Tombstone Blues.
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En 2071, dans un vaisseau spatial nommé « Bebop », nous suivons les mésaventures d’une équipe de chasseurs de prime, parcourant l’espace proche de la Terre (Vénus, Jupiter) à la recherche d’hors-la-loi.
Un western dans l’espace ? Oui, évidemment, les références sont innombrables, notamment envers une certaine culture américaine (et aux oeuvres qu'elle a engendrées), à laquelle on rend hommage : musicale, cinématographique, livresque. Dans le déroulement de l'histoire, les titres des épisodes, le générique, le nom de certains personnages, et cette partition jazz parcourant le fil du récit, on y respire le bon cinéma.
La série n'est cependant pas étouffée par ses modèles, et parvient à créer son propre univers, avec ses codes et un spleen insensé la rendant unique.
La musique y est un personnage en soi, peut-être même le principal, tant elle se love avec perfection dans toutes les intrigues, avec un rythme parfois tordu, épousant l'accélération du récit ou le dévoilement des sentiments, comme si un orchestre l’avait composée après-coup, en regardant les épisodes. Si l’on met de côté le chien Ein et Ed, petite pirate informatique pleine de joie et de folie, notre équipage est composé de bounty hunters traînant leur blues et leur mélancolie, dont les différentes missions permettront d’évoquer quelques souvenirs épars de leur passé meurtri, sans passer systématiquement par le flash-back.
C’est la grande force du show, le caractère mystérieux de ses héros mutiques (Spike Spiegel, Jet Black, Faye Valentine) qui arrivent toutefois à nous émouvoir et se faire aimer. Le poids du passé pèse lourdement sur leurs épaules, et qu'ils essaient de s'en rappeler, de l'oublier ou de vivre avec, ils sont incapables de s'en libérer. C'est toute la matière de cette série, belle, poétique et weird. Aucune justification à attendre ici lors de scènes dialoguées et sur-explicatives. On découvrira leurs failles et leurs fêlures intérieures au fur et à mesure des épisodes, subrepticement, sans jamais exprimer les choses clairement, les remords, les regrets, les souvenirs, laissant la place à l’imagination du spectateur.
Cette force est néanmoins aussi la faiblesse de Cowboy Bebop. Malgré le dévoilement progressif de l'intériorité des personnages, on peut regretter l'absence d'une trame narrative globale qui forcerait à binge-watcher la série et nous tiendrait en haleine. Si la série est passionnante à regarder, c’est pour découvrir ses personnages, et non par intérêt réel pour ses intrigues indépendantes les unes des autres, au caractère fort alambiqué, parfois même de trop que pour capter toute notre attention. Il faut aussi aimer ce genre d'aventures où des héros naviguent dans l’espace via des portails. Tandis qu'ils louvoient dans leurs vaisseaux entre des météorites tournant autour de notre planète, on a la sensation qu’ils s’en sortiront à la fin de tous les épisodes, un peu "à la James Bond", parfois avec des égratignures mais toujours vivants.
Paradoxalement, les épisodes les plus beaux et les plus poignants sont d’ailleurs ceux qui se passent sur le sol (Pierrot le fou, Ballad of Fallen Angels, The Real Folk Blues), quasiment muets, lors desquels les règlements de compte deviennent opératiques, à la Sergio Leone. La mélancolie de Spike, son mal de vivre, s’exprime alors par la musique, l’esthétique soigneusement composée de chaque plan, souvent fixe, avec peu de mouvements de caméra, les visages, les yeux cloués au sol, les cigarettes jetées par terre dans les rigoles des trottoirs sales et de ruelles sombres. Lors de ces moments-là, Cowboy Bebop quitte notre galaxie pour atteindre un niveau d’émotion cosmique.
Créée
le 17 mai 2020
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