Badly Drawn Boy, meilleur songwriter anglais de sa génération a réussi un album patient et magique, The Hour of bewilderbeast. Son géniteur, Damon Gough retrace ici la plus spectaculaire de ses aventures, tout y est pensé et pesé. S'il compose avec une apparente facilité des pop-songs foudroyantes (Stone on the water ou Another pearl), Badly Drawn Boy s'emploie à un charcutage méticuleux de leurs tissus et à une distorsion patiente de leurs muscles. S'il ne présentait pas tant de malfaçons, ce premier album ne mettrait pas longtemps à décrocher les disques de métaux précieux bien qu'il lui manque les rondeurs désirables des produits pour FM. Sûr, pourtant, qu'un jour Mister Gough sera du goût du plus grand nombre. (Inrocks)


Allez savoir, c'est peut-être dans l'air de la ville, dans l'eau du robinet ou le lait des enfants, peut-être même une curiosité génétique à dénicher, mais la question mérite d'être posée. Comment se fait-il que la bonne ville de Manchester nous désigne, à chaque fois que l'Angleterre pop est à la traîne, ses champions du songwriting hors norme ? Quand il ne se passe plus rien à Londres, Brighton ou Bristol, la jeunesse indie regarde toujours up north au cas où:Buzzcocks, Joy Division, New Order, les Smiths, Stone Roses, Oasis (si, pour Supersonic, Live Forever ou Wonderwall tout de même)... Une lignée exemplaire limite fin de race qui, après les règnes de Factory la sévère et Madchester l'extasiée, semble avoir droit à un repos mérité. Out les drogues, les fêtes, la fière attitude lad, et retour finalement à la musique et à l'esprit sage du fan de pop. Le label Twisted Nerve, monté à la main par le Dj Andy Votel et Damon Gough, l'unique habitant de la planète Badly Drawn Boy, ne prône que l'amour déraisonnable des mélodies claires, du bricolage modeste, des guitares en bois et des disques de post rock américain (on s'amusera à dénicher sur le site de Twisted Nerve les playlists étonnantes des deux compagnons citant Jim O'Rourke ou Sam Prekop). Ce profil bas suffit amplement pour apprécier à sa juste valeur l'album The Hour Of Bewilderbeast, entièrement dédié au folk éternel et à ses compositeurs mythiques. Il est amusant de retrouver ici les fameux arpèges de Fred Neil sur Camping Next To Water, l'intro du Fruit Treede Nick Drake dans Stone To The Waterou les harmonies de Simon & Garfunkel avec This Song. Mais cet art de l'emprunt ne servira pour Badly Drawn Boy que de subtil marchepied pour gravir plus facilement les hauteurs raréfiées de la chanson pop aux mélodies vertigineuses. En dix-huit titres, son premier album prend rapidement des allures de greatest hits impeccable, de best of luxuriant, voire même terrifiant, où les singles possibles (trop nombreux pour être cités) se succèdent aux classiques instantanés (Once Around The Block,Everybody's Stalking,Another Pearl...). C'est simple, on n'avait pas entendu cela depuis le disque éponyme des Stone Roses, cette envie de faire rimer pop avec jackpot. Sortons donc le tapis rouge et le champagne : voici d'ores et déjà LE disque pop de l'année. (Magic)
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le 26 févr. 2022

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