La saison 1 est extrêmement dense, passe tous les éléments de l’univers politique et sa pratique au sommet en revue. Là où les deux saisons suivantes pourront s’aventurer dans les détails privés et publics, il est encore question de tout sonder : Borgen ressemble alors à un grand plan sur lequel on zoomerait de l’infiniment petit (la gestion de leur carrière par les personnages, les conséquences sur leur vie privée mais aussi leur place d’individu dans ces circonstances) et l’infiniment grand (le quotidien de ces personnages est tourné vers le sommet, les préoccupations les plus transcendantes, urgentes et possessives). En fin de saison, le climat se fait plus lourd, éreintant. Birgitte vit toujours sou la menace, avec son intégrité que personne ne valorise et que le public ne voit pas. Elle accumule les sacrifices et subit la pression des médias, de la rumeur, de l’opinion. Elle est écrasée par sa fonction, sans retour, sans compensation. On la voit devenir plus froide, sèche, cassée mais responsable. Le nez entièrement dans les dossiers, l’esprit absorbé par des détails et les charges qu’elle prend à ses ministres.


(...)


La série est toujours réceptive à l’ensemble du panel des idées – et les lire au travers de leur organisation dans les partis, si c’est arbitraire, est aussi la meilleure façon de les planter dans le réel de la démocratie parlementaire. Par contre et alors qu’elle assume le cynisme (sans s’en glorifier, mais avec justesse), avec notamment les options et les dispositions que doit embrasser Birgitte Nyborg ; l’écriture trahit un certain blocage dans sa perception de ces courants, où qu’elle les loge sur l’échiquier, mais en particulier pour le camp « réactionnaire ». En même temps, elle lui accorde la parole et montre les contradictions des autres lignes par rapport à elle. Mais en faisant de ses héros des chevaliers blancs sortant de leurs gonds seulement face au Parti de la Liberté, Borgen se complaît dans cette position limitative et légèrement, pour le coup, "politiquement correcte", là où justement nous sommes réunis devant cette série pour voir levées ce genre de barrières de circonstances, peut-être utiles pour la forme et l’usage, mais désuètes lorsqu’on est engagé dans une immersion si habile et avertie des arcanes de la pratique politique.


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Zogarok
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le 8 oct. 2013

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