Les Flaming Lips veulent réenchanter le monde, mais sans le vider de sa noirceur, sans refuser la confrontation avec le morbide. Des Disney modernes et subversifs frottant une fantasmagorie colorée à son pendant cauchemardesque ? sous les pastels, Blanche Neige ou Hansel & Gretel sont après tout des contes traumatiques. Le mythe, la magie et le fantasme sont l'essence même des Flaming Lips. Mais dévoyées par un fondamentalisme crétin, leurs obsessions sont devenues ailleurs une arme, responsable de massacres. At War with the Mystics est une charge virulente contre ce mysticisme fourvoyé. La mort d'une maman, l'utilisation terroriste du mystique : de quoi donner au groupe une envie de révolte, des réflexes primaux, des désirs de rock. Wayne dit d'ailleurs avoir trouvé son inspiration en reprenant War Pigs de Black Sabbath ? les cochons de guerre , pas un hasard. Ne pas s'attendre cependant à des débauches de violence métalleuse, à une incontrôlable tornade électrique : At War with the Mystics est certes plus dur que ses deux prédécesseurs, mais il est surtout, comme eux, un grand album de pop tortueuse, en équilibre acrobatique entre accessibilité immédiate et recherches timbrées. The Yeah Yeah Yeah Song, ouverture de l'album et slogan faussement naïf, ou l'autre protest-song drolatique, Haven't Got a Clue, sont deux petites merveilles extatiques et fières, deux tubes extraordinaires et tordus, à la débilité rigolarde et aux mélodies attrape-tout, entre XTC et Chemical Brothers. The W.A.N.D. ou le très politique Free Radicals tentent une excursion chez un Prince dégénéré, les splendides Vein of Stars et The Sound of Failure mêlent leurs textures mouvantes et leur beauté de classique instantané à des structures en permanente rupture. Le puissant et impressionnant Pompeii Am Gotterdammerung invite à un trip épique et outre-atmosphérique. Un dernier rêve avant le retour sur terre, finalement pas trop déprimant : on sait désormais, grâce aux Flaming Lips, que même les plus brillantes étoiles connaissant la tristesse et la mort. (Inrocks)


Ironiquement, la musique la plus fraîche et la plus jouissive du printemps jamais l'association pop et moderne n'a aussi bien mérité son titre n'est pas jouée par quelques prépubères chevelus à l'étroit dans leurs jeans et leur blog, mais par une bande de quadras américains tirés à quatre épingles, authentiques Scary Monsters de studios aux tempes grisonnantes. Sans revenir sur la magistrale métamorphose artistique opérée par The Flamig Lips avec The Soft Bulletin (1999) et, dans une moindre mesure, Yoshimi Battles The Pink Robots (2002), tous deux en passe d'être réédités en 5.1, il convient de dire que At War With The Mystics est un album pour le moins attendu au tournant. Et qui ne déçoit pas ! Troquant les clins d'oeil appuyés au dub de jadis pour un funk spatial lézardé de riffs rock le groupe cite entre autres joyeusetés Black Sabbath comme réfé-rence de poids et de bruissements électroniques, Wayne Coyne et les siens témoi-gnent avant tout d'une audace musicale digne du héros berlinois David Bowie, l'humeur sautillante en sus (Ashes To Ashes). Car si les Lips empruntent à la guitare de Robert Fripp (Bowie et Eno, donc, King Crimson), c'est pour mieux lui adjoin-dre des harmonies vocales dignes des Beach Boys, nombre de claviers psychédéli-ques (Rhodes, Synth Flute, Vocoder) et une basse énorme, entre autres Diddley beat mâtiné de bleeps saturés. Mais passons sur le détail des nombreux ingrédients pour nous concentrer sur l'alchimie d'un disque sachant ménager ses effets de surprises : jamais vraiment là où on l'attend, le trio ose ici les associations les plus folles sans jamais sacrifier à la cohérence de l'ensemble, au point de (Magic)
Pour les Flaming Lips, le combat continue : après avoir affronté hier les robots roses ("Yoshimi Battles the Pink Robots", 2002), ils partent aujourd'hui en guerre... contre les mystiques. Le groupe américain, poursuivant ses aventures musicales déjantées, nous offre une nouvelle virée dans son univers singulier, fait de bric et de broc, convoquant pêle-mêle B.D. ou science-fiction. Et de fait, on s'y replonge avec délice. L'album s'inscrit dans la droite ligne (brisée) des opus précédents. Au programme, donc : de la pop, de la fantaisie, de l'emphase. La formule générale reste la même : des mélodies accrocheuses, la voix haut perchée de Wayne Coyne, des synthés aux sonorités bizarres, des guitares saturées d'effets, une basse groovy, une batterie bien lourde pour faire décoller l'ensemble, avec, là-dessus, une bonne dose de bruitages absurdes ; le tout, canalisé (une fois encore) avec brio par un Dave Fridman au-delà de tout éloge."At War With the Mystics" se révèle, à l'écoute, d'une efficacité imparable. Les Flaming Lips enchaînent, avec toujours autant de fraîcheur et d'aisance, grandes chansons pop euphorisantes (l'entêtante "The Yeah Yeah Yeah Song"), ballades plus élégiaques (la gracieuse "Vein of Stars") et instrumentales (l'allumée "The Wizard Turns on..."). "Free Radicals" sonne comme du White Stripes sous acide ; la magnifique "Pompeii am Götterdämmerung", immense trip cosmique, nous fait quitter la stratosphère - on n'a pas souvent entendu mieux dans le genre depuis l'"Interstellar Overdrive" du premier Pink Floyd. "Goin' on", moins chamarrée, impressionne tout autant par sa simplicité. Au final, on n'est pas déçu du voyage. Certes, le groupe nous emmène en terrain connu (et conquis). Mais c'est loin d'être une raison suffisante pour bouder son plaisir... Parce que, décidément, les Flaming Lips ne tournent pas en rond. Et parce que plus de vingt ans après leurs débuts, ce "Magical Mystery Tour" le prouve de manière éclatante : ils ont toujours la flamme. (Popnews)
bisca
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le 27 mars 2022

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