Moi et mon camion
6.6
Moi et mon camion

Album de Merz (2008)

On pourrait se demander pourquoi le trop discret Merz ne collectionne pas les disques de platine. Sa folk-pop, aussi déli-cate qu'intense, a tout pour plaire, chose rare, au grand public comme aux puristes et aux esthètes. Mais peut-être que le problème du mystérieux Conrad Lambert (alias Merz), insaisissable Anglais errant depuis bientôt dix ans, est là : impossible à ranger dans une case commode, il déroute. Une fâcheuse étiquette de Beck british, autrement dit de touche-à-tout surdoué, accompagnant son premier album, en 1999, ne l'a guère aidé, c'est certain. D'autant que l'insoutenable pression que cette potentielle poule aux oeufs d'or a subie dans la foulée l'a aussitôt fait disparaître quelques années de la circulation. Il lui aura fallu sept ans de réflexion pour accoucher de Loveheart, en 2006, merveille d'écri­ture et de chants précieux et intemporels, pour le retrouver, animal blessé métamorphosé en singer-songwriter d'une autre ère, cousin distant de Cat Stevens ou de l'Elton John raffiné des débuts. Moi et mon camion (titre en référence au nom de l'entreprise de déménagement qui a présidé aux incessants changements d'adresse du tourmenté Merz) poursuit dans la même veine. Balades sensibles aux arran­gements sans emphase, comptines mélan­coliques belles à pleurer (seul dans son coin de préférence), portées par une de ces voix délicieusement affectées et manié­rées comme les grands chanteurs excentriques anglais, de Ray Davies à Steve Harley, ont toujours su les cultiver. Entre guitare acoustique et usage sage et ins­piré de l'électronique, Merz est pourtant loin d'oeuvrer dans le rétro et la nostalgie : cet amoureux solitaire, en marge et pourtant accessible à tous, incarne à merveille l'artiste pop et indépendant idéal d'aujourd'hui. (Magic)


Dans un camion, chantait avec l’élégance qu’on lui connaît Dominique A sur son album L’Horizon. L’Anglais Conrad Lambert, qui officie confidentiellement depuis une petite décennie sous le nom de Merz, a récemment baptisé son troisième album Moi et mon camion, et c’est la même délicatesse, la même grâce dans le songwriting qu’on doit saluer ici. (Ré)apparu il y a trois ans, après une longue traversée du désert, avec l’immaculé Loveheart, recueil de folk-songs qui dans un même élan emportait la kora de Toumani Diabaté et les arpèges de Devendra Banhart, Merz avait rejoint la famille des  génies discrets, des bâtisseurs de forteresses cachées, qu’on invite souvent à partager nos soirées ou envahir nos iPod. Pour ce nouvel album, c’est à une autre tribu de gens doués que le songwriter a fait appel, s’entourant de musiciens de Goldfrapp et de Portishead, ou de The Earlies, autre formation scandaleusement méconnue. Résultat : Conrad Lambert est un peu “Joseph” Conrad Lambert et son album est un grand roman d’aventures. On y entend du folk venu du ciel (The Eviction Song), des échos du McCartney des bons jours (Lucky Adam), des nappes capiteuses (Silver Moon Ladders), des comptines qu’aurait pu chanter Al Stewart en 1972 (No Bells Left to Chime) et des guitares modestes (Cover Me), le tout produit, comme chez Piers Faccini ou Andrew Bird, avec la précision d’un orfèvre, l’humilité d’un artisan. Singulièrement beau, ce camion-là a ceci de paradoxal qu’il est à la fois léger comme une plume et d’ores et déjà un poids lourd de 2008. (Inrocks ) 
Voilà le retour d'une perle rare d'Angleterre. Après nous avoir gratifié, en 2005, d'un fabuleux "Loveheart", trésor de pop-folk intimiste et épique, Merz nous emmène à bord de son camion pour une traversée dont on ne risque pas de sortir indemne. Il s'agit bien ici d'une échappée belle dans un très beau camion, le voyage valant plus que jamais le détour. La vitre grande ouverte, les paysages défilent, on respire. Le camion est chargé de pierres précieuses que l'orfèvre Merz a taillé, avec une  minutie et un goût pour les mélodies délicates et célestes. A mi-chemin, il côtoie les cieux et nous offre une des plus belles ballades jamais entendue, Silver Moon Ladders. Ainsi, nous, auditeurs conquis, gravissons l'échelle pour atterrir sur la lune, les larmes aux yeux devant tant de beauté. L'ambiance chargée en mélancolie de Presume Too Much nous secoue un peu. On reprend ses esprits avec l'enjoué Lucky Adam, véritable surprise pop des beaux jours. Ce qui rend cet album aussi élégant, ce sont ces guitares omniprésentes, électriques et acoustiques, étoffées par des choeurs (The Eviction Song) et des cuivres (Malcolm). Le sublime Cover Me débute en douceur, puis la batterie fait son irruption, les choeurs enflent comme un cri du coeur. Il serait insultant de cantonner Merz à une étiquette de folkeux. Il est un songwriter immensément précieux, certes rangé des voitures quant à son passé électro, mais pas du camion. Il l'a clairement affirmé : lui et son camion, c'est pour la vie. L'avantage de ce véhicule étant l'espace, il en a occupé tous les recoins possibles. Le voyage est apaisé mais jamais ennuyant. "Moi et mon camion" est un album bouleversant de sincérité. Merz est un gars ultrasensible au talent fou, lequel, depuis son come-back inespéré en 2005, ne fait que se confirmer pour enfin devenir une évidence. (indiepoprock)
bisca
7
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le 9 avr. 2022

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