Oui, c'est beau
Claque visuelle, j'admire et j'apprécie le superbe boulot de storyboarding et de direction artistique. Les personnages sont tous magnifiques, les environnements sont beaux et les plans...
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le 30 nov. 2021
99 j'aime
Encore une série qui a tout sauf une raison d’être. Visuellement, rien à dire : c’est impeccable. Trop impeccable, même. Chaque plan semble conçu pour finir en GIF ou en clip promo. Tout est saturé, tout est souligné. La musique couvre tout, la mise en scène veut briller tout le temps, comme si le récit n’avait pas confiance en lui-même.
Et à raison.
En fait, le seul vrai moment qui m’a un peu accroché, c’est quand les deux sœurs se rapprochent à nouveau vers le milieu de la saison. Sans explication, sans grand discours. Juste, ça revient un peu. Et bizarrement, j’ai trouvé ça plutôt juste. Parce que dans la vraie vie, les gens peuvent se déchirer un jour, et puis quelques semaines ou mois plus tard, se reparler, redevenir proches, sans que tout soit forcément réglé. Pas besoin d’un grand arc de rédemption. Juste un glissement, un truc humain. Ça, j’ai bien aimé.
Mais à part les deux sœurs, franchement, y’a plein de persos… je m’en fous. Leur vie, leurs enjeux, leurs dilemmes moraux, ça me touche pas. Et comme souvent dans ce genre de série, c’est beaucoup trop long pour raconter des trucs finalement hyper banals. On a des dialogues très sérieux, très chargés, pour des histoires qu’on a déjà vues cent fois.
Et puis y’a ce délire de pouvoirs chelous, un peu mystiques, un peu scientifiques, je sais même pas. C’est joli, ok c’est bien emballé. Mais tu sens qu’on veut te faire croire que c’est profond, que ça a du sens, que c’est une grande mythologie… et j’y crois pas pas dut tout. En tout cas, ça me parle pas.
Le gamin des rues qui devient proche de Jinx, et elle qui le prend un peu sous son aile, ouais, c’est sympa, ça se regarde. Mais on a déjà vu exactement ça. Cette proximité tendre entre deux paumés, un peu cabossés mais gentils au fond, c’est ultra balisé. Le trope est cramé. Y’a plus de surprise, plus de fraîcheur. Juste une énième variation d’un truc qu’on nous a déjà servi milles fois
Il y a, de manière assez flagrante, ce reflet typique des séries Netflix : un enchaînement de situations déjà vues, recyclées, et une manière de raconter les choses qui semble programmée, presque algorithmique. Même rythme, mêmes effets de style, mêmes montages clipesques. On ne raconte plus, on applique une recette.
L’animation, je le répète, est de très bonne facture. C’est maîtrisé, ciselé, souvent impressionnant. Mais cette maîtrise devient vite monocorde. Tout est fait dans le même registre visuel, ce cell-shading sur les personnages avec fond somptueux, saturé, hyperléché. Aucun écart, aucune rupture stylistique (ou presque mais trop rare pour être vraiment significatif). Le style est fort, mais il ne respire jamais autrement.
Sur le fond, la série ne raconte rien qu’on n’ait déjà vu ailleurs et souvent en mieux. On retrouve le schéma classique : les gens d’en bas, relégués aux marges, rêvent d’une vie meilleure, mais comme ils viennent des bas-fonds, ils finissent assimilés à des terroristes. En face, ceux d’en haut incarnent l’ordre, l’autorité, la sécurité. Des policiers, des généraux, des scientifiques. Mais eux non plus ne sont pas nets : violents, brutaux, eux aussi pris dans un cycle de la violence dont la série croit encore faire une révélation. Et puis évidemment, ils finissent par s’unir contre une menace encore plus grande l’ennemi commun, le vieux truc. Sauf que là, c’est pas juste vu, c’est creux. Et ce retournement débile flingue ce qu’il restait d’ambiguïté dans la saison 1. Y avait un minimum de tension, de conflit réel. Là, tout est aplati.
Autour de ça gravitent quelques éléments censés donner de l’ampleur : du pouvoir, des cultes, du gaz bizarre, des artefacts un peu magiques, un peu technologiques, du steampunk à usage décoratif. Rien de plus. Ça meuble, ça enrobe, mais ça ne dit rien.
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Je commence à cerner le vrai problème d’Arcane. Ou plutôt les problèmes, parce qu’ils sont multiples.
