Les Guillemots se seraient-ils trompés d'époque ? Sur les traces des cousins migrateurs du pingouin dont ils ont piqué le nom, ces drôles d'oiseaux quittent le présent pour s'envoler très haut vers des contrées pop que l'on croyait pourtant perdues. A la fin des sixties, les jeunes chevelus à fleurs auraient naturellement rangé Through the Windowpane entre Pet Sounds, Sgt. Pepper s et Forever Changes. Mais les membres des Guillemots sont nés dans les années 1980 et leur premier album ? trésor intemporel aussi baroque que barré ? irradie l'automne 2006. A la tête (pensante) de ce quartet londonien : Fyfe Dangerfield, un musicien de jazz expérimental doté d'un improbable organe vocal. Une sorte de Rufus Wainwright qui aurait vu la Vierge Il y a deux ans, il passe une annonce dans le NME pour former un groupe. Le son des Guillemots sera à l'image de leur rencontre. Composite et spontané. Rejoint par un guitariste death-metal brésilien, une contrebassiste jazz et un batteur indie, Dangerfield n'a plus qu'à faire exploser son génie à la face du monde.
Il y a quelque chose de Scott Walker, de Phil Spector, dans l'orchestration luxuriante (et paradoxalement si légère) des murs soniques de Trains to Brazil, Made-Up Lovesong ou São Paulo ? cascades exaltées de cordes et de cuivres. Ailleurs, des ballades renvoient aux plages mielleuses d'un Burt Bacharach. Jamais pourtant, Through the Windowpane ne sent la naphtaline. Des samples façon Björk ou Radiohead (machines à écrire, enfants, oiseaux, miniatures electro ) irriguent sa moelle si précieuse. Raccords essentiels au temps réel. (Inrocks)


Nouveaux princes de la pop inventive et racée s'apprêtant à traverser la Manche coiffés d'une couronne de lauriers tressée par une presse britannique dithyrambique, les Guillemots ne devraient pas tarder à susciter dans nos contrées le même type de controverse et de sentiments contrastés que The Arcade Fire en 2005. Incontestablement, ce quatuor hétéroclite et multinational (un chanteur anglais, un guitariste brésilien, un bassiste canadien et un percussionniste écossais) ayant élu domicile en Angleterre fait preuve ici d'un esprit d'aventure et d'un rejet du cloisonnement imposé par les frontières traditionnelles des styles stéréotypés que tous les amateurs d'une pop ambitieuse et dépoussiérée ne peuvent que saluer. Tentant de mêler, dans un grand élan de syncrétisme progressif, les canons de l'écriture pop façon Brill Building, le sens de l'improvisation hérité du jazz et l'enrobage luxueux des arrangements classiques (ce n'est sans doute pas un hasard si Through The Windowpane a été enregistré dans le studio de George Martin), Fyfe Dangerfield et ses compagnons parviennent plusieurs fois à nous convaincre de leur potentiel d'apprentis alchimistes, le temps de quelques morceaux dont la plupart étaient déjà présents sur From The Cliffs, mini-album introductif paru au printemps. Il n'en demeure pas moins que, sur la longueur de ce premier album, on a bien du mal à dissiper sentiment croissant d'agacement provoqué ce maniérisme un peu pompier, cette façon parfois trop appuyée de vouloir balancer de la poudre aux oreilles en privilégiant la forme au détriment du fond et par une voix dont les chevrotements finissent par irriter. Authentiques génies du songwriting ou usurpateurs bien déguisés ? On attendra de verser quelques pièces supplémentaires au dossier avant de balancer Guillemots Through The Windowpane.(Magic) 
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le 27 mars 2022

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