Quand « The Age of Consent » sort en 1984, le mouvement est déjà bien installé. C'en est même une très bonne année avec les débuts d'Alphaville et leur « Forever Young » , le « SFX » d'Haruomi Hosono (curiosité d'un membre d'YMO sur laquelle il faut foncer), « Who's Afraid of the Art of Noise » ou encore des sorties – pas les meilleures - d'Ultravox, OMD, Depeche Monde, Jean-Mi Jarre sans oublier le « Like A Virgin » de Madonna, qui ne fait qu'asseoir la Synthpop dans le mainstream. Deux albums vont pourtant sortir du lot, principalement par leur engagement pour la cause homo-sexuelle « Welcome to the Pleasuredome » de Frankie Goes to Hollywood et « The Age of Consent » de Bronski Beat.


Non pas que la musique n'est pas importante ici – je reviendrai un jour sur le travail de Trevor Horn pour le groupe derrière « Relax » - mais elle marquera moins que le message derrière les deux œuvres ; l'homo-sexualité existe et il faudra faire avec. Comme l'écrit Simon Reynolds dans son « Rip it Up and Start Again », ça ne se lit pas sur son visage que Jimmy Somerville est homosexuel (contrairement aux Frankie Goes qui en poussait l'imagerie dans ses retranchements) ; son objectif était de montrer qu'un gay ressemblait à n'importe qui d'autres. Pourtant, ce qui frappe aussi, c'est la différence entre ce physique , un peu skin sorti tout droit de « This is England » et la voix du personnage, ce que je ne m'attendais pas à la première écoute.

« Smalltown Boy » est bien sûr devenu un hymne, repris dans le film « Pride » sorti en 2014 (excellente BO pour les amateurs Synthpop) et cela est moins du à la production – certes impeccable, jouant avec adresse sur un sentiment entre joie et mélancolie – de Steve Bronski et Larry Steinbacheck qu'au chant haut-perché de Jimmy, rappelant alors l'autre icône queer Sylvester, aussi bien pour sa façon de pousser la gueulante que dans le rythme de certaines compositions ; « Why » est clairement un single Hi-NRJ.


Outre ces deux tubes, que trouvons-nous dans cette première galette ? Deux reprises. Une de « It Ain't Necessarily So », un standard de jazz des Gershwin, qui je trouve, ne marche pas forcément dans une production synthétique, même si elle sonne toujours moins kitsch que le « Heatwave » un peu plus loin. Et une autre « double » reprise du « I Feel Love » de Moroder/Summer et « Johnny Remember Me » de Goddard, dans une version rappelant fortement celle du producteur italien Giorgio, moins Moog certainement mais avec quelques ajouts sympathiques, un mélange de deux classiques qui fonctionne étonnamment bien.

Sur le reste de l'album, qui oscille donc entre Hi-NRJ synthétique (« Junk » fait le job) et des titres plus « downtempo », Jimmy continue à pousser ses longues notes de diva soul, souvent les mêmes, au point où on finit par se lasser de ce qui faisait la qualité première d' «Age of Consent ». Surtout pour des textes aussi bateaux que « No More War », sur lesquels je ne peux même pas jeter la pierre, cri du cœur oblige, on a pas mieux à dire dans l'époque de conflit actuelle et subie. « Need-A-Man Blues » et « Love & Money » sont quant à elles, des pièces aussi rythmés qu'atmosphériques, j'apprécie beaucoup le second, notamment pour ce gimmick au clavier qui revient tout le long et ces envolées planantes au saxophone.


Vous serez moins étonnés après avoir lu cette chronique de savoir que le second album de Bronski Beat, sans la voix de Jimmy Somerville parti fonder The Communards, ait moins fonctionné. Sans lui, « The Age of Consent » aurait été beaucoup plus commun. On peut retrouver un petit peu la saveur de ce qu'aurait donné un VRAI second album, avec le trio d'origine sur l'album de remixes et de démos « Hundreds & Thousands » ou sur certaines versions « expanded » mais pour la suite, on préférera passer du côté des Communards plutôt que chez Bronski (mais bon, vous me connaissez, je vais écouter les deux quand même!)

Strangeman57
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le 17 janv. 2024

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