D’abord, oui, je le redis : la série est de bonne facture, visuellement soignée, avec quelques idées de mise en scène ou de narration pas inintéressantes. Mais ce qui coince, et qui coince fort, c’est la gestion de l’espace. Il n’y a aucune présence réelle dans les lieux. On saute de scène en scène comme si tout était tourné sur fond vert, sauf que c’est de l’animation. Et l’animation, justement, devrait permettre des circulations, des fusions entre les décors, la lumière, les corps. Là non. Tout reste figé. Des personnages léchés qui glissent dans des environnements 2D. C’est beau, oui. Mais c’est statique. Et ce statique-là, je le sens. Je ne le vois pas seulement, je le ressens dans le montage, dans les mouvements, ou plutôt dans leur absence.
La caméra ? Elle ne bouge quasiment jamais. Quelques effets ici et là, mais jamais cette sensation qu’on pourrait vraiment entrer dans le décor, s’y perdre, y revenir. Tout est posé, maîtrisé, mais sur des rails. On ne traverse pas un monde, on suit un storyboard verrouillé.
Et alors on me dira : oui mais les images sont belles, les musiques poignantes, les thèmes profonds. Bah non. Enfin pas vraiment. Parce que si je viens pour voir de jolies images, je tape "Arcane wallpaper 4K" sur Google. Et je m’épargne huit épisodes.
Même le style graphique, aussi réussi soit-il, finit par tourner à vide. Ce mélange 2D/3D, ça claque au début, puis ça s’épuise. Il ne se passe plus rien. Aucune variation, aucun vertige. Juste des personnages rigides dans des décors somptueux, et morts.
Et au final, mon avis peut paraître changeant, mais en fait non : c’est exactement ça le problème. La série trop bien faite à certains moments, presque bluffante, mais tellement creuse ou molle à d’autres, que ça finit par me lasser. Et je me pose la question : pourquoi je donnerais du temps à un truc qui stagne ? Pourquoi me contenter d’un divertissement "moyennement impressionnant", alors qu’avec le budget et l’équipe qu’ils ont, ils pourraient viser beaucoup plus haut ?
Abrèèèègez. Coupez. Condensez. Tranchez. Faites trois épisodes maximum, mais vraiment dingues. Pas une suite tiède, pas une belle coquille vide où on fait semblant de monter en intensité pendant huit épisodes pour trois scènes qui claquent. Trois épisodes. Bam, bam, bam. Tout le monde est content
Parce que sérieux, vous nous fatiguez avec vos histoires à rallonge. On est là à dire que se matter un film de trois heures comme si c’était un exploit de concentration, et dans le même temps vous bingwatcheé des saisons de 8 heures où il se passe trois trucs et demi. Mais à quel moment ? Je dois me taper ça quand ? À quel moment dans ma semaine, dans mon cerveau ? Vous croyez que binge-watch c’est un superpouvoir ? Non. C’est un piège. Et je tombe plus dedans.
Prenons justement l’exemple de Vi et Powder. Si j’avais réellement été confronté à une écriture naturaliste, ou même simplement à une logique dramatique un tant soit peu structurée, alors leur basculement respectif de sœurs unies par la galère à figures tragiquement opposées aurait dû m’émouvoir, me saisir. Sauf qu’en réalité, leur séparation repose sur des malentendus téléphonés, des réactions absurdes, et des décisions scénaristiquement forcées. On nous vend une rivalité digne d’Antigone contre Ismène, mais on se retrouve face à deux ados en crise qui cabotinent dans des décors de RPG. À aucun moment, je ne vois ni l’usure de la misère, ni la violence lente du déterminisme social. Je vois deux figurines de cosplay déguisées en récit. Et ça, ce n’est pas de la tragédie naturaliste. C’est du drama préfabriqué en pâte à modeler. Voilà où conduit l’aliénation : à confondre mimétisme émotionnel et profondeur réelle.
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Petite apparté : Ce qui m’a donné le déclin, c’est Dandadan. J’essayais péniblement de finir cette saison 2 d'Arcane, et là je mate les deux premiers épisodes de la saison 2 de Dandadan. Et bordel… c'est incroyable. Animation, caméra, rythme spatio-temporel : tout est clair, tout est fluide. Tu comprends chaque scène. Et en plus en même temps que les scènes d'action, y’a du développement de perso, des motivations qui tiennent, un flashback net, relié au présent. Et le Yokai est vraiment vraiment flippant. Et surtout ca s'enchaine et va droit au but.
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Dans Arcane il y a cette musique omniprésente, sérieux… c’est insupportable. C’est débile. Ça joue en boucle pour te faire croire qu’il se passe un truc. J’me suis même demandé si le problème venait de moi. Genre : "ah, j’ai vieilli, j’ai plus le temps, c’est plus pour moi." Mais non. C’est juste que t’as l’impression que c’est bien, mais en fait c’est vide. Et là, Dandadan est arrivé. M’a réanimé. M’a sorti de ce coma esthétique. Faut être clair : y’a des trucs qui sont bien emballés, bien foutus en surface, et qui, quand tu prends le temps de tout regarder vraiment, bah c’est nul. Ça tient pas. Ça s’écroule. C’est propre mais creux. Pas top top, même flingué.
