Non content d'avoir déjà révolutionné une première fois le monde du rock, d'avoir créé un son et une réelle nouvelle vague sonore, Led Zeppelin récidive quelques mois après leur premier album. Alors que Abbey Road, le chant du cygne, parade en tête des hits parades, le Dirigeable de Plomb vient dégommer les standards et montrer à tous la nouvelle définition du rock'n'roll. Les années 60 sont enterrés et les années 70 commencent réellement !
Qu'on se le dise, plus rien ne sera jamais comme avant.


Le premier album sonnait comme une nouvelle façon de faire du rock. On découvrait la sonorité de Led Zeppelin, mais ce second album sonne pour sa part comme un étrange mélange. Le groupe a appris à se connaître, à jouer réellement ensemble. Le talent et l'expérience ont laissé place à l'alchimie et à l'harmonie totale. Led Zeppelin impose son son, certes, mais ils jouent avec, surtout. Ils montrent qu'ils maîtrisent leurs sonorités et ne s'y enferment nullement, maitrisant un réellement panel.


Cet album a été composé et enregistré sur la route. Dans des lieux différents. Deux choses en ressortent. Première une étonnante uniformité sonore avec des conditions d'enregistrement pourtant très différents. Quel miracle ? Page tout simplement, qui contrôle les sections et sait très bien où il veut aller. Ainsi ce sont les sonorités de guitare qui dominent majoritairement sur l'album. Peut être que Page prend trop de place ? Mais il développe un tel jeu, de telles variations de sonorité qu'on le pardonne bien volontiers.
De l'autre côté, l'aspect live s'entend très bien. Led Zeppelin navigue entre la prestation assumée, l'envie d'impressionner comme lors d'un show, et dans le même temps garde des phases planantes pour un public en transe. Phase qui ne durent jamais trop longtemps et se terminent en apothéose avec une remonté de la puissance divine que portent en eux les membres du groupe.
Ainsi l'album sonne comme un mini-concert, avec ses phases calmes, son énergie, ses sonorités à la fois chaude et lointaine, ses prouesses techniques incroyables (ce solo de batterie). Page a beau porter l'album, il laisse de la place pour chacun et on entend bien mieux la basse que sur la première galette du groupe.


Bien entendu cet album regorge de tubes. Comment parler de Whole Lotta Love qui amène immédiatement à l'auditeur le son Led Zeppelin : cette guitare sur-puissante, n'hésitant pas à faire un riff simple mais puissant, soutenue par une batterie majestueuse et un chant qui est l'incarnation même de la sexualité et de la force. Ce pont, ce long pont planant laissant l'imagination voguer et se développer. Rien qu'avec ce premier titre on comprend qu'écouter Led Zeppelin ce n'est pas juste une écoute, c'est une expérience. Toutes les drogues ne sont pas illégales.
What is and What sould be casse totalement l'ambiance avec un tout petit début bien calme. On pourrait croire que le morceau sera doux et pourtant grosse erreur. Immédiatement la guitare, la basse, la batterie et le chant soutenu de Plant remontent la violence, sans aller trop loin. Ils en gardent sous la pédale et tiennent à souligner cette douceur. Mais finalement, petit à petit, avec des prouesses techniques et des sonorités de plus en plus nouvelles à la guitare, Page fait monter la chaleur et l'outro apparaît comme très indépendante. Ce final sans devenir excessivement violent se dévoile comme une libération.
The Lemon Song est beaucoup plus direct dans son approche. Pas de fausse douceur, Bonham tient la baraque et il faut se préparer à des phases de pures vitesses où lui et John Paul Jones vont assurer tandis que Page va développer encore tout son talent pour faire crier sa guitare, annonçant les propres cris de Plant. Le morceau est assez long, comme une improvisation, comme si les musiciens n'en faisaient qu'un, et que cet être tentaculaire savait quoi improviser au bon moment. Le morceau est vivant et en même temps totalement harmonieux. Un art dont Led Zeppelin s'était fait maître.
Terminant la face A Thank You montre les capacités de douceurs, sans se renier du groupe. Là encore le travail musical est incroyable, là encore Bonham amène une réelle vie au morceau, la batterie étant quasiment un instrument mélodique avec lui.


La face B annonce du lourd, du très lourd. Le Dirigeable va se poser, on a besoin d'un son lourd, dur, agressif, féroce, froid comme de l'acier et avec la chaleur, dans le même temps, des forges d'Héphaïstos. Ce morceau c'est Heartbreaker, qui met John Paul Jones clairement en avant sur les couplets. Ce refrain mythique offrira du rêve pendant des années à bien des fans. Le groupe s'autorise un pont pour Page, afin de bien mettre en avant son talent, sans pour autant avoir un arrière fond endormant. Soit on a Page tout seul, soit Jones et Bonham propose un non-fond, mais un vrai passage puissant. Le titre se termine soudainement...
Offrant ainsi la meilleure transition possible pour Living Loving Maid (She's just a woman). Le titre là encore met en avant le travail de bassiste de John Paul Jones et se révèle très groovy. C'est dire les décennies d'avance de Led Zeppelin ! Caché par Heartbreaker, se titre offre une transition sèche et montre la variété du groupe.
Ramble On fait parti des morceaux hybrides. Possédant à la fois une grande douceur, typique de nombreux titres de Led Zeppelin de la face A (Thank You par exemple) il a également dans ses refrains l'énergie naturelle de Led Zeppelin. Le Dirigeable n'a pas forcément besoin de mettre en marche sa sulfateuse sonore pour montrer les diversités de son son. C'est ça la force de Led Zeppelin : pas un seul son, mais une palette sonore énorme.
Moby Dick est presque une anomalie : un solo de batterie. Mais pas n'importe lequel, LE solo de batterie, un solo de Bonham, le plus grand de tous les batteurs. Autant dire que ça s'entend. Mais Led Zeppelin ne serait pas Led Zeppelin si pour annoncer ce solo, Page et John ne réalisait pas un riff court mais particulièrement efficace montrant que rien n'est jamais fait sans travail pour ce groupe.
Bring it on Home termine l'album et est presque une blague du groupe. On pouvait regretter sur leur premier disque qu'ils n'avaient pas fait leurs toutes leurs reprises, notamment blues. Brint it on Home réussit le pari d'assumer sa nature blues et de montrer en même temps le vrai son de Led Zeppelin. Ressortez le Dirigeable, le temps est découvert, on va amener ce son si lourd et si puissant et terminer en beauté.


Led Zeppelin II est une ode à la musique. Plus qu'à l'amitié, à la foule, au plaisir des concerts, au sexe, bref, plus qu'à tout ce que Led Zeppelin a pu faire et mettre en évidence, le groupe ici glorifie la déesse musique en se glorifiant eux-mêmes. Les seigneurs sont parmi nous !

mavhoc
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le 28 mai 2017

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