Avec Anna, et grâce au recul d’il Miracolo, le réalisateur italien Niccolo Ammaniti réussit à creuser son sillon créatif. Il y a encore et toujours cette sidération voulue par les images, et elle monte encore un cran plus haut avec ce contexte apocalyptique où un virus décimant les adultes ( « la Rouge ») doit inciter les jeunes et les adolescents à survivre coûte que coûte. Quelque part, ce qui est intéressant est de voir comment ils réagissent face au déclin et de voir logiquement arriver des circonstances horribles car il y a bien évidemment des enfants et des ados malsains qui en profitent pour lâcher leurs instincts les plus bas. Le spectateur devant cette exposition sans concessions se sent parfois pris au piège d’une violence inouïe ( des enfants ayant perdus leurs repères qui en torturent d’autres surtout) et se demande jusqu’où l’action va bien le mener. Heureusement, un story-telling bien mené ( entre présent et flashbacks des nombreux personnages) arrive aussi à distiller des lueurs d’espoir ( quand Anna a ses premiers émois d’adolescente avec Pietro,quand elle retrouve son demi-frère Astor une première fois après les supplices de la villa entre autres). La musique est aussi un personnage à part entière et l’habillage sonore est plutôt habité et réfléchi.Anna, le personnage principal, est aussi un petit bout de femme résilient dont la capacité d’adaptation étonne bien que les circonstances de sa vie l’ont obligé à grandir plus vite pour suppléer sa mère dans l’éducation d’Astor. Sa force de vie et son envie de lutter contre les pires abjections commises envers ses proches est vraiment ce qui vous pousse à suivre sa destinée terrible et à ne pas lâcher l’affaire. Là où le traitement pêche un peu, c’est dans la façon de distiller le mensonge pour éviter le fracas contre le réel ( Anna ment à Astor pour lui donner des limites, le protéger de la mort ou des dangers.C’est aussi le cas de Saverio protégeant Pietro de la mort de sa mère en lui racontant une fable qu’il croit encore, adolescent). Au-delà d’une préservation de l’innocence du plus vulnérable ( plutôt saine à priori), il y a quand même le tabou d’une vérité qui pourrait être décrite avec des détours plus habiles et ne pas faire des dégâts.Astor, accèdera cependant à une compréhension du monde progressive grâce à ses intuitions salvatrices. L’un dans l’autre, entre bonnes idées et chocs sensoriels/psychologiques, Ammaniti oscille sans cesse et le spectateur ne peut s’empêcher de questionner entre ce grand écart voulu entre les bonnes augures et le mal. Les deux derniers épisodes, sont à mon sens, les plus éprouvants car ils réactivent les insécurités malgré les retrouvailles d’Anna avec Pietro puis Astor une deuxième fois.Je n’arrive pas à statuer sur la finalité de cette œuvre, si ce n’est à conférer la notion de ressources à des enfants pour ne pas sombrer au milieu du chaos. Mais que cela fut dur, que tout un chacun fut malmené avant la scène finale sur ce cargo tombé du ciel. La série catastrophe moderne voudrait-elle éprouver nos réactions pour nous faire comprendre que l’humain se dépasse toujours aux pires extrémités?