Cohle of Cthulhu
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le 16 mars 2014
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La première Saison de TRUE DETCTIVE m'a paru "affectée" et régulièrement complaisante, hermétique le plus souvent et auteurisante... trop auteurisante.
"Hermétique" au sens où sa forme est très rebutante, compliquée sciemment par des flashbacks de flashbacks de flashbacks, émaillés de longs (interminables) monologues tantôt drôles, tantôt abscons mais parfois bien inutiles.
"Auteurisante" car la mainmise totale du créateur-scénariste Nic Pizzolatto et du réalisateur (aujourd'hui controversé) Cary Joji Fukunaga (réalisateur de l’intégralité des épisodes formant la Saison), ne fait aucun doute. Les deux compères ne font aucune concession, ne sont prêts à aucune compromission, au point que certains passages donnent l'effet de "doigt d'honneur" géant, qu'un producteur/financeur plus intrusif aurait peut-être pu façonner ou, en tout cas, "diluer" quelque peu.
Seulement, les 2 acteurs principaux, la photographie, la mise en scène, l'ambiance sonore (un bijou), l'écriture de tous les personnages et leur interprétation, le script intégral qui évoque TEXAS KILLING FIELDS (meilleur qu'on ne l'a dit), tout est tellement parfait qu'il paraît impossible de trop la dénigrer ou de lui en tenir rigueur plus que de raison. Les choix sont forts, possiblement excluants pour certains, mais rien que pour la direction et le cap gardé coûte que coûte, la force de son concept, sa radicalité, le projet dans sa globalité reste d'autant plus intéressant qu'il est rare, donc précieux.
La Saison 2 change totalement de direction. Le concept reste à peu près identique mais l'angle d'attaque n'a plus rien à voir.
Comme si le 'Showrunner' reprenait la main sur son bébé. Le réalisateur est parti, chaque épisode sera dorénavant confié à des réalisateurs différents (pas forcément toujours pour le meilleur cela dit) et c'est comme si Nic Pizzolatto se faisait un 'ego trip' en mode "Moi aussi je peux faire CHINATOWN", version James Ellroy et 'Soap Opera' ultra-classique, au sens très "Série policière américaine", mais qu'il s'était en plus fixé l'objectif de faire la meilleure version possible, avec pour contrainte d'égrainer TOUS les "passages obligés" de ce type d'histoire (certains parlent de clichés mais c'est un raccourci trop facile) et tous les archétypes de personnages que l'on croise dans les Films noirs.
Le résultat fonctionne (encore une fois) grâce à l'écriture des personnages (on peut dire ce que l'on veut, Pizzolatto emprunte ce qu'il faut où il faut ; en ce sens, son talent est indéniable), leur variété, leur nombre et donc la quantité d'acteurs incroyables qui les incarnent.
L'ambiance sonore n'est pas en reste. Elle est aussi soignée que dans la première Saison. Les passages musicaux dans le bar hanté par Colin Farrell, qui scandent le script et qui sont délivrés par Lera Lynn contribuent à distiller une atmosphère Lynchienne façon Julee Cruise, vraiment pas pour déplaire.
La force de la Saison 2 vient aussi de certains passages de mise en scène, absolument bluffants "pour une Série" et qui paraissent moins "m'as-tu vu" que dans la première Saison, moins complaisants. D'autant plus que ces passages de mise en scène pure articulent, façonnent même, la Saison dans ses moments-clés (on pense évidemment énormément à Michael Mann) contrairement à ceux qui émaillaient la première Saison et qui ne visaient qu'à rendre intéressant les épisodes les plus faibles voire les passages inutiles / vains de l'histoire. L'arc narratif sur les motards se révèle inutile avec le recul mais sa mise en scène a probablement contribué à l'Emmy qu'on a attribué à cette première Saison avec son "fameux" plan-séquence, creux et "m'as-tu-vu" de 6 minutes, concluant le quatrième épisode.
Toujours est-il qu'il y a moins de "gras" ici et moins de longueurs, aussi.
La troisième Saison prend encore une fois une toute autre direction.
La première Saison nous conviait à une chasse au tueur en série classique, quand la deuxième explorait la corruption et les collusions des sphères politiques, policières et criminelles. Dans la troisième Saison, le 'Showrunner' s'intéresse aux enquêtes policières non classées concernant les disparitions et les morts d'enfants en suivant, sur 3 époques différentes, les 2 policiers chargés de l'enquête, leurs familles et les habitants d'une ville impactée par le mystère entourant la disparition d'une fillette et la mort de son frère.
L'étude de personnages est absolument dingue. Les 2 acteurs principaux sont exceptionnels. Ils jouent leur personnage sur les 3 époques. Les maquillages, les postiches et les postures sont convaincants. La science du montage et de la narration dont fait à nouveau preuve le 'Showrunner' Nic Pizzolatto est littéralement incroyable. Certains passages foutent les poils, d'autres donnent envie de hurler, d'autres encore, de chialer, certaines répliques font beaucoup rire et tous les personnages sont écrits avec intelligence, en plus d'être parfaitement interprétés. On pense énormément au cinéma d'Atom Egoyan (à EXOTICA, REMEMBER et CAPTIVES surtout, comme une synthèse des trois) et aux écrits de Russell Banks et donc forcément au sublime DE BEAUX LENDEMAINS. Vraiment, c'est une formidable étude de personnages et la somme des thématiques abordées est impressionnante "pour une Série".
Je ne suis qu'aux prémices de la Saison 4...
Pour le moment, tout ce que je peux dire, c'est que le 'Showrunner' Nic Pizzolatto s'est effacé pour ne rester "que" producteur. Les rênes sont dorénavant exclusivement aux mains d'une scénariste-réalisatrice mexicaine, Issa López qui me semble fascinée (je n'ai vu que 2 de ses films mais on sent les connexions) par les fantômes, au sens large, et les récits à la lisière du fantastique.
Les personnages sont encore une fois très bien écrits et parfaitement interprétés. Les effets sont un plus "chocs", tant dans l'humour que dans le gore ; l'époque veut ça, j'imagine, mais la narration est une nouvelle fois de très haute volée et la photographie est sublime. En plus, l'histoire se déroule en Alaska, endroit fascinant s'il en est, propice à tous les mystères et ultra-cinégénique (ou Série-génique en l’occurrence).
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Créée
le 6 juil. 2025
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