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Mercredi 14 mai, minuit cinq. Je viens de m'envoyer la moitié de la saison 3 de My Little Pony. My Little Pony (MLP dans la suite du texte), c'est ma série du moment, avec différents podcasts et Game of Thrones ; je rattrape à grand galop mon retard dans cette série.

A ces mots, le lecteur de cette critique eut un mouvement de recul, soulevant l'un de ses sourcils d'un air suspicieux. Toutefois, il continua sa lecture.

MLP, c'est l'histoire de Twilght Sparkle, élève et protégée de la Princesse Célestia que cette dernière envoie à Ponyville pour apprendre à se faire des amies. Elle y rencontrera bien vite Rainbow Dash (la sportive au tempérament fougueux), Rarity (la licorne couturière précieuse mais généreuse), Flutershy (la timide amie des animaux), Applejack (la besogneuse à l'accent paysan n'hésitant pas à se salir les sabots), et... Pinkie Pie (le truc rose tout le temps de bonne humeur qui sautille partout) avec qui elle se liera rapidement d'amitié. Et cette amitié, c'est le thème de la série.

« Ce mec est-il vraiment fan de Game of Thrones ? Vraiment ? » Au plus le lecteur avançait dans sa lecture, au plus l'inquiétude montait en lui. « Encore l'un de ces tarés de bronies, hein ? Ça promet ! »

C'est vrai, dit comme ça, c'est pas gagné, d'autant plus que la série n'est pas à son coup d'essai. Cette génération est la quatrième. Pour faire simple, chacune des génération a pour but de vendre la gamme de figurines allant avec. Oui je sais, monde de merde. Mais restez, je n'ai pas fini ! Bien que le but de la série soit à la base vil et mercantile, chacune des générations avait ses spécificités. La première a planté le décor « fantasy », quelques principes et quelques personnage... qui évolueront beaucoup, rassurez-vous. Cette série était dédiée aux petites filles. La seconde saison, c'est les poneys, et ils vivent dans une ville normale, et ils vont à l'école, et...

« C'est certain, ce mec se drogue. Dès que j'ai fini la lecture, je passe le lien à la brigade des stupéfiants. Et celle des mœurs, ça parlerait zoophilie en plein milieu que ça ne m'étonnerait pas ! »

… je n'en dirai pas plus, j'ai failli pensé à me pendre que j'ai appris l'abomination que c'était. La troisième revient dans un univers plus poney, mieux animé, avec l'arrivée de Rainbow Dash (qui à l'époque était la modasse du troupeau. Oui, moi aussi ça me fait mal), et toujours les leçons de morale. Le souci ? C'est qu'à ce moment, ils ont vraiment pris les petites filles pour des êtres naïfs, génétiquement prédisposés à ne faire que des trucs girly ET crétins. Vraiment.

Et c'est dans cet océan de merde qu'arrive la quatrième génération de MLP. Est-ce que c'est toujours destiné aux petites filles ? Oui. Est-ce que ça a toujours une morale à inculquer ? Aussi. Est-ce qu'il y a encore des chansons. Oui, plein, même. Et pourtant cette série et géniale.

Le lecteur s'éloigna de son écran, et revint avec un verre dans une main et une bouteille d'un breuvage alcoolisé quelconque. Tant qu'à lire texte aussi tordu, autant en faire un jeu à boire... en espérant que ça ne finisse pas en cirrhose.

Pourquoi ? Parce que la responsable de cette série, c'est Lauren Faust (qui a déjà bossé sur des séries comme « Le laboratoire de Dexter » ou « Les Super-Nanas ») et que Lauren, elle prend son boulot à cœur. Aussi, bien qu'elle doive composer avec un cahier de charges ressemblant de prime abord à l'inventaire de ce qui a fait des autres générations un truc idiot au possible, elle arrive à faire une série destinée dans un premier temps aux petites filles, mais sans les considérer comme génétiquement prédisposées à certaines tâches et des connes.

Et aussi, Lauren a eu la bonne idée d'utiliser un outil particulier pour créer sa série : internet, histoire d'avoir un feedback de la part des fans. Et là opéra d'après ma théorie un miracle : les petites filles n'ont pas grandi avec le laboratoire de Dexter ou les Super-Nanas. Les jeunes adultes, eux, oui. Et il me semble pas impossible que ces derniers aient remarqué les similitudes dans le traitement entre MLP et les dessins animés de leur enfance. Et qui dit dialogue entre ces gars et Lauren Faust dit fan-service de malade. Et si la série vise toujours en premier lieu les petite filles, les grands garçons sont plus nombreux à suivre cette série que les petites filles.

Une demi-bouteille était déjà vidée. Le lecteur, voyant le texte se dédoubler ne put réprimer le rot sonore qui se fit entendre « J'en étais sûr ! Il ne parle peut-être pas d'entre-jambes d'équidés, mais bien de petites filles ! Je me disais bien que je devais continuer cette lecture ! Ce gars finira au trou ! » Et sur ces mots, il fut remis d'aplomb pour déceler tous les éléments tordus qu'il pourrait encore trouver.

