Anges … et démons ? Earth, pionniers du drone-doom, a toujours su jouer sur l’esthétique ésotérico-occulte, mêlant mélancolie et nature sauvage, approche amorcée en tout cas depuis le renouveau du groupe au milieu des années 2000 et ce détonant post-rock/country minimaliste et panoramique.


Et cet album ne déroge pas à la règle, il en est même la quintessence, de ce fait qu’il est de nature particulièrement introverti, contrairement au premier volume (sortie l’année précédente) qui était beaucoup plus « ouvert » et percutant, ici on a à faire à quelque chose de quasi-autistique.


Pourtant, les sessions devaient être les mêmes, ou en tout cas extrêmement rapprochées (comme Metallica l’avait fait à l’époque avec Load et Reload, pour prendre un exemple connu), et avec le même line-up ; dont le violoncelle lancinant et mélancolique de Lori Goldston, qui est clairement la pierre angulaire de cette approche artistique prise ici sur ces deux occurrences, renforçant son aspect mélancolique.


Le « drone » ici, c’est lui.


La guitare de Dylan Carlson y est timide, effacée mais envoûtante. Elle chuchote. Tout le monde chuchote en fin de compte. Comme si tous expérimentaient ici une retraite, et oubliés de tous.


Sigil Of Brass ouvre l’album.


C’est un morceau d’introduction, assez court (3 minutes) constitué d’arpèges et d’accords minimalistes, accompagnés par cette nappe de violoncelle qui se manifeste épisodiquement, comme hésitante à prendre la parole.


His Teeth Old Brightly Shine démarre sur une série de strumming au violoncelle accompagné par quelques mélodies à la guitare, également accompagné d’arpèges. Le rythme est excessivement lent, et la batterie, tout comme sur le premier morceau, est ici complètement absente, renforçant son aspect méditatif et épuré.


C’est sur A Multiplicity Of Doors qu’on a l’impression que l’album démarre vraiment. La batterie fait son entrée, dans un tempo outrageusement lent, avec toujours cette espèce de légère imprécision qui malgré tout, en fait son charme.


Le violoncelle pose ses nappes sonores comme le ferait un clavier, avec malgré tout quelques raclements, quelque grognements, laissant apparaître certaines harmoniques presque désagréables et qui amène une certaine tension, légère mais palpable.


C’est aussi le violoncelle qui apporte majoritairement une variété de sons et de situations, là où les autres instruments suivent le même riff sur quasiment tout le morceau. Le violoncelle ici, chante presque. On a le droit également à de magnifiques modulations sur la deuxième partie du morceau.


Sur The Corascene Dog le rythme y est un peu plus lourd. La guitare et le violoncelle se répondent, tandis que la basse tient sa fondamentale avec beaucoup d’assurance. Les percussions semblent être encore plus graves, les « coups » sont lourds et on a l’impression que l’ensemble va lentement décliner pour finalement ne plus rien former, une impression de décélération qui en fait ne survient pas.


Puis on a The Rakehell qui clôture l’album. C’est un morceau singulier, je l’aime beaucoup.


Presque 12 minutes, mais pour un seul riff. Un riff un peu asymétrique qui rentre en tête, terriblement. Plusieurs parties de guitare l’accompagnent et on a un lead qui lui, varie, fluctue, tout le long du morceau.


On est à la fois sur du minimalisme presque pathologique mais en même temps sur quelque chose de terriblement addictif et d’iconique, c’est vraiment très bizarre. Comme une sorte de légère espièglerie sortie de nulle part.


Pour conclure, je dirais que ce Angels Of Darkness, Demons Of Light deuxième du nom nous propose quelque chose de vraiment singulier, bien plus étonnant que le premier volet, par son aspect extrêmement épuré, d’une lenteur provocatrice, quasi mystique et d’une mélancolie malgré tout bien ajustée.


Un étrange voyage, une drôle d’expérience.

lépagneul
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le 16 juil. 2025

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