Peter Bjorn and John seront associés à jamais à Young Folks, la scie pop qu'on sifflote pour le restant de la journée dès qu'on l'entend. Une chance pour la triplette suédoise, mais peut-être aussi une malédiction. Car là où l'on attend un Young Folks bis, eux s'évertuent à démontrer qu'ils ont d'autres cordes à leur arc. Ils ont raison. A nous seulement de leur prêter suffisamment attention. Après un album quasi instrumental l'an dernier, Living Thing est le véritable successeur du Writer's Block qui les a révélés en 2006. Autant prévenir : il n'y a pas un sifflotement en vue et il faut s'habituer au parti pris rythmique, un récurrent claquement métronomique de percussions (synthétiques ?). De plus, le délibérément répétitif The Feeling n'est pas la plus engageante des entrées en matière. Mais ce serait dommage de tourner aussitôt les talons. A la réécoute, l'album dévoile plus de richesses qu'on ne croyait, tant dans les arrangements inattendus que dans les mélodies qui s'incrustent en douceur.Si le titre renvoie à un vieux succès d'ELO - regrettons, au passage, que Bjorn Yttling ait remisé ici sa science des cordes qui illumine le dernier Anna Ternheim -, ce sont d'autres orfèvres pop du nord de l'Europe qu'évoquent nos trois Scandinaves : les Nits bataves. Et pas uniquement parce que la voix de Peter Morén rappelle celle de Henk Hofstede. Il y a dans l'écriture des Suédois cette même évidence, ce même naturel à s'emparer de l'idiome pop anglais pour le nourrir d'une sensibilité et de préoccupations propres tout en préservant son irrésistible universalité. Blue Period Picasso, supplique d'un tableau prisonnier d'un musée de Barcelone, est du pur Nits, dans la forme et dans l'esprit. Ces derniers gagnent encore à être connus. Peter, Bjorn et John méritent d'être redécouverts. HC