Arcane essaie de te vendre du fond en te noyant dans la forme. Mais y’a pas de souffle, pas de rythme vital. C’est tout calibré, tout trop lourd, tout trop sérieux. Tu sens qu’ils veulent faire 'œuvre'. Mais une œuvre, ça vit, ça tremble, ça déborde. Là, ça s’auto-surveille à chaque plan. Et au bout d’un moment, ça se voit. Tu captes que c’est pas vivant, c’est empaillé. C’est bien produit, mais mort. Froid.
Et c’est pour ça que Dandadan m’a retourné la tête, c’est pas juste bien animé, c’est pas jolie, c’est vivant, C’est tendu. Ça bouge tout le temps mais t’es jamais perdu. Chaque scène, chaque découpe, t’as une énergie de fou furieux mais avec une clarté dingue. T’es emporté, t’es dedans. Et surtout : tu ressens. Tu ressens tout. La peur, le danger, la pulsion, la tendresse même.
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C’est pas juste que cette saison 2 déçoit, c’est qu’elle révèle. Elle révèle qu’en réalité, depuis le début, tout reposait sur une illusion de maîtrise, un emballage premium conçu pour masquer qu’il n’y a rien derrière, ou si peu. Elle te donne le sentiment d’un récit ambitieux alors qu’elle ne fait que dérouler des artifices de narration, poser des enjeux qu’elle n’a pas le courage de creuser, déclencher des émotions sans jamais leur laisser le temps d’exister. Tout est immédiatement écrasé par une couche musicale, un effet dramatique plaqué, un twist parachuté pour faire diversion. Et à force, tu vois les coutures, tu vois le squelette mécanique, tu vois que ça produit du simulacre. Une série qui passe son temps à t’expliquer qu’elle est sérieuse, qu’elle est complexe, qu’elle est profonde alors qu’en réalité elle ne supporte pas une seule seconde d’ambiguïté, d’errance, de silence, de vide. C’est une œuvre qui ne sait pas attendre, ne sait pas respirer, ne sait pas faire confiance à ce qu’elle raconte. Elle surligne tout, tout le temps, comme si le spectateur était un imbécile ou un client à convaincre. Et à la fin, ce que tu ressens, c’est pas de la beauté, c’est pas de la puissance, c’est un grand rien qui a pris deux cents heures à être animé.
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Depuis que je l’ai remarqué, je ne vois plus que ça. Y’a que des plans fixes. Jamais de mouvement au sein de l’action, jamais de vrai cadrage incarné. Aucun point de vue qui s’approche d’un objet, d’une main, d’un visage, pour te faire sentir la matière, la pression, le poids. Ça flotte. Ça illustre. T’as jamais l’impression de toucher quoi que ce soit. Tout reste propre, distant, désinfecté. Et ça se dit immersif ? On peut pas ressentir un monde si la caméra elle-même refuse de s’y mouiller. On peut pas croire à un récit si aucun plan n’assume d’être là, à l’intérieur, avec les corps, dans la crasse, dans le vivant.
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Je suis au dernier épisode et je n’y arrive plus. Vraiment. C’est de pire en pire. Tout s’effondre scène après scène, et je ressens plus rien. Y’a plus rien qui tienne. L’animation est correcte, rien de plus. Les plans wallpapers en 4K ne provoquent plus aucun effet. Plus de frisson, plus de tension, plus d’attente. Je m’en fous. De tout. Des personnages, de leurs enjeux, de leurs fausses douleurs. J’avance dans un tunnel visuel propre mais vide. Et là je me dis : c’est ça, en fait. C’est ça leur série. C’est pas fameux. C’est pas honteux. Mais c’est pas bon.
Ça aurait dû être un film d’1h30. Un coup sec, tendu, condensé. Et donner tout là. Parce que là, étiré comme ça, ça tient pas. L’histoire, la morale… mais quelle morale ? Je sais même pas ce que l’œuvre cherche à dire. Je sais même pas si elle cherche à dire quelque chose. Et je dis pas ça comme une critique contre les œuvres ouvertes ou sensibles. Je dis ça parce qu’ici, tout est flou, tout est mollement allusif, comme si eux-mêmes ne savaient pas ce qu’ils racontaient. Et c’est ça le fond du problème : si l’œuvre ne sait pas pourquoi elle existe, comment veux-tu que nous, on tienne ?
Créée
le 21 juil. 2025
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