Déjà, l'animation est moderne, fluide et dynamique. Le dessin est excellent et les personnages bien typés. Chacun d'entre eux a son caractère propre, et les interactions entre nos poneys sont bien plus complexes que le concentré de couleurs criardes qu'est cette série pourrait le faire croire. Enfin, il reste à parler des histoires. Si les intrigues restent simple et la construction des épisodes ne varie pas ou peu, tout cela est fait avec intelligence et la morale n'est pas un espèce de deus ex machina ni lourdingue : pas question de donner des leçons, mais bien de souligner des évidences.

Et là où tout le génie est atteint, c'est que MLP, bah il poutre sa mère aux constructions gendrées.

Le lecteur tressaillit. « Un libertaire voulant la fin de l'occident par l'obligation de la pédérastie ! Je le savais ! Encore un de ces dégénérés qui pense qu'hommes et femmes sont équivalent malgré leurs différences ! Ça cachait bien quelque chose ! ».

Analysons : nos poneys ont chacun une profession particulière, des aspirations ou valeurs personnelles. Certains ont des professions « masculines » (Rainbow Dash la sportive, Twilight Sparkle la savante, Apple Jack la fermière) et d'autres féminines (Flutershy s'occupe des animaux, Rarity fait de la couture et Pinkie Pie travaille/vit avec les pâtissiers de Ponyville), mais ça n'empêche que chacun de ces poneys, malgré ses inclinaisons et préférences n'es PAS une putain de caricature : Apple Jack n'est pas montrée comme une brute vulgaire ou Rarity n'est pas faible et sans défense fasse à l'adversité, elle sait utiliser d'autres aptitudes que les capacités physiques pour s'en sortir.

Les professions et activités sont aussi montrées sous un angle honnête et positif. Twilight Sparkle passe certes beaucoup de temps à bosser ses sorts et ses livres, elle en est pas moins un personnage sociable et vif d'esprit, tandis que Rarity est montrée comme un poney travailleur, créatif et mettant beaucoup de cœur à l'ouvrage.

Les histoires quant à elles, bien que traiter légèrement et avec bonne humeur passent en revue un large panel de thématiques, parfois assez dures comme le harcèlement scolaire ou moins attendues comme une critique bien sentie des séminaires-coaching comme nos amis Américains en raffolent.
C'est ça pour moi la principale force de la série (en plus de ses personnages attachants et de la « Lauren Faust Toutch ») avoir su faire une série qui s'adresse à tout le monde, parlant d'un vaste éventail de problèmes que tous ont vécu ou vivront probablement.

Enfin, cette série ne donne pas une image grotesque, nunuche et caricaturée de la féminité des activités s'y rapportant, parce que non, il semble que pour Helen Faust, être une femme n'est pas une tare. Oui, on peut être femme et faire des trucs féminins sans être une conne superficielle.

Le lecteur n'en pouvait plus : si son calvaire était presque fini, il restait toute fois un dernier paragraphe à lire. En aurait-il la force ? Il ne savait pas le dire. Cette série et cette critique détruisaient son monde tellement stable avec tous ses petits clichés réducteurs sur les hommes et les femmes.

Pour terminer, je ne parlerai pas des bronies et du fandom ainsi que ce que j'en pense. Ces questions là sont secondaires et je m'intéresse avant tout à la série. La dernière chose à dire et que si elle plaît à autant de gars, c'est peut-être aussi que eux aussi, malgré ce que leur inculque la société, aiment bien quelque part de la douceur, joie de vivre et couleurs vives, et que cette série est l'une des rares à en proposer sans le cacher. Pas que des séries comme Mad Men ou Game of Thrones soient mauvaises (LOIN de moi cette idée!), mais si c'est la seule offre pensée (d'abord, je crois) pour des hommes, ça en dit long sur la manière dont on les perçoit.

Alors oui, je le dis clairement, moi j'aime bien voir des poneys prendre le thé, manger des gâteaux et vivre des aventures sans devoir tuer des dizaines de personne pour s'amuser. Ça change du climat ambiant, bordel !

Qu'est-ce que je peux vous conseiller ? Franchement, essayez, et libres à vous de ne pas aimer. Mais essayez avant de critiquer, et qui sait, peut-être que vois allez aimer !

Le lecteur se réveilla dans une chambre d'hôpital. A sa question, l'infirmière répondit qu'il était resté dans le coma durant une semaine après une sévère crise d 'épilepsie.

« - Mais c'est fini, monsieur Zemmour, le médecin a dit que vous pourrez quitter l'hôpital demain !

- Pas trop tôt ! J'ai une chronique à écrire sur ce nouveau péril pour la jeunesse qu'est Mon Petit Poney !

- Vous connaissez Friendship Is Magic ? Mon copain et moi adorons ! »

Et c'est ainsi que le séjour d'Éric Zemmour se prolongea de deux semaines aux soins intensifs. La légende ne dit pas si on lui fit regarder MLP de force ou non, mais une chsoe est certaine, cette série apportait bien trop pour sa vision étriquée du monde.
Pinto
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le 14 mai 2014

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Pinto

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