À l’origine, Peter Bjorn And John, votre laquais s’en tamponnait comme de sa première serviette hygiénique. Certes, on avait gazouillé Young Folks en chœur avec la terre entière, mais pas au point d’en perdre le souffle. On a bien fait de l’économiser, ce souffle, car on n’en aura jamais assez pour chanter les louanges de Living Thing, un cinquième album dressé sur un fil coupant, tel un os musical à ronger avec minutie, telle une volte-face décharnée où le trio ne siffle plus qu’une seule chose : la fin de la récré. “I feel it/Can feel it/There’s something in the air/It’s hard to understand/It’s easy to make things end/Please prepared for a change”… Dès l’ouverture, comme des Flaming Lips foutus à poil, The Feeling édicte et sublime la nouvelle donne en diffusant ce halo envoûtant qui ne cessera plus de léviter, alimenté qu’il est par l’infaillible production de Bjorn Yttling, à l'œuvre sur le déjà lapidaire et ondoyant Youth Novels (2008) de Lykke Li. Rythmique stricte et focale, groove en Lego caréné par les claquements de mains ou de doigts, bourdonnements synthétiques, électronique à la pipette, claviers et chœurs robotisés : les paramètres sont dévoilés pour ensuite être aiguisés, tribalisés, et dosés à divers degrés. En guise de compte-gouttes, des mélodies incroyablement précises et concentrées, qui se laissent aiguiller par un chant précieux à l’heure de guider des ritournelles qui se distendent dans le désœuvrement. Tout, ici, respire l’intelligence, jusqu’au tracklisting parfaitement agencé qui fait se succéder antiennes mélancoliques (les paroles sans regrets de It Don’t Move Me, l’acmé à la Depeche Mode Just The Past), joyeuses réactions (le single enfantin Nothing To Worry About, l’accélération rigide et tubesque Lay It Down) et tendres estocades (la joliesse en écho de I Want You, le rachitisme instrumental de Stay This Way). Sans oublier, en plein milieu, le génial Living Thing, dont les secs cliquetis trépignent sur place avant de se laisser catapulter au sein d’un refrain stupéfiant d’évidence, de puissance et d’ingéniosité. Pop funambule, newwave désossée, dub step orchestré, doo-wop futuriste, electro de traverse… Difficile de qualifier cette collection de vignettes étranges et hantées qui, lorsqu’elles récoltent l’attention qu’elles méritent, transpercent l'esprit avec une volupté lancinante. On ne sait plus très bien si ce sont les années 80 qui accouchent d’un chef-d’œuvre à retardement, ou les années 2050 qui engendrent un sommet d’anticipation. Peu importe, l’essentiel est là, aussi important à retenir que son calendrier menstruel : Living Thing est un disque mémorable.(Magic)
"Living Thing" est le cinquième album des Suédois mais pour tout le monde, ce n'est que leur deuxième vu le succès de "Writer's Block" qui les a vraiment révélés (entre temps, ils nous ont offert un quatrième, "Seaside Rock", tiré à 5000 exemplaires et passé un peu inaperçu). Plus que cet album, c'est leur tube ("Young Folks") qu'on a tous siffloté au moins une fois qui a marqué l'année 2006. Ce tube sauvait un album inégal et assez incohérent qui essayait d'aller un peu partout sans vraiment convaincre. "Living Thing", c'est exactement le contraire. Les Suédois gardent toujours ce côté touche à tout mais avec une ligne directrice qui rend ce cinquième opus plutôt réussi. Le rusé Bjorn Yttling (basse et claviers) nous avait déjà bien prévenus en produisant impeccablement le dernier album de Lykke Li. Peter, Bjorn and John ne nous ouvre pas de nouveaux horizons mais nous offre une sorte de concentré de ce qu'il a pu se faire de plus intelligent dans la pop ces quinze dernières années. Plus efficace et intelligent que vraiment talentueux, "Living Thing" séduit sur la longueur, ne se perdant que rarement dans une volonté de trouver la hype du moment. Car oui, c'est quand même un peu le reproche qu'on pourra le faire à ces Scandinaves : chercher absolument le machin, l'arrangement catchy qui fera mouche. Ainsi sur des mélodies bien ciselées, pendant que Peter place un chant bien plus impliqué qu'auparavant, Bjorn multiplie les arrangements parfois minimalistes ("Blue-Period Picasso") parfois fracassants ("Living Thing"). Sur le dernier titre ("Last Night"), Peter surprend en conduisant, sur un ton plus affecté, un morceau mélancolique construit sur des claviers tout droit exhumés des eighties. Avant l'écoute de "Living Thing", je ne peux pas dire que je trépignais d'impatience aux prochaines sorties du trio suédois, maintenant presque...(Popnews)
Bien qu’il ait acquis une indéniable crédibilité depuis ses débuts en 1999, le trio Peter Bjorn & John a toujours su faire parler de lui via quelques coups de poker réussis, surtout depuis qu’il a progressivement mis ses guitares en retrait. Ces coups, ce sont quelques singles assez forts pour porter à eux seuls le poids d’un album tout entier: le genre de constat qui viendrait mettre en péril l’espérance de vie de n’importe quelle autre formation, mais qui pourtant a conservé intacte la curiosité du public à l’encontre des Suédois. C’était le cas il y a trois ans avec l’énorme «Young Folks», solide base d’un «Writer’s Block» autrement plus modeste mais néanmoins plaisant. C’est d’ailleurs le dernier souvenir impérissable qu’avait laissé Peter Bjorn & John, «Seaside Rock» sorti l’an passé n’ayant été proposé qu’en vynil et au téléchargement, avant de déposer ce «Living Thing» encore plus contrasté que ses prédécesseurs. Car des «tubes» pop aux allures bricolées, ce nouvel album en contient quelques-uns, et pas des moindres: si «It Don’t Move Me», «I’m Losing My Mind», «I Want You!» et «Last Night» prennent trop de temps à se révéler pour en faire totalement partie, ce n’est pas le cas des énormes «Nothing To Worry About» et «Living Thing» à l’effet immédiat. De quoi se plaindre alors? Simplement du fait que le reste de ce tracklisting peine à tenir la route, ces quelques hits venant souligner de manière plus flagrante autant de titres beaucoup plus ternes car moins inspirés. Peter Bjorn & John auraient peut être ainsi du s’octroyer quelques mois de composition supplémentaires pour enfin parvenir à un disque en tous points cohérents, sans creux ni moues. «Living Thing» laisse donc ce goût quelque peu gênant de remarquable mini-album qu’il n’est pas, plombé qu’il est par quelques intrus dont on se serait bien passé. (Mowno)
bisca
6
Écrit par

Créée

le 12 avr. 2022

Critique lue 2 fois

bisca

Écrit par

Critique lue 2 fois

Du même critique

Le Moujik et sa femme
bisca
7

Critique de Le Moujik et sa femme par bisca

Avec le temps, on a fini par préférer ses interviews à ses albums, ses albums à ses concerts et ses concerts à ses albums live. Et on ne croit plus, non plus, tout ce qu'il débite. On a pris sa...

le 5 avr. 2022

3 j'aime

Santa Monica ’72 (Live)
bisca
7

Critique de Santa Monica ’72 (Live) par bisca

Ça commence avec la voix du type de KMET, la radio de Santa Monica qui enregistre et diffuse ce concert de Bowie, le 20 octobre 1972. « Allez hop on va rejoindre David Bowie qui commence son concert...

le 27 févr. 2022

3 j'aime

Taormina
bisca
7

Critique de Taormina par bisca

Taormina, perle de la Méditerranée, disent les guides touristiques à propos de cette belle endormie sicilienne, bordée par le volcan Etna. Taormina, perle noire dans la discographie de Murat, dira la...

le 5 avr. 2022

2 j'aime