Les chansons de Holiday in Rhode Island avancent lentement, sans brusquer, par touches ouatées. Mais c'est une lenteur apprivoisée, insufflée par les deux voix féminines qui s'étirent comme un ciel de traine ou comme une pièce d'eau sur laquelle ricochent les notes des cordes pincées des guitares ou des frappes d'un maillet sautillant sur les touches d'un xylophone. Quelque part entre Young Marble Giants et Marine Girls, the Softies pourraient être apparentées à des cousines outre Atlantique (côté Pacifique) de Tracyanne Campbell. Avec leurs 14 chansons rossignolesques, Rose Melberg et Jen Sbragia partagent un journal intime dont les pages relatent les émois amoureux, les déceptions amoureuses, la tristesse amoureuses et la solitude qui en découle : l'expression et les confidences d'êtres blessées et inconsolables mais dont toute la force réside précisément dans cette écriture et ce chant apogéiquement fusionnelle. La poésie sans prétention des Softies réside aussi dans leur geste musical empreint d'un rythme intimement biologique en accord avec les humeurs de la nature. A la fois balayé et bercé par ces mouvements émotionnels et atmosphériques, on se laisse autant porter par le cycle des saisons que troublé par la visite de lieux habités par les souvenirs. Dans ce troisième et dernier album (avant un retour inattendu en 2024) l'univers narratif des Softies est subtilement accompagné comme peuvent illustrer les merveilleuses envolées que sont "The Beginning of the End" et "Me and the Bees". Now it's just me and the bees in the cyclone of fallen leaves.