Cette série est une bouffée d'air frais, au parfum délicat et complexe. Sa direction artistique audacieuse et originale se marie parfaitement à l'intrigue et à l'ambiance mystérieuse et spirituelle. Mononoke suit un apothicaire chasseur de démons, et fait honneur au folklore japonais ainsi qu'à l'art de l’estampe. On y retrouve la collusion entre le monde des humains et celui des esprits, qui s'entremêlent là où la folie des hommes prévaut.
Clairement, l’anime ne parlera pas aux amateurs d'action, de rythme soutenu ou même de romance. Les personnages sont fascinants par leur complexité, et la série joue davantage sur le terrain poétique et contemplatif. Elle m’a rappelé la série xxxHolic du studio CLAMP, non seulement par sa relation aux esprits, jamais manichéenne, mais aussi par la posture calme et détachée de son personnage principal. L’apothicaire parle peu mais observe beaucoup. Il impose un rythme lent, suspendu, qui force la vérité des choses à remonter lentement à la surface. Ce rythme déstabilisant donne une certaine crédibilité aux personnages, que l’on voit poussés dans leurs retranchements, contraints d’avouer bribe par bribe ce qu’ils cachaient aux autres… voire à eux-mêmes.
Chaque arc narratif suit à peu près le même schéma, ce qui pourrait paraître redondant. Mais la série étant courte, cela ne pose pas de problème. Et cette répétition est largement compensée par la richesse visuelle et l’audace de la réalisation. C’est là que Mononoke tire clairement son épingle du jeu. Outre les références visuelles aux Ukiyo-e (les fameuses estampes japonaises), on peut y retrouver une forme de foisonnement digne de Jérôme Bosch : chaque plan déborde d’éléments, de motifs, de détails. Des symboles cachés en arrière-plan, des modifications discrètes des estampes sur les murs, un travail de texture et de profondeur rarement vu en animation.
C’est aussi cette liberté formelle qui frappe : on pense à The Night is Short, Walk On Girl de Masaaki Yuasa, dans cette capacité à tordre l’espace, à faire cohabiter l’ultra-réalisme et l’onirisme, à faire d’un plan un tableau mouvant. Il est toujours réjouissant d’être devant une série qui s’offre une grande liberté esthétique tout en conservant un sens du détail extrême.
Déroutant au début, Mononoke vous happe lentement… puis vous hypnotise.