin

Enfin un nouveau film de Jane Campion, 12 ans après Bright Star ! La puissance et la subtilité de la réalisatrice néo-zélandaise ne se sont manifestement pas affadies avec Le pouvoir du chien, un...

le 25 sept. 2021

70 j'aime

13