Sea, sex and sun, and sex, and more sex

Je me souviens bien de la première fois que j’ai vu un extrait de Frenchie Shore, Fab Gordon de la team Nanarland avait posté sur feu Twitter une vidéo que j’avais vue malgré moi, et ça m’avait tellement choqué que j’avais vécu ça comme une agression. C’était peut-être même avant que l’émission ne fasse polémique, notamment via la ministre de la culture du moment qui la décrivait comme « à la limite de la pornographie »… et je ne peux pas lui donner tort (surtout que le floutage de la nudité et des rapports sexuels ne cache pas grand-chose).

Je ne songeais pas regarder ce machin un jour et puis un peu comme pour des merdes dont je voulais au départ me tenir à distance, comme Les Déguns ou Taxi 5, j’ai eu un revirement en me disant que ça pourrait faire un bon programme avec un comparse nanardeur. Bon, on n’a pas vu toute la série non plus, hein ! Juste les 10 épisodes d’1h de la saison 1. Pour le moment.

Frenchie Shore, c’est un dérivé français de l’émission de télé-réalité américaine Jersey Shore, qui doit en fait son nom à une région du New Jersey. Si on traduit, Frenchie Shore signifie "littoral français", là en l’occurrence ça fait référence au Cap d’Agde, où l’émission a été tournée. Mais je pense que personne n’a vraiment réfléchi au titre français, et encore moins qu’on l’a expliqué aux candidats, qui parlent d’eux comme étant les "Frenchie Shore", et qui à d’autres moments parlent de tel ou tel truc en disant « Ça c’est Frenchie Shore ! », « C’est l’esprit Frenchie Shore ! », etc.

Bon je sais pas à quoi ressemble l’émission MTV d’origine mais là le concept c’est de réunir soi-disant les 10 plus gros fêtards de France (en majorité des obsédé(e)s sexuels), et… voilà. C’est tout. Il n’y a aucun enjeu. Il n’y a pas d’éliminations, pas d’objectif défini, il doit y avoir UNE épreuve entre deux équipes dans un épisode mais sans réelles répercussions (les gagnants ont un bénéfice dont les autres sont privés, ou un truc comme ça).

Donc quel est l’intérêt ? Tout simplement de voir réunis en un même lieu des personnes qui sont pratiquement toutes comme des animaux en rut, qui ne pensent qu’à boire, baiser et faire la fête. Le montage doit y être aussi pour quelque chose, mais t’as l’impression que les conversations n’ont aucune substance, qu’aucun candidat n’apprend réellement quelque chose sur ses camarades et que les interactions consistent principalement à exprimer son envie de baiser avec untel ou unetelle. Avec évidemment les querelles prévisibles qui en découlent : Machin a dragué/embrassé/couché avec/parlé à Machine, alors qu’il est censé être en "couple" (gros guillemets) avec telle autre.

Je regarde pratiquement pas de téléréalités mais du peu que j’en vois passer et d’après ce qu’on m’a dit, "Frenchie Shore" reprend simplement la formule habituelle, mais en plus trash. Les participants n’ont aucun filtre, aucune retenue ; les mecs ne se gênent pas pour afficher qu’ils sont des grosses merdes en disant face caméra qu’ils veulent baiser toutes les meufs et qu’ils ont couché avec l’une en douce pour pouvoir derrière en draguer une autre. Mais que ce soit du côté des hommes ou des femmes, il n’y a jamais aucune subtilité dans la drague, aucun sous-entendu un peu malin, on est plutôt dans le sur-entendu, du genre « J’aimerais sentir ta main dans ma chatte ».

Même la plus crade des teen comedies est moins vulgos que ça. Et c’est ça qui est ahurissant, hilarant et captivant : le manque total de tabou et de honte, les trucs les plus outranciers étant balancés comme si c’était tout à fait naturel. J’avais l’impression de voir des dialogues à la Femmes en cage ou Maîtresses très particulières, mais pour de "vrai".

