La première saison de Squid Game aurait pu se suffire à elle-seule si les scénaristes avaient choisi la facilité du "happy-end". Leur intelligence aura été d’explorer plus loin les ramifications de l’organisation et de proposer une deuxième saison prenant le contre-pied de la première en justifiant cette continuité par la détermination vengeresse de Gi-hun de nuire à ceux qui se sont joués de la vie de ses anciens partenaires. Cette saison débute par un triptyque d’épisodes en "extérieurs" dont un des points d’orgue est la confrontation du héros avec l’énigmatique recruteur (le "gifleur" qui avait marqué la première saison le temps d’une seule scène) que l’on découvre effrayant dans son obstination à respecter les "règles", tout aussi absurdes soient-elles, et dans l’importance qu’il octroit au jeu de la roulette russe par rapport à la valeur de sa propre vie (en ce sens, la folie du personnage, terriblement retranscrite par l’acteur Gong Yoo, fait un peu penser à celle d’un Joker).
Pour le reste, Squid Game saison 2 a le mérite de nous proposer le point de vue inverse, celui des gêoliers, assassins (l’ambivalente nord-coréenne Kang No-eul) et autres organisateurs du Jeu. Cela donne lieu à un rebondissement à mi-saison, intéressant dans le sens où il rapproche le héros et le bad guy en chef dans un antagonisme silencieux prenant les atours d’une fausse amitié/collaboration.
Gi-hun se verra ainsi longtemps devancer par l’Organisateur, lequel semble se questionner, fasciné par l’idéal d’humanité du héros. Aussi l’infiltration de l’Organisateur dans le Jeu à la fin de l’épisode 3 peut paraître incohérente tant elle suppose qu’il ait pu se préparer à temps pour intégrer la partie et subodorer que son vote serait déterminant. Cela demandera donc au spectateur un minimum de suspension d’incrédulité.
Son infiltration lors de la partie en tout cas se voit justifiée par sa réaction lorsque, en fin de première saison, il semble s’étonner derrière son écran de la bonté d’âme de Gi-hun qui épargne la vie de son adversaire. Comme si pour lui (autant que pour le vieux Directeur Oh Il-nam), l’humain ne pouvait être bon par nature seulement que par intérêt. Comme si la vie humaine en ce bas monde n’avait de valeur qu’en fonction du statut de chacun, de son argent ou de son utilité. Ce qui sera illustré par le "pari du sans-abri" en toute fin de première saison ou, plus tard, par le "second" numéro 222 de la troisième saison. Dès lors, l’Organisateur semblera nourrir un objectif, essayer de corrompre l’âme de Gi-hun comme la sienne a été corrompue. Impitoyable pour des raisons qui sont les siennes, l’Organisateur est un homme habité par le vide et qui semble envier le courage de Gi-hun. Toute la question est de savoir si le cliffhanger final de cette saison 2 aura raison des valeurs morales de ce dernier.