One Outs
7.6
One Outs

Anime (mangas) NTV (2008)

Non, je ne force pas le trait avec un pareil titre ; car en dehors de la coupe de cheveux et l'absence de proéminence nasale : aucun élément ne permet de distinguer Akagi de Tokuchi. La même arrogance, la même assurance, le même calme olympien qui, à aucun moment, ne sera même que vaguement ébranlé ; absolument aucune différence. On aura même poussé le vice jusqu'à lui attribuer le même Seiyû japonais dont le timbre de voix se veut exactement le même pour les deux personnages.


Pour ceux qui ignoreraient qui est Akagi, il s'agit d'une création de Nobuyuki Fukumoto, un personnage retors et astucieux qui appliquera son génie démentiel à remporter des parties de Mahjong sans jamais être mis en difficulté à une étape ou une autre de son périple.
One Outs, c'est Akagi qui se lasse du Mahjong pour se lancer dans le baseball sous un autre nom.


Tokuchi servira certainement d'inspiration au personnage d'Hiruma (Eyeshield 21). Ne serait-ce déjà qu'au niveau de l'apparence et du penchant naturel pour les stratégies inattendues et machiavéliques dans un cadre sportif. En un sens, Eyeshield 21 a su magnifier le personnage de Tokuchi qui, ici, exploité dans One Outs, se présente comme un monument d'apathie ne suscitant aucune autre réaction que l'exaspération du spectateur à son endroit. Et cela, à un point où en vient à souhaiter la victoire de l'équipe adverse tant sa suffisance le rend antipathique. On n'a qu'une seule envie, c'est le voir enfin chuter et payer sa foutue impertinence.
Savoir créer un antagoniste capable de susciter l'ire et la colère des lecteurs/spectateurs est en soi un tour de force remarquablement accompli ; le souci étant ici que Tokuchi se trouve être le personnage principal. Et pour avoir déjà lu du Shinobu Kaitani, je doute que nous faire détester le protagoniste de son œuvre soit voulu.
Mettre en scène un personnage principal cool (et j'écris ce mot avec tout le mépris et le dédain que cela comporte) est un travers qu'ont certains auteurs s'imaginant qu'un protagoniste parfait ne peut que plaire - perfection oblige. Or, c'est la faillibilité d'un personnage qui constitue son intérêt plus que ses qualités sans cesse déballées sans contre-coup. Dès lors où l'on sait que l'hypothèse de défaite est envisageable, tension il y a, l'enjeu n'en est que plus savoureux. Avec One Outs, la question n'est plus de savoir si les Lycaons (équipe à laquelle appartient Tokuchi) vont remporter ou non la partie, mais comment vont-ils gagner.


Pourtant, il y avait vraiment de quoi créer une tension suffocante à nous en faire nous ronger les ongles jusqu'au sang. Car en plus de devoir remporter une victoire sur l'équipe adverse (victoire dont il sera à chaque fois l'unique artisan bien que le baseball se veut un sport d'équipe), Tokuchi se lance dans une lutte avec le propriétaire de l'équipe, s'engageant chaque fois dans un pari plus contraignant où il a énormément à perdre (sur la fin, il sera question de milliards de yens de pariés).
Des paris qui relèvent du délice. Les conditions sont parfois dissimulées, tortueuses, nécessitent de faire preuve d'encore plus d'adresse au cours de la partie et le propriétaire des Lycaons ne rebute pas à employer les moyens les plus vils pour saborder sa propre équipe. Seulement... Tokuchi ne perd pas. Cela se veut une constante universelle qui ne sera jamais remise en question à aucun moment. Ce qui aurait pu être savoureux devient fade par ce simple théorème.
Peu importe que le propriétaire ait piégé Tokuchi dans une souricière inextricable puisque l'on sait que ce dernier en sortira malgré tout indemne.


Baseball, sport d'équipe précisais-je plus tôt. Oubliez ça. Chaque joueur se veut une pièce d'échiquier que Tokuchi fait se déplacer selon sa stratégie du moment. Aucune place à l'initiative ou à un quart d'heure de célébrité pour ses compères (dont seuls deux autres personnages seront véritablement exploités et vaguement développés sur les dix autres joueurs). Le manager se retrouve impuissant face à lui et lui mange dans la main bien assez tôt. On a compris, Tokuchi est trop fort...


Ce défaut du manga, qui ne tient pas à grand chose mais qui s'avère bien assez pour pourrir en grande partie l'expérience de l'œuvre ne se retrouvait pas par exemple dans Liar Game, l'autre œuvre psychologique phare de Shinobu Kaitani. Le doute était permis quant à m'échec probable du protagoniste du fait de la présence de certains adversaires tenaces. Je ne m'explique pas cette erreur quant au caractère du personnage de One Outs.


Cet impair - conséquent - mis de côté, les parties de Baseball sont vraiment prenantes. N'étant pas particulièrement érudit concernant les règles du jeu, je n'ai pas manqué d'être surpris par les initiatives de Tokuchi pour se jouer de ces dernières et les tourner constamment à son avantage. La stratégie et la réflexion pour parvenir aux astuces les plus abouties ne relèvent pas juste de la facilité scénaristique ; Kaitani a de la ressource et nous en fait pleinement profiter. Les tactiques les plus invraisemblables sont constamment mises en œuvres et l'on comprend alors pourquoi les auteurs d'Eyeshield 21 se sont inspirés de Tokuchi pour élaborer le personnage stratège de leur équipe. Car si le personnage principal se veut présentement insupportable de perfection et d'arrogance, force est de constater qu'il a les moyens de sa prétention.
Il n'est pas le plus fort, il est le plus malin. Et de loin. Jamais je n'aurais soupçonné qu'on puisse sortir ne serait-ce qu'une seule tactique astucieuse d'un jeu dont je n'avais pas considéré le potentiel stratégique. Kaitani ne s'est pas borné à une seule. Loin de là. L'ingéniosité prolifique de cet auteur ne cessera jamais de m'estomaquer.


Ce n'est certes pas à la hauteur de Liar Game en qualité stratégique, mais il faut avouer qu'avec son autre manga fleuve, l'auteur avait déjà mis la barre très haute. Trop en tout cas pour être un jour surpassée. One Outs n'est néanmoins pas en reste en comparaison.


J'ai opté pour la version animée pour la qualité des dessins très au-dessus de ce qui se fait en version manga. Le spectacle ne fait que gagner en excellence. La musique demeurera néanmoins très anecdotique. Aucun thème marquant à répertorier.


Certes, dans l'idée, c'est du Akagi avec une batte de baseball, mais c'est du Akagi à la puissance cinq en terme d'élaboration d'astuces. Les amateurs du genre psychologique et stratégique n'auront aucun mal à y trouver leur compte. Ceux qui en attendent plus de la construction des personnages grinceront en revanche un peu des dents.

Josselin-B
6
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le 13 nov. 2019

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Josselin Bigaut

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