Il y a peu de contrastes entre les candidats (allez on va dire qu’il y en a 3 plus sages que les autres, sur 10), et c’est des personnes outrancières et sans-gênes qui seraient déjà hallucinantes en solo, mais dont le comportement est exacerbé par le fait d’être rassemblés. Tout le monde est surexcité et hyperactif (si j’apprends que de la coke a circulé dans les coulisses, ça me rassurerait), et ça gueule tellement que durant les testimonials plusieurs personnes ont la voix cassée. C’est un peu épuisant à voir ; avant de prendre l’habitude, on a fait une pause au bout de 15mn.

Et puis les filles twerkent à tout bout de champ, ça doit bien arriver toutes les 5mn ; je pense que je pourrais en faire une compilation d’1h. Elles twerkent même dans les moments inopportuns : il y a un moment hilarant où, pendant qu’une candidate pleure car elle est mal dans sa peau, on en voit une autre derrière qui se met à twerker sans raison, comme un perso dans un MMO qui viendrait troller un autre joueur !

Même s’il n’y a pas d’épreuves, les participants doivent soi-disant travailler pour gagner le mérite de faire la fête derrière (en vrai ils vont en boîte TOUS LES SOIRS, je crois que je n’exagère pas), donc on leur donne des tâches vite fait, des trucs relativement simples pour lesquels ils répètent à chaque fois qu’ils n’ont pas envie de bosser et qu’ils bâclent en faisant n’importe quoi (je sais pas comment le même mec a accepté des les faire bosser dans sa guinguette pleins de fois ; je pensais que les clients auraient fui le lieu comme la peste à force). À retenir : un passage à la ferme pendant lequel deux mecs se défient de manger du caca, et une épreuve où il faut gagner le plus d’argent sur la plage et où une des femmes fait un truc qui doit probablement relever de la prostitution, puisqu’elle se fait payer pour un massage avec ses seins.

Et en fait, comme on le réalise très vite, toute la saison et tous les épisodes présentent un cycle infini de discussions sur la baise et de drague, de boulot mal foutu, de baise, de disputes à cause de la jalousie suivie d’une réconciliation où ça baise, de soirées alcoolisées, encore de baise, et ainsi de suite.

Rien que dans la première journée, on a déjà le temps de voir des couples se former, de la jalousie et les premières infidélités, les couples se défaire et se reformer pour rebatifoler derrière. Et il y a un duo pour lequel c’est ainsi jusqu’au dernier épisode, c’est hallucinant, à chaque fois la femme voit sa confiance trahie, elle dit que c’est définitivement finie mais elle pardonne et revient vers le mec ou le laisse revenir à elle ; je ne sais pas combien de fois ça arrive mais ça semble infini. Les candidats ont la mémoire d’un poisson rouge, surpris de voir se reproduire à chaque fois les mêmes comportements. Et, plus con encore, surpris de voir embrasser/coucher à gauche et à droite des gens qui sont quand même venus là avec l’objectif sans cesse répété de baiser un max.

Il y a peut-être une leçon sur l’incapacité de l’être humain à apprendre de ses erreurs, quelque part là-dedans.

Ce qui est drôle d’ailleurs c’est que les mecs qui clament vouloir baiser tout le monde s’insurgent quand leur meuf du moment fait la même chose.

Mais à côté de ça, si on excepte le fait que ça suce beaucoup de bites mais lèche peu de chattes, l’émission est en quelque sorte "progressiste" (gros guillemets là encore). Bon, déjà il est indéniable qu’on présente des femmes libérées qui assurent leurs désirs et leur sexualité sans honte. Il y a un type pansexuel, un gay, et un coming-out trans qui est étonnamment bien reçu par les candidats ; ça donne d’ailleurs lieu à un moment où, après que tout le monde ait dit des trucs chaleureux et réconfortants à la candidate trans, l’un des mecs conclut : « Ça change rien à l’attirance que j’ai pour elle, j’ai toujours envie de la baiser ». Ça m’a fait hurler de rire, ce retour soudain à la beauferie typique de l’émission après un moment de légèreté.

