La série Hostage mêle à la fois jeu politique, géopolitique et réactions face à des situations de crise (prise d'otage et scandale sexuel) et lutte contre le terrorisme. Je suis une personne cliente de ce type de série. Mais je le dis de suite, j'ai dû me forcer à la finir tant l'écriture était nulle.
La série va d'un rebondissement prévisible à un autre tout en dépeignant un monde social et politique inexistant.
Ce sentiment m'a pris-e directement, dès le début avec Médecins Sans Frontières qui administre des vaccins en Guyane Française, ce que l'association a démenti avoir déjà fait car il s'agit du territoire français, même si ultra-marin, et donc qu'il s'agit tout simplement de prérogatives françaises nationales. A savoir qu'il y a en effet une sous-vaccination générale en Guyane pour un ensemble de raisons complexes que je ne vais pas développer. Mais il y une forte vaccination contre la fièvre jaune. Bref déjà pour la cohérence ça part mal.
Mais la suite va être de mal en pis, avec une première ministre qui ne démissionne pas quand son mari est pris en otage, comme si c'était crédible. Même le président de la république US joué par Bill Pullman dans Independance Day dans son avion de chasse face aux aliens paraît plus crédible. J'ai conscience que dans les pays nordiques d'Europe cela pourrait se passer ainsi, mais c'est là que la série est totalement hors de propos : nous ne sommes pas dans Borgen et au Danemark où dans les faits la découverte de la corruption en politique a des effets directs et immédiats, où on démissionne pour avoir payé un restaurant à quelqu'un de sa famille avec sa carte bancaire d'élu-e.
Dans la série les services de renseignements sont aux abois dans un monde pourtant hyper-connecté. Alors, certes, au moins on ne tombe pas dans l'excès inverse de l'information facile d'accès qu'on voit souvent dans les productions catastrophes et de prises d'otage. Mais il y avait sûrement un juste milieu à trouver dans l'écriture sur cela.
La série tente de nous faire ressentir de l'empathie pour des dirigeantes qui d'un coup se découvrent une éthique quand il s'agit de leurs propres familles et intérêts qui sont en jeu. Les populations sont dépeintes souvent comme bêtes et assoiffées de vengeance, avec des prises de décision politiques ubuesques.
Oui, la peur du terrorisme est utilisée par l'extrême-droite pour faire son beurre ; et oui ces personnes en profitent pour agiter la société et faire avancer leur agenda politique. MAIS, croire que la population serait ainsi manipulable et surtout si peu critique envers une personne dont on menace de tuer le mari, puis de la tuer, excusez-moi, mais c'est un véritable crachat dans notre figure, à notre intelligence. C'est à mon sens une tentative vaine de faire passer le peuple pour des idiot-es, pour justifier des décisions politiques sécuritaires au détriment du peuple, en arguant que c'est pour notre bien mais qu'on ne le sait pas, qu'on n'a pas toutes les cartes en main.
Ici on est face à une série où l'institution politique ne serait qu'un outil neutre et pas un système total extrêmement complexe. C'est un anti House of Cards, en cela que HOC dépeint la politique comme un enchevêtrement de très nombreux sous-systèmes tentaculaires si complexes que toucher un rouage c'est en faire bouger nécessairement d'autres et que les choix politiques éclairés (au sens de la connaissance de la réalité) sont des choix dont on connaît peu toutes les répercussions mais dont certaines sont prévisibles. Dans Hostage on prend la décision de sauver des otages et, pouf, ielles sont sauvé-es ! On prend la décision d'avoir des médicaments par la France et, pouf, c'est bon on les a, sans qu'à aucun moment on ne fasse intervenir le monde pharmaceutique et ses nombreux lobbys ! (attention, pas de pensée Big Pharma dans mon propos, mais une description de la réalité de l'existence de groupes de pression et de lobby sur ces sujets, qui ont pignon sur rue et beaucoup de pouvoir) C'est juste ubuesque, ça n'existe dans aucune réalité, pas même dans les pays les moins corrompus au monde.
Et je reviens sur les services de renseignement, mais sérieusement y'a plusieurs moments je me suis dit-e : "Mais d'où on ne fait pas appel à son service de renseignement quand on trouve un ordinateur avec des preuves DIRECT ?". Si encore les protagonistes étaient dans un endroit paumé du monde, et du coup n'avait pas accès à ceux-ci... Mais là ça se passe directement à Downing Street !! (le lieu du pouvoir exécutif au Royaume-Uni) Et étant donné qu'il est dit que la PM anglaise a baissé les budgets de l'armée, je me demande à quel point l'écriture n'a pas été de vouloir qu'on pense qu'on a besoin de surveiller tout le monde puisque le danger peut venir de partout. Alors que - bon sang !- il y a un MONDE entre le tout-sécuritaire et l'absence totale de surveillance. Et puis tout y est la faute du vilain complot interne dont personne n'avait connaissance dans l'entourage proche ni de la PM anglaise, ni de la présidente française (à part les personnes qui ont trahies) et le vilain terroriste qui utilise son vrai nom. Il y avait pourtant matière à faire autour de la collusion entre les armées et leurs généraux et les mouvements d'extrême-droite. Mais là le général avoue tout en étant fâché face à une PM démise de ses fonctions. Bref c'est un échec.
Bref la série est bête, manichéenne et complètement coupée du réel et le jeu d'acteur ne rattrape pas le tout. C'est un sous-Borgen très loin de la finesse de cette dernière dans les relations des personnalités détenant le pouvoir, et du jeu entre vie publique et privée et tout ce qu'il y a entre les deux.