Vernon Subutex est vraiment un quidam parmi les quidams. Au début du tome 1, sa vie glisse peu à peu vers la précarité intégrale, plus de quoi bouffer, plus de quoi fumer, encore un peu de thunes pour acheter des bières... Et bientôt plus de logement.
Et derrière, une intrigue qui se noue. La recherche d'une vague relique d'un chanteur mort.


Mais, dans ce tome 1, ce qui tient vraiment, fondamentalement la lecture, c'est la galerie de portraits. Naviguant de logement en logement de connaissances lointaines ou proches, passées ou présentes, Virginie Despentes nous montre plein de personnages. Ils ont tous plus ou moins cabossés, et s'ils ne le sont pas, ils ne font pas l'objet de beaucoup d'estime de la part de l'écrivaine. Et on sent qu'elle les a tous beaucoup travaillés, elle est allée très loin, dans leur histoire passée, dans leurs désillusions, dans leurs modes de fonctionnement.


C'est tragique, quasiment tout le temps, dépourvu d'espoir. Mais il y a Vernon. Tout glisse sur lui, il se fout d'à peu près tout, mais il propose, aux yeux des gens qui l'accueillent de plus ou moins bon gré, deux qualités :



  • c'est le meilleur DJ qui soit, celui qui sent l'ambiance de la salle, qui a une connaissance encyclopédique du rock et qui sait quoi passer à quel moment. J'ai rarement shazamé autant que pendant la lecture de ce tome
    • son jeanfoutisme apaise son entourage, cela le rend lumineux, attractif, séduisant


Vernon glisse sur la vie. D'aucuns pourraient dire qu'il passe à côté de sa vie, mais je ne crois pas que c'est ainsi qu'il le ressente. Il accepte ce qui lui arrive comme étant sa vie, et il trouve ses petits plaisirs avec ça. Et de toute façon, il rebondit d'un endroit à un autre sans forcer.


Il est autant cabossé que les autres, mais il a ça. Cette capacité à faire glisser et la musique. Et de façon habile, Despentes nous le fait glisser d'un logement à l'autre et nous fait rencontrer toutes ces femmes et tous ces hommes qu'elle arrive très vite à nous rendre proches, même les plus hystériques, même les plus cyniques.


C'est rock, mais c'est sans posture.

John-Peltier
9
Écrit par

Créée

le 12 févr. 2021

Critique lue 125 fois

3 j'aime

1 commentaire

John Peltier

Écrit par

Critique lue 125 fois

3
1

D'autres avis sur Vernon Subutex, tome 1

Vernon Subutex, tome 1
darknight
5

ennuyeux et caricatural

C'est le premier Despentes que je lis, j'avoue avoir été déçu. Le récit partait bien et n'était pas dénué de qualités, mais le livre devient assez vite une succession de portraits peu intéressants...

le 20 févr. 2016

54 j'aime

3

Vernon Subutex, tome 1
eloch
7

"L’époque plébiscite la brutalité"

A propos du dernier livre de Virginie Despentes, on peut lire un peu partout que la colère de l'écrivaine est intacte. Tant mieux ou tant pis car ce n'est pas ça qui ressort en premier lieu de...

le 22 janv. 2015

49 j'aime

8

Vernon Subutex, tome 1
BrunePlatine
8

Radiographie du XXIème siècle

Je viens tout juste de refermer ce bouquin : c'est la première fois que j'accroche vraiment avec Despentes, et pas une petite accroche, un vrai coup de coeur. Ce roman, aux allures de vrai-faux...

le 29 avr. 2015

40 j'aime

12

Du même critique

Total Trax
John-Peltier
8

L'érudition au carrfour du cinéma et de la musique

Chez moi (et pourtant on est un peu), je suis le seul à éprouver de l'intérêt pour la musique de film. Il devient alors difficile pour moi d'écouter des podcasts de 3 heures sur de la musique un peu...

le 17 août 2021

8 j'aime

3

The Downward Spiral
John-Peltier
8

Le suicide en un album - acte II

Parce que l'essentiel c'est les 3 points. Pourquoi écouter cet album : 1/ C'est album majeur des années 90, à la fois précurseur, expérimentateur, mais aussi, dans une certaine limite, grand public...

le 15 juil. 2021

8 j'aime

We're OK. But We're Lost Anyway
John-Peltier
8

Progressif et surréaliste (mais pas que)

Voilà.A force d'écouter des albums, vieux, pas vieux, on finit par découvrir des artistes qui t'offrent enfin un truc qui parle à ton coeur et ton intelligence.Orchestre tout puissant Marcel Duchamp,...

le 13 oct. 2022

5 j'aime

2