Hélène Dorion ou l’encéphalogramme plat de la poésie

J’ai voulu découvrir la poésie de Dorion car elle était au programme du bac et elle fait son entrée dans la mythique collection poésie/gallimard. Je me disais (le naïf, peuchère) que, pour qu’une poétesse vivante et québécoise réussisse cet exploit, ses vers devaient être d’exception, que c’était impossible qu’elle en soit là à force de copinages. Non ? Non. Ah.

J’aimerais pouvoir dire que les poèmes sont mauvais, mais ce serait mentir, ils ne sont pas mauvais, c’est à peine si ils sont, ils essaient de se frayer un chemin dans l’existence, timides. Je les aurais préférés mauvais. Là, nous sommes face à un ennui qui dure 300 pages, comme une sonate en do majeur de 25 minutes, ne faisant des arpèges que sur le premier et cinquième degré. Aucune tension, rien, on tourne les pages comme un légume. Poetry Schumacher approved. C’est de la télévision mise en vers. On pourrait la lire avec une voix de speaker que ça ne ferait pas tâche.

Je dis qu’il n’y a rien, que les poèmes ne donnent même pas de quoi s’énerver. Enfin, si, un tic de langage m’a énervé, qui me soûlait déjà chez Neruda (celui du Canto General, le bon Neruda, donc). Voyez, lecteurs, si ce tic m’énerve chez le génial Neruda, imaginez la souffrance face à l’eau tiède Dorion. Trêve de suspense, lecteur, lectrice, ce tiquant tic est la répétition de trois mots (noms ou participe passé) à la suite, avec les virgules et tout le tintouin ponctuatif. Ce rythme (et c’est bien là la seule trace de rythme que nous rencontrerons) répété à l’outrance, devient une faiblesse à la troisième occurrence. On pardonne à Neruda, mais à Dorion ? Un exemple ? « ce qui fut brisé, échappé, perdu/ de notre éternité » un autre ? « se rassemblent le vent, la vague et la pierre ». Le pire, c’est que rien n’y est surprenant, troublant, remarquable. Quitte à user jusqu’à la moelle un rythme, autant le travailler un minimum, non ? « Le vent, les vagues et un slip ». Déjà l’on se souvient de nos vacances adolescentes à la plage, tenant la serviette pour nous changer, pudique. « Une main, une truffe, un souffle » et on imagine une caresse d’un animal de compagnie. « La main, la fesse, la claque » bref, je m’égare. A ma connaissance, le seul à avoir réussi ce rythme est Leonard Cohen dans son poème/chanson The faith.


Finalement, Hélène Dorion, ça reste Hélène Dorion qui en parle le mieux, page 296 : « Le voyage est long/ et vain »


jacmaz
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le 3 mars 2025

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