Histoire(s) du cinéma est une oeuvre à part, définitivement hors du temps et de l'espace cinématographique. Godard invente une nouvelle forme qu'il fera sienne jusqu'à la fin de sa carrière. À travers cette réalisation il présente l'histoire, son histoire, ces histoires, le souvenir, son souvenir, ces souvenirs, du cinéma.
Juxtapositions d'images, entremêlements de sons, superpositions des touts, JLG nous fait parvenir un écho lointain venant du fond des premiers âges du cinéma, de l'art et de l'histoire. Nous sommes plongés dans un bain culturel inextricable où les références se répondent et s'interpellent et convoquent en nous le sentiment qu'Histoire(s) du cinéma sonde notre dedans et notre dehors, transcendés par l'histoire nous faisons partis du tout.
Aujourd'hui art industriel capitalistique JLG nous rappelle que ce ne fut pas toujours le cas, le regard de Marie dans L'Évangile selon Saint Matthieu, la torture de l'ingénieur dans Rome Ville Ouverte, Le regard de James Stewart dans Fenêtre sur Cours, La chanson de Carette dans La Grande Illusion, ces images communes projetées sur une toile de fond collective constituent une des spécificité de l'art cinématographique, ils est plus grand que les autres histoires car il se projette lui-même. Mais son pouvoir divin a forgé la société à son image, cinéma de divertissement pour un monde de consommation, se rappeler que ce sont des marchands qui nous vendent des rêves, et nous avons préféré ces rêves à la réalité.
Qu'avons nous fait de cet art ? Lui qui avait le pouvoir d'écrire et de montrer l'histoire, "Nous n'avons pas filmé les camps de concentration", nous en avons fait une distraction et nous l'avons vidé de sa capacité reproductrice de réalité (où du moins les Yankees dans un premier temps...) "Le cinéma ne fait pas parti de l'industrie de la communication ni de celle du spectacle mais de l'industrie des cosmétiques, de l'industrie des masques", et ces masques sont devenus nôtres.
Des histoires nous en avons raconté, si bien que plus personne ne croit au cinéma "ce colporteur c'était le cinéma", nous avons renoncé à sa vérité. Alors reste à ce dire que nous n'avons pas mis en lumière ce qu'il fallait, qu'un temps a été obscurcit mais qu'un nouveau reste a éclairer.
Laissez vous éblouir par l'orage Histoire(s) du cinéma.