Je ne reçois plus jamais de disques en service de presse (sauf une BO de temps à autre). L'autre jour, la poste dépose sur mon bureau un énigmatique CD : pochette gris beigeasse, bande noire, juste ce nom (ou ce titre ?), Great Lake Swimmers, et le nom du label, très frères coenien. Il allait machinalement rejoindre dans la poubelle du service cinéma la ration quotidienne des quelque cent cinquante communiqués de presse inutiles lorsqu'un vieux réflexe atavique et le titre de la première chanson, Moving Pictures Silent Films, me font jouer ce CD auquel je crois très mollement. Et là, le truc dingue : c'est vachement bien ! Qui donc m a envoyé un disque aux Inrocks ? Mystère Seule certitude, c'est un putain de bon disque. Du country-blues livide, mélancolique, glandulaire L'Amérique désenchantée, modeste, timide, comme on l'aime. Des guitares boisées, qu'on croirait jouées au creux de l'oreille. On entend le frottement des doigts sur le nylon des cordes, le moindre coup d'ongle, on sent presque l'odeur de pin de la caisse. Et la voix du chanteur Pas le style à aller bombarder Bagdad ou Bercy, plutôt le genre à se faire latter et traiter de pédé à la sortie d'un banquet de la section texane du Parti républicain. Et à torcher de sacrés titres, comme Moving Pictures Silent Films. Ce disque, c'est le meilleur Neil Young depuis le dernier meilleur Neil Young. C'est Harvest repris par Sparklehorse. Ou Palace essayant d'imiter Rust Never Sleeps. C'est la complainte de jeunes gens fragiles hululant doucement à la lune dans les grands espaces glacés de l'Amérique bushienne. Une bouteille jetée à la mer, que le ressac a amenée jusqu'à mon burlingue, et dont j'accuse ici réception avec émotion et empathie. Vous êtes vaguement écœuré par la profusion MP3 ? Fatigués des hypes hebdomadaires ? Picorez les Great Lake Swimmers : c'est goûteux, léger, 100 % bio, ça passe tout seul, ça nettoie les oreilles et l'esprit. Des disques comme ça, je veux bien en recevoir un par mois. (Inrocks)


Contempler la pochette de ce disque vous en dira sans doute plus à son sujet que ne pourra le faire aucune chronique, celle-ci comprise. Eminemment sobre sous un monochrome pastel, dépouillée, sans artifice, la façade de cet album est aussi confondante de beauté simple, authentique. Et la musique de Tony Dekker, tête pensante et âme bénie de cette formation canadienne, va jusqu’à dépasser les attentes suscitées par les dehors pourtant avantageux de l’album. Ardents défenseurs d’un folk minimaliste gracieux à la manière de leurs concitoyens Hayden, les Great Lake Swimmers vont pourtant bien au-delà du très bon album qu'ont sorti ces derniers en 2002, notamment grâce à l'indéniable tenue mélodique de leurs chansons. Les références les plus prestigieuses se bousculent en fait aux portes de ce disque qui parvient néanmoins a maintenir sa touchante personnalité, préservée d’une influence trop encombrante. Les fans de (Smog) tendront d’abord une oreille attentive à l’écoute de l’arpège introduisant la première chanson. Mais le disque évolue par la suite entre arrangements acoustiques et mélodies soignées qui évoqueront plutôt la patte d’un Bonnie Prince Billy aux meilleures heures de "Ease Down the Road" ou celle des Red House Painters, en plus aériens. La voix de Tony Dekker n’a d’ailleurs rien à envier à celle de Will Oldham ni à celle de Mark Kozelek ; elle a la fragilité de l’une et l’élégance posée de l’autre. A l’heure où vrombissent les guitares électriques plus ou moins bien accordées des sempiternels "meilleurs groupes de rock du monde" Great Lake Swimmers s’insinue discrètement dans le paysage musical pour proposer l’alternative attendue depuis longtemps. Il convient donc de se laisser tenter par les eaux froides et douces de ce grand disque mélancolique promis à la confidentialité et d’y plonger la tête la première. C’est un bain vivifiant et salvateur. (Popnews)
Groupe inconnu au bataillon.Au commencement, je ne savais rien sur les Greats Lake Swimmers excepté ce qu’en disait ce rapide descriptif : « Quelque part entre My Morning Jacket et les Scud Mountain Boys ».« Un de plus » me disais-je. Mais bon, le souvenir de tous ces bons moments passés auprès d’albums de la trempe de « The Lioness » de Songs:Ohia où encore « Viva Last Blues » de Palace donnèrent une fois de plus raison à l’appel de ce style si particulier qu’est pour moi la country-folk.Originaire de Toronto, Tony Dekker est un sing/songwriter visiblement assez talentueux. Centre orbital du groupe, c’est autour de lui que gravitent les autres membres des Great Lake Swimmers et cella se ressent immanquablement dans leur musique où l’instrumentation semble n’avoir pour seul but que de mettre en avant l’esthétisme hors-norme de notre jeune canadien. Des ballades folk mélancoliques créées principalement par des mélodies de guitares acoustiques délicates et par un chant débordant de sincérité reprenant des paroles d’un lyrisme à fleur de peau, voilà ce qu’offre sans aucunes prétentions ce disque. Même s’il n’apporte rien de bien nouveau au genre, cet album, enregistré dans un silo à grain abandonné, mérite malgré tout que l’on s’y attarde un peu ne serait-ce que par le sentiment d’intimité fort qu’il réussit à établir entre lui et son auditeur.Tony Dekker y aurait-il gagné en enregistrant un album solo ? Voilà la question que je me pose après chaque écoute de leur première réalisation. (indiepoprock)
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le 28 févr. 2022

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