Il s’agit du Spin-Off de Stranger où Dong-Jae était ce procureur souvent méprisé par ses pairs.
Il incarnait à merveille le fonctionnaire opportuniste : un peu sale, un peu malin, mais dont on devinait un reste de bonne volonté enfoui quelque part. Face à lui, Hwang Si-Mok, représentait la droiture absolue, froide et incorruptible. Diamétralement opposés, tels les deux chevaliers d’un jeu d’échecs.
Comme un reflet inversé, Dong-Jae incarne la stratégie là où Si-Mok impose une morale rigide.
Et pourtant, Si-Mok ne l’exclut jamais vraiment. Car Dong-Jae n’est pas un salaud. Juste un homme faible dans un système vicié, usé par ses compromis et sa soif d’ascension. La saison 2, avec son enlèvement, dévoile d’ailleurs toute sa vulnérabilité. On y découvre un personnage bien plus seul et désarmé qu’il ne le laisse paraître.
Ici on retrouve Dongjae, bien après la fin de Stranger 2. Il est plus lucide, mais pas repenti pour autant. Il n’a pas changé de nature, il a simplement compris à quoi il servait. Là où Stranger soulignait l’impuissance de la vertu pure à modifier un système corrompu, cette série propose autre chose. Un homme imparfait, ambigu, mais capable d’en découdre avec ces puissants parce qu’il connait leur langage et leurs règles. Il n'est pas dupe.
Lee Joon-Hyuk est bluffant. Vraiment. D’un regard, il exprime la frustration, la rage, la ruse. Il fait exister un type qu’on devine usé jusqu’à la corde, ambitieux mais encore capable d’une empathie désordonnée. Enfin c’est ce que l’on veut nous faire croire. Ainsi, lorsqu’il découvre que la lycéenne qu’il a voulu protéger est retrouvée morte, un vieux fond de sincérité refait surface. Mais ne nous y trompons pas ! Il y voit aussi, très clairement, l’occasion rêvée de reprendre sa marche vers les sommets. Donc, notre Dong-Jae se jette dans cette enquête avec un seul objectif en tête.
Le démarrage est vif, les rebondissements bien placés, et l’humour parfois noir évite à l’ensemble de virer au plombant. Si le rythme faiblit un peu en milieu de série (à moins que ce ne soit moi qui ai décroché ?), l’ensemble reste toutefois maîtrisé. Avec 10 épisodes, le suspense est globalement bien maintenu, même si la conclusion semble un peu précipitée, comme si le scénariste s’était soudain dit : "Ah oui tiens, il faudrait peut-être que je termine maintenant ?".
Et cette fin, m’a intriguée.
Car si Dong-Jae est révoqué de la magistrature, il intègre cependant une cellule spéciale anti-corruption au Ministère de la Justice.
Après réflexion, ce n’est pas pour ses qualités morales qu’il sera utilisé. On ne le détruit pas, on le recycle. Le système ne récompense pas la vertu mais l'efficacité. Dans cet univers où l’intégrité pure est impuissante, il faut des bâtards brillants pour affronter les bâtards qui gouvernent. Il faut les mêmes armes. On ne combat pas une épée avec une flèche.
Au final, la série ne glorifie pas la corruption : elle la diagnostique comme structurelle, et interroge ce que signifie « Faire le Bien » lorsque tous les outils à disposition sont sales.