L’émission a beau présenter tout le temps la même chose, et ce tout au long d’une saison de 10h, on n’en était pas lassé mon acolyte et moi, étrangement. Parce qu’il y a le montage sans temps mort qui t’empêche de décrocher, parce que les frasques et la connerie des participants restait un divertissement constant, parce qu’il y avait des détails qui nous faisaient marrer, comme le fait qu’une des candidates (Julie) gueulait toutes ses phrases dans le confessionnal sur le même ton pas du tout naturel, respectant à chaque fois la même cadence peu importe ce qu’elle disait. Et surtout parce que les participants ont beau être incroyablement vulgaires, il faut reconnaître qu’ils ne sont pas tous cons et certains font preuve d’une inventivité réjouissante dans leurs punchlines. Ils ne disent pas juste « Je veux baiser », non non, ça va chercher un peu plus loin que ça quand même. D’autres en revanche marquent, effectivement, par leur ânerie ou simplement par leur obscénité éhontée. Dans tous les cas, ces répliques sont l’atout qui rapproche le plus le plaisir que l’on a pris à regarder cette émission de celui procuré par des séries B d’action débiles des années 80.

Je terminerai donc ce texte sur un florilège de citations !

Épisode 1 :

-J’ai le cœur sur la main et la main sur la queue.

-Moi c’est Enzo, ma mission : détourner tous les hétéros !

-C’est ça les Frenchie Shore, c’est du sexe et de la baise.

-Je serai pas la seule foldingue à crier et sauter dans tous les sens, comme j’ai genre 48 vers collés à mon anus.

-Bouillant comme la braise.

-Une fois que j’ai calmé mes sueurs vaginales…

-Dès qu’il y a deux bras, deux jambes, un trou, je peux y aller.

-La baraque c’est genre un arc-en-ciel, y a Picasso qui a littéralement chié dans la maison.

-Bronzée comme ça, c’est un cafard sur la route ça ! T’as envie de la ramasser, lui faire des petits bisous comme ça.

-Elles vont pas y laisser des plumes, elles vont y laisser des implants.

-Elle veut se battre pour la queue d’un mec qu’elle a même pas encore goûtée.

-J’ai envie de foncer, droit au but, comme l’OM.

Épisode 2 :

-Melvin est toujours entre mes jambes, on dirait mes couilles.

-Quand on se regarde dans les yeux, il y a une levrette qui sort de mes orifices.

-C’est plus facile de rentrer dans ta tête que dans ton cul.

-Elle regarde ma bite comme un Mister Freeze quand il fait 45°, elle a qu’une envie c’est de la sucer, qu’il reste rien.

-On a la poudre de perlimpinpin qui sort de la schneckzer (????)

Épisode 3 :

-(Répondant à quelqu’un qui parle d’une femme qui avait une trace de pneu) : Elle s’est fait rouler dessus ?

-Quand on se regarde on peut pas s’empêcher d’avoir cette électricité qui sort de nos organes génitaux.

-J’ai qu’une envie vraiment c’est d’être un trou et qu’il soit une pioche et qu’il me ratiboise l’orifice.

-T’as trop ton nez dans ma chatte.

Épisode 4 :

-Moi dans la vie, c’est vrai, je suis plutôt une personne grâce suceuse que gracieuse.

-On a la raie qui fait la gouttière.

Épisode 6 :

-J’ai vraiment le cul entre deux chaises, pas la bite dans deux culs, c’est bien ça le problème.

-Je suis excitée comme une pute… une puce !

Épisode 8 :

-(Réplique de la candidate trans) Ta sirène est sur le bateau, même si on lui a coupé la queue !

-(À propos d’une candidate nommée Kara) Dans Pokemon il y a Carapuce, dans la villa il y a Kara pute.

Épisode 9 :

-C’est vraiment la caserne d’Ali Babouin. (Expression employée au premier degré)

Voilà, vivement la saison 2 !